Aïklando
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"Homme libre, toujours tu chériras la mer !"
"La mer enseigne aux marins des rêves que les ports assassinent."
"La sagesse, c'est d'avoir des rêves suffisamment grands pour ne pas les perdre de vue lorsqu'on les poursuit."
"Il est des moments où les rêves les plus fous semblent réalisables à condition d'oser les tenter."
"Le voyage est une suite de disparitions irréparables."
"Nous sommes de l'étoffe dont sont faits les rêves, et notre petite vie est entourée de sommeil."
"Dieu nous rêve. S'il s'éveille, nous disparaissons à jamais."
"Nous trouverons un chemin... ou nous en créerons un."
"Le rêve de l'homme est semblable aux illusions de la mer."
"Il n’est pas de vent favorable, pour celui qui ne sait pas où il va…"
"Il y a trois sortes d'hommes : les Vivants, les Morts, et ceux qui vont sur la Mer."
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 Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde

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Riza Ashe
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Riza Ashe

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MessageSujet: Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde   Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde EmptySam 26 Mai 2012, 02:21

Boum boum ! Boum boum !

Un rythme monotone, une douce mélodie rassurante qui rappelle que la vie coule dans mes veines, un bruit infime qui me sort d'une torpeur écrasante, tant pour mon corps que pour mon âme, et qui fait se révéler le monde à mes sens, une fois de plus. Riza est de retour chez les vivants.

Une douleur sourde me saisit le bas ventre. Le brouillard quitte peu à peu mon esprit, et je peux recommencer à penser normalement. Je suis allongée sur un sol froid et irrégulier. Je sens contre ma joue une arrête coupante, traçant une petite ligne douloureuse de ma pommette à l'arrière de ma mâchoire. Je me suis mordu la lèvre. Le sang n'arrive plus dans l'une de mes pattes, qui me donne l'impression qu'elle veut s’enfuir le plus loin possible pour arrêter de souffrir.

Rouge. C'est le mot qui décrit le mieux la première chose qui s'impose à moi quand mes yeux, comme impatients de connaître ce qui me cause ces douleurs, s'ouvrent en papillotant. Un rouge sombre qui rappelle celui du sang. Doucement, je me redresse et je m’assois, prenant garde à ne pas me servir du bras gauche, qui, je le sais, continuera quelques minutes encore à me lancer des signaux de détresse. Tout est silencieux, si ce n'est le bruit de mon cœur qui se calme peu à peu. Où suis-je ?

Devant moi, une jeune humaine entièrement nue me regarde d'un air hébété. Elle a de longs cheveux blancs qui pendent jusqu'à sa taille menue. Son air hébété et curieux, ainsi que ses formes discrètes, me font penser qu'elle n'a pas plus de 13 ans. Ses yeux sont inhabituels, dorés, avec des pupilles verticales. Subitement, elle prend un air sévère, me jaugeant, comme tâchant de déterminer si je représente ou non une menace. Je me campe face à elle, sur trois pattes puisque l'une d'elles est inutilisable, afin de lui faire comprendre qu'elle ne m'intimide pas, mais que je n'ai pas l'intention de lui faire du mal. Elle fait de même, comme si elle avait compris mon manège. Sa façon de bouger sa queue blanche et soyeuse en l'air est légèrement arrogante. Je fronce le nez. Les humains n'ont pas de queue.

Prenant intentionnellement un air amusé, je me rends compte que ce n'est que mon reflet que je contemple. Je suis une neko. Petit à petit, des bribes de mémoire me reviennent. Ce n'est pas la première fois que la mémoire me fait défaut. Ma propre identité s'en trouve parfois modifiée, mais cela ne dure jamais très longtemps.

