Un œil s'ouvrit, puis se referma tout de suite après. Un autre œil s'ouvrit, tout d'abord bien grand, puis ensuite, se plissa pour ne devenir qu'une simple fente. Qu'était-ce que cela ? Calypso ferma finalement ses yeux, puis ouvrit la bouche. Bien grand, comme si elle cherchait à appeler au secours... Sauf que le seul son qui sortit d'entre ses lèvres fut celui d'un puissant bâillement qui n'eut pour seul effet que de la faire pleurer de l'oeil gauche. Oui, oui, seulement de l'oeil gauche. La jeune demoiselle ouvrit à nouveau les yeux, qui s'habituèrent bien vite à la faible lueur des lieux. Une fois éveillée, elle se rendit compte qu'elle était allongée, qu'elle n'était plus chez elle, et qu'elle était entourée de milliers de personnes. Calypso se releva avec grâce et souplesse, dépoussiéra ses vêtements, et regarda tout autour d'elle. Tout le monde la regardait.
Sans perdre contenance, elle se dirigea vers l'une des personnes, celle qui la regardait le plus intensément depuis qu'elle avait ouvert les yeux. Cette personne était une femme, tout comme elle. Plutôt menue, pas très grande, elle avait les cheveux ébouriffés. Et quels cheveux.. Magnifiques. A la fois auburn et noirs, ils semblaient légèrement onduler. Un visage assez fin était entouré par cette magnifique chevelure. Ce visage à la peau si pâle était parfait. Aucune impureté ne venait le souiller. Muni de très fins sourcils, le visage de cette femme rayonnait de charme. Des yeux d'un orange presque jaune, une bouche aux lèvres pulpeuses, un petit nez aquilin, tout était réuni pour délivrer une plastique presque parfaite. Calypso abaissa son regard, et aperçut que cette jeune femme qu'elle avait en face d'elle était habillée avec beaucoup de goût. Une longue robe en dentelle affinait gracieusement sa taille, une bague, très certainement en argent, entourant son annulaire droit, et un châle, d'une couleur noire profonde, était posé sur ses frêles épaules. Nus pieds, cette jeune femme ne parlait pas. Elle imitait à la perfection les gestes de Calypso, qui commençait par ailleurs à se poser des questions.
D'un coup, l'héroïne comprit. Ses yeux allèrent de droite à gauche, de haut en bas, et, d'un coup, elle soupira. Ceci n'était que son propre reflet. Un sourire vint appuyer ses lèvres, sourire qui se transforma en rire cristallin. Comment avait-elle pu se laisser avoir par... Des miroirs ? Elle se retourna, le temps d'essuyer une larme de rire perlant au coin de ses yeux, puis elle alla se placer au centre d'une pièce, qui, à première vue, était ronde. Cette pièce, décorée uniquement d'objets rouges (que ce soient des tapis, des lampes, des tableaux, des fenêtes, le papier-peint...). Il n'y avait que du rouge. Cette couleur, si familière aux narines, aux yeux, et aux papilles gustatives de Calypso, n'eut pour seul effet que de raviver sa faim. Elle posa alors sa main sur son ventre, et soupira lentement, afin d'oublier qu'elle avait besoin de boire et de manger. Rouvrant les yeux, elle continua son exploration dans la pièce, de ses petits pieds blancs, bien dessinés. Des photos d'elle-même étaient accrochées partout sur les murs, et au moins une vingtaine de grands miroirs, style Louis XV, occupaient la pièce. Calypso était dubitative. Aucune peur ne parvenait à pénétrer son esprit, mais l'incompréhension la gagnait. Qu'est-ce que c'était que cela ? A quoi jouait-on avec elle ?
Soudain, son œil pétilla. Il venait de découvrir une espèce de porte, assombrie, presque cachée!, par l'un des miroirs. D'un pas souple, sans bruit, avec souplesse, Calypso se dirigea vers cette dernière. Une fois parvenue devant, elle posa sa main aussi blanche que le lys sur la poignée, et la tourna. La porte s'ouvrit, et, soudain, ce fut tout noir.