Le réveil est une chose que Lilija aime. Sentir le moelleux des plumes qui lui servent de matelas sous son poids, la caresse de la pétale de rose qui lui sert de drap, la douceur du haricot qui lui sert d'oreiller. Oui, quand Lilija se réveille, quand ses yeux s'ouvrent sur la forêt qui émerge de son sommeil au même moment qu'elle, elle se sent bien, elle se sent vivante.

Mais pas cette fois, pas aujourd'hui. Autour d'elle, pas d'arbre, pas de fleurs, pas de chants d'oiseaux. Seul des murs rouge sang l'entourent. Lilija déteste cette couleur qui lui rappelle la mort la destruction, même la plus belle des roses rouges la rend hargneuse. La fée regarde autour d'elle et elle a peur de la suite, malgré l'origine de sa race, la destinée qu'elle ne peut contrôler la rend méfiante et soucieuse. Puis accrochés au mur il y a des photos, des photos de son passé. Petite fée souriante avec ses parents, petite fée seule dans la cours de l'école du Vieux Chêne, petite fée effrayée et timide. Mais il n'y a pas que des photos. Dans cette salle si immense pour la petite taille de Lilija de grands miroirs l'observent, la fixent et s'acharnent à lui renvoyer son image. Et Lilija ne peut détourner les yeux de son reflet. Elle qui peut lire les moindre pensées de ceux qui la fixent se sent complétement démunie devant sa propre image.

Son corps frêle mais voluptueux ne permet a personne de lui donner d' âge, mi femme, mi enfant. Lilija a des courbes bien placées, ses hanches un peu larges et sa poitrine petite et pleine s'accordent harmonieusement. Son visage est poupin , sa bouche est pulpeuse et d'un rose à la douceur parfaite, ses joues sont pleines et une fossette vient s'y lover tendrement à chacun de ses sourires. Son nez est mutin, peut être un peu trop petit et qui adore se retrousser quand Lilija est vexée. Ses cheveux longs noirs et bouclés encadrent le doux visage tout en donnant une sensation de vie sauvage.Ses oreilles, longes fines, se glissent discrètement à travers sa chevelure pour finir en pointe. A leur bout, deux boucles d'oreille se balancent au rythme ded déplacement de Lilija, l'une représentant une feuille de chêne, l'autre une plume de merle.

Puis il y a ses yeux, ses yeux à la couleur indescriptible, ses yeux que même la reine des fées lui envie, ses yeux qui reflètent chaque saison selon ses humeurs.En tant normal, quand Lilija est neutre et sereine, ses yeux ont la couleur de l'océan, un bleu clair illuminé par un jaune de rayons de soleil, doux reflets de l'été. Quand elle est heureuse, ses yeux ont la couleur du printemps, le rose, le vert, le violet se mélangent harmonieusement. Quand elle est triste, ils deviennent comme l'automne, brun, rouge, or. Et si vous vous osez à réveiller sa colère, il prennent la couleur de l'hiver, de l'orage et de la tempête. L'or devient gris,le bleu, noir et des éclats argents comme des éclairs viennent s'ajouter au courroux de la fée.

Et bien sur,il y a ses ailes, signe distinctif de son peuple. Les siennes rappellent plus celles d'une libellules que d'un papillon. Comme toute sa famille, elles sont d'un rose translucide avec de légers reflets bleutés. Quand Lilija les agitent, le bruit qu'elles émettent n'ai pas sans rappeler l'envol des oiseaux un soir de de fin d'été.

Oui, Lilija est belle mais elle ne le voit pas. Elle ne voit qu'une fée prisonnière de sa petitesse, une fée qui ne peut atteindre l'objet qu'elle convoite depuis de longues années. Lilija est prête à tout pour y remédier mais avant tout il faut quitter cette salle écarlate qui lui fait dresser ses cheveux sur sa jolie tête.

Et Lilija revient à elle, prisonnière de son corps. Quelque chose venait de se passer, elle s'était senti si loin pendant un instant. Puis son âme essayait de lui dire quelque chose... oui c'est cela, elle se sentait comme...comme violée. Puis elle sentit couler doucement sur son menton un liquide doux et épais. Tremblante, de ses doigts fins, elle recueillit les gouttes de sang qui se frayaient un chemin jusqu'à son cou, jusqu'à sa poitrine.
Des larmes commencèrent à perler au bord de son regard doré. Puis la fée leva les yeux. Et Lilija sourit .

Le noir, entier, le néant était tout autour d'elle. Vivant dans la nature depuis toujours, l'obscurité ne l'effrayée pas bien au contraire, elle l'apaisait. Bien sur elle aimait regarder le firmament et la lune quand le ciel était sombre, mais le noir complet lui permettait de se retrouver face à elle même et de méditer pendant de longues heures. Donc dans cette salle dont elle ne connaissait pas l'origine Lilija se sentait en sécurité, seule mais tranquille. Mais ce moment de répit fut de courte durée.

Ce fut tout d'abord des chuchotements, puis le ton augmenta d'abord légèrement pour finalement arriver à recouvrir entièrement les cris de la petite fée blottie dans ce qui lui semblait être un coin de la pièce.

Petite fée, Petite fée ,chantaient les voix, dit nous qui tu es,
Avoue-nous tes péchés, avoue nous tes qualités,
Que se cache t-il derrière se visage d'ange?
Oseras-tu te rouler toi même dans la fange?

Et Lilija obéit. Comme elle le faisait depuis toujours. Ses lèvres se desserrèrent, ses sanglots s'étouffèrent, et de sa voix mélodieuse et cristalline , la belle se mit à fredonner:




Petite fée en effet je suis,
Voilà ma réponse je vous obéis.
Dans la solitude j'ai grandi,
J'ai appris à vivre avec soucis.

J'avoue être menteuse et capricieuse,
Mais est-ce un péché quand on est malheureuse?
Il est tellement plus facile d'être coléreuse,
Pour cacher honteusement son coté peureuse.

Mais je suis fidèle au premier sourire qu'on me destine
trop naïve voila mon plus grand crime,
je donne tout sans compter même si ça ne paye pas de mine
en oubliant vraiment parfois d'être maline.

Mais je sais me battre et veut me battre jusqu'au bout,
Même si mes pleurs ne me garderont pas des coups,
Pour lui, et lui seul, je veux changer tout,
Amour, Amour je serais ton meilleur atout.



Et sur ces mots tellement forts de vérités, les voix se turent. Lilija ne s'était pas senti aussi bien depuis de nombreuses lunes.