Je baisse doucement les yeux sur mes mains, en guettant tout de même que le reflet imite mon geste, même si je sais que ma crainte est irrationnelle. Mes mains ne sont pas celles d'une humaine. Ni celles d'un chat. Mes doigts sont bien trop courts pour appartenir à un deux-pattes, et beaucoup trop longs pour ceux d'un quatre-pattes. Mes pieds, quand à eux, ressemblent à ceux des humains, mais possèdent de petits coussinets qui amortissent le son de mes pas lorsque je marche.

Détournant mon attention de mon reflet, je remarque pour la première fois qu'une multitude d'autres reflets m'entourent. La salle aux murs de sang est remplie de miroirs de toutes les formes et de toutes les tailles, certains gigantesques, d'autres tout juste assez grands pour que je discerne un œil ou une épaule dedans. Certains jaillissent des murs, tranchants comme la lame d'un sabre. D'autres parsèment le sol, le plafond, ou se dressent fièrement vers le ciel, tels des îlots montagneux dans une mer de sang.

Quel est cet étrange endroit ? J'entreprends de faire le tour de la pièce, cherchant une issue contre les murs. Rien. Cette pièce est parfaitement hermétique. Enfin, elle le paraît tout du moins, car si l'on m'a amenée ici, je suis forcément entrée par quelque part. Repérant sur l'un des murs un miroir de forme rectangulaire, je me mets en face de lui. Rassemblant ma force dans mes jambes, je décide de me mettre debout afin d'avoir un champ de vision plus large. Cette tâche est plus difficile que je ne l'avais prévu, compte tenu de la douleur sourde qui continue à me serrer le ventre comme si elle voulait l'aplatir. Néanmoins, j'y parviens et me redresse devant le miroir, qui me jette un regard contrarié.

S'il y a une porte c'est probablement là. Palpant du bout des doigts le miroir, je me rends compte sans grande surprise qu'il est parfaitement lisse. Agacée, je sors mes griffes afin de les faire crisser sur lui, comme si cette dérisoire punition allait le pousser à me révéler les secrets de cette pièce. Le son qu'il produit est particulièrement strident, probablement à cause du silence étouffant qui pèse sur l'endroit.

Je souris. Moi enfermée. Ça fait longtemps que ce n'est plus arrivé. Depuis le début de l'Après.

À cette pensée, mes traits se durcissent, et je me rends compte à quel point mon visage est différent quand mes expressions changent. Souriante, je suis une petite fille. Sérieuse, une jeune adulte préoccupée. Je fais le changement plusieurs fois, comme si ce jeu était nouveau pour moi. Innocente un instant, mature l'instant suivant.

Mon visage n'est pas déplaisant. J'ai même plusieurs fois été qualifiée de mignonne, sans arriver moi-même à saisir le sens complet de ce mot, beaucoup trop vaste à mon goût. Ceci dit, ma peau claire et lisse, mon visage large aux traits fins, mes grands yeux dorés, et mes cheveux doux comme des plumes me satisfont.

Soudain, mon regard est attiré par un reflet particulier, sur un miroir placé en biais, et qui me montre... Mon dos. Ma silhouette est fine et mes muscles laissent présager d'une force qu'on ne soupçonnerait pas de prime abord. Mais ce qui fait la particularité de mon dos, c'est ce pelage blanc et ras qui court de ma nuque à mes hanches masquant totalement ma peau. Et, surtout, le Motif.

Le Motif est là, poil noir sur poil blanc, comme si le destin avait voulu me charger d'un fardeau supplémentaire, dont j'ignore la nature. Un large cercle, dans lequel un pentacle touche ses bords. Sous lui, une large ligne horizontale est tracée, au milieu de laquelle apparaissent parfois des touffes de poils blancs, ce qui n'est pas le cas du cercle ni du pentacle. J'ai longtemps cherché la signification du Motif, en vain.

Résignée, je retourne au centre de la salle, en essayant de ne pas trébucher sur les miroirs, mettant un point d'honneur à progresser sur deux jambes, bien que mon bras ait eu le temps de se rétablir. D'un coup, je m'arrête, pétrifiée. Le dos du miroir face auquel je m'étais réveillée ne reflète rien. Il est couvert de photos de haut en bas. Méfiante, je m'approche afin de mieux distinguer ce qu'elles représentent. Il est divisé en trois parties. Il raconte ma vie.

Riza chaton, dans les bras de son père, qui lui sourit, tant de bienveillance se lit dans ses yeux...

Riza enfant, courant dans une prairie, ses cheveux volant au vent, libre et innocente.

Riza curieuse, demandant à son père où vont les nuages, refusant de rester sans comprendre.

Riza entourée de messieurs inconnus que son papa a fait venir, et qui examinent le Motif, prenant des notes, faisant des commentaires vides de sens.


Riza hésitante, les joues en feu, cachée dans un buisson, observant trois jeunes adolescents jouant à la balle en riant. Elle n'avait d'yeux que pour le grand brun musclé, dont les yeux rouges la transperçaient de part en part quand il les posait sur elle.

Riza riant aux blagues d'un jeune matou audacieux aux yeux langoureux.


Riza pleurant à chaudes larmes la mort de son père, si désespérée qu'elle ne ressent plus ni fatigue ni faim, tant elle est envahie par sa douleur.

Riza sur une route, marchant droit devant elle, ne sachant  ni d'où elle vient ni où elle va, sans aucune pensée, sans aucun sentiment.

Mon cœur se serre .C'était avant l'Avant. Je tourne la tête vers la deuxième des trois parties du miroir. Je n'ai pas envie de la voir. Pire, pour rien au monde je ne voudrais revivre ces années-là. Pourtant je ne me sens pas le droit d'éviter cette épreuve. Ce serait faire preuve de lâcheté. Serrant les dents, je regarde les photos.

Un démon. Le jeune homme qui lui fait face est un démon. Riza qui l'écoute, apeurée. Son regard cruel est insoutenable.

Riza dans les bras de ce même démon. Dans son dos, le démon sourit, d'un sourire diabolique.

Riza enfermée dans un cachot de pierre, enchaînée à son lit. En face, le démon lui parle. Il est en colère.

Riza, ouvrant froidement la poitrine d'un homme avec ses griffes. Son regard est éteint, elle qui a si souvent tué.

Riza pleurant encore et encore pour ne pas sombrer dans la folie.

Riza, les yeux agrandis par la peur, au bord de l'immense lac Olia, déchirée entre sa peur ancestrale de l'eau et l'urgence de se cacher.

Un petit ruisseau coule sur chacune de mes joues. Mon cœur tout froissé hurle qu'il regrette. C'était l'Avant. Maudissant une nouvelle fois cette partie de ma vie, je me tourne vers la troisième partie du miroir. L'Après.

Riza dans la cale d'un navire marchand, clandestine malade recroquevillée sur le sol de bois.

Riza tapie dans les fourrés aux abords d'un village paisible, observant toutes les allées et venues, essayant de déterminer qui aurait le plus besoin de son aide.

Riza sauvant un petit garçon qui se noyait, méprisant totalement sa propre phobie tant l'enjeu était important.


Riza rendant sa bourse à une vieille dame après avoir assommé l'homme qui la lui avait dérobée.

Riza maniant la serpe, récoltant le blé aux côtés d'un vieux paysan qui la nourrit en échange de son aide.

Riza errant, solitaire, dans une forêt, regardant les étoiles et écoutant le vent.

Je me rends compte que ma manie de tortiller ma queue dans mes mains lorsque je suis triste est revenue. Ça m'aide à me calmer. Mes sentiments sont redevenus neutres. Je ne suis pas fière de ce à quoi j'ai occupé l'Après. Simplement, je me devais de le faire. Je me détourne du miroir, m'accroupis pour m'assurer un meilleur équilibre. Je dois sortir d'ici.

Derrière moi se fait soudain entendre le bruit grinçant de la pierre qui frotte contre la pierre.


Dernière édition par Riza Ashe le Mer 19 Juin 2013, 01:50, édité 7 fois
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Oanig Ain'Hoa
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MessageSujet: Re: Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde   Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde EmptySam 26 Mai 2012, 11:50

Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde Yeuxdeglace

Comme des papillons autour d'une lampe, Nous Nous précipitons contre la nouvelle voyageuse. De Nos ailes Nous la frôlons, de la poudre se déposant sur sa carcasse et s'imbibant de son essence. Recouvert, immobile, elle est enveloppée d'un cocon évanescent aux milles couleurs. Dans un souffle, Nous le répandons autour d'elle, formant des murs, des tableaux, un sol et un plafond. Dans le néant qui l'entoure, c'est ainsi que Nous la rassurons.

Alors Nous Nous cachons derrière le miroir et patientons. C'est un Chat. Non, c'est une Humaine. Nous Nous remémorons soudain cette étrange créature que Nous avons mise au monde il y a peu de temps. Il s'en trouvait si peu pour venir Nous visiter! Cet exemplaire semble un peu frêle, les avions-Nous sabotées?

Insatiables de cette bestialité intelligente, Nous Nous bousculons derrière la surface vitrée, tant et si bien qu'elle finit par éclater. Les morceaux de verres volent dans la pièce, se fichent dans les portraits, découpent les murs. La peinture rouge se déverse en ruisseaux sanguinolents sur le sol, noyant les pattes de la créature dans le noir. Une goutte tombe sur son museau dans un tintement métallique. La clef. Et le noir fut.


Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde Clrouge2ch7

Hé bé! Oui, effectivement, on sent que ce n'est pas ton premier texte ^^ Tu es très agréable à lire. Fais tout de même attention à la salle noire, elle est traître. Il s'agit de parler de la personnalité, et non de retracer l'histoire de ton personnage.
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Riza Ashe
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MessageSujet: Re: Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde   Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde EmptyMer 19 Juin 2013, 01:28

Aux lecteurs (spoiler):


Subitement, un univers de sensations déferle sur moi.

Le bruit de mille miroirs qui explosent simultanément, tintement mélodieux mais chargé d'une menace sans équivoque. Il retentit dans mes oreilles pendant de longues secondes.

L'odeur de poussière et de craie qui se répand dans l'air, suffocante, m'oblige à respirer avec la bouche pour ne pas étouffer.

Et, chose la plus étrange de toutes, les murs si rouges qui se mettent à fondre comme s'ils s'étaient instantanément changés en sang, dont ils avaient l'apparence. Des milliers de perles d'étoiles scintillantes dans une mare de sang, qui se rue vers moi de toutes parts.

Puis, pour finir, le sol qui se dérobe lui aussi sous mes pattes, l'ultime vestige de la réalité des événements précédents s'envolant avec lui.

Tout cela s'est déroulé si vite que je n'ai même pas eu le temps d'esquisser un geste. Même pas eu le temps d'avoir peur.

Soudain, comme si le monde s'apercevait enfin de l'absurdité qui vient d'avoir lieu, tout disparaît. Le noir. Plus que le noir, le néant. Aucune lumière visible, même avec les yeux d'un chat qui voit la nuit comme en plein jour. Aucune gravité pour m'indiquer où se trouve le haut ou le bas. Aucune odeur, aucun bruit, aucune sensation. Bref, aucun repère.

S'il y a une chose que je hais par dessus tout, c'est perdre le contrôle d'une situation. Or en cet instant il me semble que je n'ai jamais aussi peu contrôlé ce qu'il m'arrive. Complètement affolée, je me mets à gesticuler dans tous les sens, cherchant en vain un objet auquel me raccrocher, ou un sol sur lequel m'allonger, tout plutôt que flotter dans cet océan d'incertitude sans bornes. Rien. Un petit cri plaintif s'échappe de ma gorge sans que je cherche à le retenir. Si quelqu'un est à l'origine de tout cela, il est temps qu'il comprenne qu'il va trop loin, que je ne pourrai pas supporter ce traitement très longtemps.

Une sensation. Infime, à peine un frisson, pourtant je l'ai senti. Instantanément attentive, tous les sens en éveil, je cherche à comprendre ce qui l'a provoqué. Un nouveau frisson, tel la caresse du vent sur ma peau nue. Sauf que ce vent-ci a l'air presque tangible, palpable. Plusieurs langues s'ajoutent à la première et soudain je suis envahie d'une multitude de caresses sur toute la surface de mon corps. À la fois agréables par leur douceur, et repoussantes par leur indiscrétion. Pourtant, palpant différentes parties de mon anatomie, je ne sens que ma peau.

Une voix retentit soudain, brisant le silence de plomb comme une pierre trouble le calme de l'eau. Je ne comprends pas les mots qu'elle prononce dans le noir. D'abord douce, puis progressivement, de plus en plus forte. D'autres voix se mêlent à elle. Je commence à trouver vraiment étrange cette cacophonie vide de sens, quand tout à coup elles se taisent. Le silence retombe sur le néant.

Comme changeant de méthode, les multiples langues immatérielles qui parcouraient mon corps se ruent ensemble vers ma tête. Je les sens. Ces multiples consciences qui m'assaillent et cherchent à pénétrer mon esprit, au plus profond de mon intimité. Je résiste, mais pas très longtemps, elles sont beaucoup trop fortes. Je suis envahie. J'entends leurs pensées comme je sais qu'elles entendent les miennes. Et c'est ainsi que, dans un néant absolu, un silence infiniment pesant et une immobilité totale, l'une des consciences s'adresse à moi.

« Toi qui es venue à nous, tu vas devoir sur-le-champ répondre de tes actes. Nous connaissons tes qualités et tes défauts, il est inutile d'essayer de nous les cacher. Assume-toi telle que tu es et nous te laisserons partir. »

Plutôt que des mots, ce sont des images, des sensations et des certitudes que cette conscience a introduites dans mon esprit. Mais je les comprends. Tant que je reste maître de moi, je pourrai dialoguer avec elles, en pleine possession de mes facultés. Elles n'influencent pas ma réponse, pourtant je sens qu'elles en auraient le pouvoir.

« Qui êtes-vous ? Quel est cet endroit ? »

« Silence, femme-chat. Ici nous sommes les maîtres et nous posons les questions. »

Elles ne répondront pas. Nouvelle certitude. Ce n'est pas du bluff, c'est une détermination inébranlable qui se dresse face à moi. Et puis de toute façon, on ne peut pas mentir à un esprit. Néanmoins, je ne tiens pas à me livrer tout de suite à ces envahisseurs.

« Vous qui prétendez si bien me connaître, pourquoi vous être adressés à moi dans la langue des humains ? »

« Nous ne parlons pas de ce que tu es capable ou non de faire, mais de ce que tu es. Tes tares et tes forces, les nobles pensées comme les plus inavouables qui peuplent ton esprit. Ton corps ne nous intéresse pas, pas plus que ton âme. »

Bien que m'étant attendue à une telle réponse, je ne peux m'empêcher d'être surprise devant tant de certitudes et d'affirmations. Comprenant que je n'ai pas le choix, je me résigne alors à coopérer, afin d'être libérée le plus rapidement possible.

« Très bien, que voulez vous que je vous dise ? »

« Commence par nous décrire tes doutes. Tous tes doutes. De quoi doutes-tu ? »

Cette fois, c'est avec un franc étonnement que j'accueille la question. Ainsi il va falloir que je fasse un travail de recherche à l'intérieur même de mon esprit pour répondre aux questions indiscrètes de consciences inconnues qui me tiennent prisonnière. Si j'avais tenté d'imaginer cela quelques minutes plus tôt, cela m'aurait paru absurde. Désormais, cela me paraît simplement extrêmement compliqué. Mais il me suffit de leur dire la vérité, et je serai libérée. En écho à mes impressions, la voix me dit :

« Prends ton temps, pour nous offrir la plus exacte des introspections. »

De quoi est-ce que je doute ? Quand est-ce que j'hésite avant de prendre une décision ? Cherchant dans mes souvenirs avec toute la concentration dont je suis capable, j'essaie de trouver des situations qui pourraient mettre mon jugement en échec, des impasses, des dilemmes. Je n'en trouve aucun. Presque aucun. Avant, oui, je doutais. Mais désormais ma vie est un chemin tout tracé qui ne laisse plus de place au doute. Dois-je être fière ou non de cette confiance ? La voix ne me laisse pas le temps de chercher la réponse.

« C'est justement là que nous voulions en venir. À quand remonte la dernière fois que tu as douté de toi, douté de ton choix ? »

Je tressaillis. Aucune hésitation à ce sujet. C'était à la fin de l'Avant. Quand, tentant d'ignorer qu'il était trop tard pour faire demi-tour, j'avais pris le plus grand virage que m'offraient les voies des possibles. Après avoir compris que j'avais probablement commis la plus grosse erreur de ma vie.


« Maintenant, réponds à ta question. Est-ce une qualité que de faire des choix sans jamais t'interroger outre mesure ? De ne jamais te poser de questions et avoir confiance en ton libre-arbitre ? »

Assurément, la réponse attendue est non. Il est indéniable que j'avais mis exagérément longtemps avant de reconnaître enfin que mon choix n'était pas le bon. Et si l'Après n'avait été bâti lui aussi que sur une suite de mauvais choix ? Non, c'est impossible. Je ne fais que le bien, qui pourrait me le reprocher ?

« Tu ne te poses pas la bonne question. La voilà : pourquoi fais-tu ça ? Pourquoi avoir choisi cette voie plutôt qu'une autre ? Aurais-tu des remords ? »

La voix m'a mis dans une situation extrêmement embarrassante. Reconnaître que je regrette encore aujourd'hui les conséquences de ma faute ? Pourtant, c'est bel et bien le cas. Je m'étais, à l'époque, sentie responsable d'une quantité incalculable de souffrances, et cible de tant de haine que la seule voie possible m'avait semblé être celle de la rédemption. Pour apaiser mon âme, comme peut-être pour racheter ma place dans un paradis qui ne voulait plus de moi.

« Ce n'est pas ce que je crois. C'est ce que tu tentes de te faire croire pour masquer une vérité bien moins glorieuse. Tu n'as pas pensé qu'une autre voie aurait été possible, car tu possèdes bien trop peu d'imagination pour les appréhender, car tu n'aurais pas eu le courage d'emprunter ces autres chemins seule, parce que tu as besoin d'être guidée, quels que soient tes beaux principes de liberté, et que c'était le plus facile des chemins, celui qui te demandait le moins d'efforts. N'ai-je pas raison, Riza ? »

En quelques secondes, cette voix m'a accusée de tellement de défauts que la tête me tourne. Une confiance aveugle. Un esprit borné. Un manque de courage certain. Un besoin de dépendre de quelqu'un qui me fixe un but, et de fausses illusions de liberté. Et pour finir, je suis accusée de choisir la facilité. Tout cela est faux. Absolument tout, et absolument faux.

Je sens la joie des consciences grandir en même temps que mon égarement. Pourquoi veulent-elles à ce point me mettre mal à l'aise ? Quel est leur intérêt dans le fait de me faire réfléchir sur mes propres défauts ?

Une confiance aveugle, c'est en partie vrai, je m'en rends compte maintenant. Quand je prends une décision, il est rare que je la remette en question. Cela ne m'est même arrivé qu'une fois. En revanche, cela m'a toujours poussé vers l'avant, car à trop douter on finit par ne plus rien oser. Lorsque je me suis rendu compte de mon erreur, je l'ai rectifiée, et je suis encore là pour y penser. Alors, certes, je vais sûrement devoir remettre en question des choses acquises, pour éviter de refaire de telles erreurs. Pour autant, il ne faut pas que je cesse d'agir !

Les voix sont attentives. Elles apprécient ce que je pense et m’incitent à continuer par une petite pointe de curiosité. La suite me fait mal à la tête, mal au cœur, mal à la fierté, mais tient enfin en respect cette lâcheté qui s’est emparée de moi depuis le début de l’Avant. Je continue donc.

J’ai toujours choisi la voie de la facilité. C’est un défaut que je ne peux pas nier, mais qui me semble des plus logiques. Après tout, je suis encore jeune et je n’ai certainement pas toute l’expérience nécessaire pour déceler les pièges. Alors, sans être inconsciente, lorsqu’une issue s’offre à moi, je n’y réfléchis pas à deux fois. Mais si c’était tout, ce serait bien trop facile. En effet, ces voies se sont parfois avérées être très peu fréquentables pour une jeune fille et m’ont incité à vieillir prématurément et de façon hétérogène. Toutes ces piques lancées par le destin m’ont marquée à jamais, et ont façonné une Riza telle que je ne me serais jamais imaginée quelques années plus tôt. Une Riza résignée, qui refuse de penser à elle-même et qui se ronge de remords.


Toutes mes démarches, depuis toujours, ont été guidées par la lâcheté. C’est pour cette raison que je n’ai jamais agi pour mon propre compte, que je n’ai jamais su me fixer de but, que j’ai toujours aveuglément obéi à un autre. Mon père, Lui, puis moi-même, me torturant l’esprit pour me forcer à rester au service des autres quoi qu’il m’en coûte. Tout cela est lâche.

Recroquevillée dans le noir, mes pensées se bloquent et des hoquets retentissent, perçant le silence. Des sanglots. Les consciences sont assouvies de repentir. Elles ont désormais un aspect caressant, qui calme peu à peu mon esprit à la dérive. Lorsqu’elles prennent la parole, je suis déjà presque à même de les comprendre.

« C’est bien, petite neko. La douleur que tu ressens est celle de tous tes défauts réunis. Mais heureusement pour toi, tu as également des qualités, et non des moindres. Laisse-nous en discuter avec toi. »

« Je vous en prie, faites cesser cette souffrance inutile, je me suis repentie. »

« C’est vrai, cependant tu n’as pas terminé ton épreuve. Tu dois encore reconnaître les qualités que tu possèdes. Réfléchis et cites-en une. »

Si absurde que ce jeu me paraisse, il me semble inutile d’essayer de le comprendre. La réalité dans laquelle je flotte est semblable à un rêve, bien que toutes les émotions que je ressens me suffisent à conclure que ce n’en est pas un. La douleur, surtout, celle qui m’empêche de respirer tant elle me tient prisonnière de son étau glacial.

À quoi bon avoir des qualités lorsqu’on est, comme moi, l’esclave de son destin ? Je me sens si fatiguée que je tente d’oublier ces présences intrusives et de vider mon esprit de toute pensée jusqu’à ce que vienne la délivrance. Car  je suis bel et bien toujours enfermée. Enfermée à l’intérieur de moi-même, enfermée dans un néant d’une noirceur infinie.

Soudain, une idée me traverse l’esprit. Un mot vagabond, venu de mon inconscient ou bien soufflé par l’une des voix, difficile de le savoir : « Loyauté ». Il sonne à mes oreilles comme le bruit d’une botte dans la boue. Peut-on réellement considérer comme une qualité cette loyauté qui m’a poussée à faire tant de choses méprisables ? C’est un point de vue. Certainement pas le mien. Et puis, après tout, j’ai fini par Le trahir… Non, décidément, les qualités, ce n’est pas mon fort.

« Abrégeons, Riza. Nous sommes impatients. Des qualités, et nous te libérerons. »

Cette fois, le ton est menaçant. Les consciences m’ont réveillée de force. Elles m’obligent à réfléchir, à penser à mon caractère. Je ne peux pas résister, cette pression spirituelle manipulatrice est trop forte pour moi.

La loyauté, oui, mais pas seulement. Surtout, et avant tout, la curiosité. Cette soif irrésistible de comprendre pourquoi les choses sont telles qu’elles sont, de savoir ce qui se trouve de l’autre côté du mur, et tous ces détails qui rendent chaque situation unique. C’est une caractéristique que j’ai toujours possédé. Déjà dans ma plus tendre enfance, je passais des heures à observer le ciel ou un animal, un fruit ou une machine, dans l’espoir de saisir son fonctionnement. Cela m’a été utile plus d’une fois, d’ailleurs, car ainsi j’apprends vite à utiliser de nouveaux objets, et je m’adapte facilement à des terrains variés.

Je suis également, même pour une neko, plutôt énergique. Lorsque j’en ressens le besoin, je sais déployer une force physique qui en a étonné plus d’un. Le tout reste de savoir utiliser cet atout à bon escient. Je n’ai jamais réellement travaillé cette puissance, mais la vie que j’ai menée m’a façonnée de cette manière. Je dois dire que je ne m’en plains pas, car cela peut s’avérer fort utile.

Soulagement. Enfin, les voix semblent rassasiées. Elles ont eu leur compte d’aveux et relâchent leur pression sur mon esprit. Sans un mot, elles commencent à se retirer, petit à petit, redevenant caresses. Je respire. Il me semble que cette sensation est la plus agréable que j’aie jamais ressentie. De l’air, enfin, qui entre dans mes poumons trop longtemps comprimés par le chagrin et la colère. Après tout, c’est vrai, j’ai des qualités. Il faudra que je me fasse une promesse, quand j’en aurai envie. Celle de plus réfléchir comme je viens de le faire, bien que cela m’ait été imposé. Cela a beau faire resurgir des souvenirs douloureux, on sort de cette expérience avec une détermination accrue, et de nouvelles armes pour faire face à l’adversité.

Je suis bientôt presque seule, dans ma tête. Seule subsiste une voix, celle qui m’a parlé. Elle veut une clé. Elle exige de moi une dernière chose qui me libérera définitivement de son emprise. Ma réaction instinctive suffit à me la faire trouver.

Cette conversation à sens unique m’a quelque peu perturbée, et de sentir toutes ces âmes se retirer sans avoir conclu de quelque manière que ce soit est pour moi presque décevant. Vain. J’aurais aimé…

La dernière voix se retire alors de mon esprit, puis me souffle à l’oreille, dans la langue des humains :

« Merci. »

Me laissant en paix avec moi-même, les petits êtres caressants se retirent définitivement. Mon désir de reconnaissance assouvi, j’ouvre à nouveau les yeux sur un néant qui me semble désormais moins effrayant.
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MessageSujet: Re: Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde   Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde EmptyMer 19 Juin 2013, 17:30

(Comme je ne sais pas si tu as vu ça, je prefère te prévenir: en fait on a revu le système de validation pour qu'il soit plus rapide, tu n'as donc pas à attendre de validation entre les salles, tu peux poster à la suite, nous ne validons plus qu'à la toute fin Smile )
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MessageSujet: Re: Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde   Riza Ashe, ou celle qui voulait savoir le monde EmptyJeu 20 Juin 2013, 23:34

Ah ? Dommage, c'était sympa et interactif, et ça permettait de recadrer, au cas où.. Je vais essayer de faire ma salle blanche, on verra bien ce que ça donne ! =)
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