___Grïmoldt, le nain___-Gnn…___Grïm se releva, ses petits yeux d’acier balayant l’espace autour de lui. La salle était rouge, ce même rouge qu’il haïssait car il lui rappelait ces bordels qu’il écumait lorsqu’il était encore jeune. Les murs de la pièce étaient nus, dénudé de tout artifice ou ornement inutile. Seul jaillissait de la pierre des reliefs de fresques et de sculptures taillées à même la roche. N’importe quel homme n’y aurait vu qu’une banale réorganisation de la surface vermeille, il n’y aurait vu que des formes émergeant de la paroi. Mais Grïm n’était pas humain, il était nain.
___Ces formes n’étaient autres que des bas reliefs, résultat du savoir faire de son peuple. Cette barbe là, ces petits yeux là et cette arcade là, habillée de deux épais sourcils roux : cela ne pouvait être que lui. Grïm était petit, il était nain parmi ses pairs, mais non frêle pour autant. Se petit bras musclé était couvert d’une lourde chemise de lin, elle-même protégée par le tout l’attirail de métal qu’il portait en permanence avec lui. Cela incluait une petite pioche, glissée dans sa botte qui recouvrait la totalité de sa courte jambe.
___-Nom d’une queue d’géant ! Mais c’moi n’est-ce pas ? Hein ?!___Son bras qui pendouillait jusque là le long de sa cuisse s’anima alors avec une vitesse incroyable. Et avec une expérience née de la pratique, il décapita d’un rapide coup de pioche son « lui miniature ». Lorsque la tête de la défunte sculpture heurta le sol, son arme avait déjà retrouvé sa place dans le confortable fourreau de cuir
___-N’est pas encore né celui qui pourra tailler le visage du grand Grïm, que ce soit dans de la merde ou du diamant ! Sors de ton trou que j’t’arrache ta p’tite bite, connard !___Il resta debout, stoïque comme un roc. Ses yeux roulant dans ses orbites comme deux pierres glacées sans prêté plus d’attention aux bas-reliefs ornant les murs de la pièce. Celle-ci ne devait pas être sans issue ; elle ne pouvait pas être sans issue ! Son ravisseur devait sûrement être là, quelque part à l’épier derrière ces murs de pierre rouge.
___-Oh oh ? Monsieur est timide ? Il veut peut-être que tonton Grïm vienne lui faire un câlin ?!___Sa silhouette trapue tournoya alors sur elle-même, animée d’une frénésie insoupçonnable pour un être dont la crinière rousse trônait à un mètre quarante du sol. Cette fois c’était une hache aussi grande que lui qui s’écrasa contre la fresque. Inscrivant une large plaie grenat dans la paroi.
___-Hein ?! C’est pas de la peinture ?! J’ai jamais vu de caillasse de cette couleur ! Ça doit être la roche de Satan… et j’y vais t’l’exorciser personnellement ! ___Sa lourde hache à double tranchant heurta lourdement le sol. Deux hachettes de lancer sifflaient tandis qu’il les faisait décrire d’incroyables moulinets dans le creux de ses mains. Le métal confronta la roche, marquant de manière indélébile chacun de ses passages. Après avoir foré son chemin sur au moins trois pieds dans le rocher, il comprit qu’il lui fallait sortir l’artillerie lourde. Celle dont le malin n’aurait jamais raison, celle qui était conçue pour ça. Alors, le nain, sortit une pioche, énorme, pouvant abattre un éléphant d’un coup, si grande et massive qu’il était surréel d’imaginer le petit personnage la cacher dans son dos en plus de tout l’arsenal déjà éparpillé dans la pièce.
___-Tiens, prends ça dans ta tronche, salopard, cracha-t-il entre deux attaques.___Le bonhomme continua, suant à frapper dans la pierre pour réparer le tort dont il était atteint. Malgré le temps et les distances, sa brutalité et sa fureur ne diminuèrent pas. Au contraire, on n’avait même l’impression que l’ardeur de la petite bête grandissait.
___Après plusieurs heures et une dizaine de tunnel rayonnant de la pièce, le nain s’accorda l’extrême honneur de souffler. Il passa son bras sur son maigre front, dégageant les épais cheveux roux qui s’étaient aventuré sur cette surface ridée.
___-Quel enculé d’attardé mental ? Quelle barbe mal rasée ? Quel faux frère a osé m’enfermer ? Pesta le nain avant d’orner le sol d’un énorme crachat.
___Oui, pou Grïm, il ne pouvait s’agir que de l’un de ses pairs, aucune autre race n’était apte à tailler une pièce de la sorte. Les hommes s’étaient attribué bien des mérites, comme le savoir faire du fer et l’expertise du brasseur, mais il en était un qu’il n’avait toujours pas réussi à usurpé, tailler, creuser et forer, ça ils ne le feront jamais aussi bien que les nains ; Grïm en était convaincu. De nouveau sur pied, le nain recommença son dur labeur vindicatif, sans pour autant oublier de troquer sa pioche déjà grande contre un autre, plus massive encore.
___La confrontation avec son camarade, désormait ennemi, n’était de loin pas finie. Ses traits, en grande partie masqué par son abondante pilosité faciale se creusèrent à nouveau, encore une fois gorgé de rage.
___-J’te choperai, salaud !___Il s’élança contre une partie du mur encore intact et commença le violent martèlement dont avait fait les victimes les autres fresques. Après quelque minute de ce terrible traitement, la roche laissa sourdre un petit filet d’eau. Le nain hésita : il n’aimait pas l’eau, mais il aimait encore moins celui qui lui avait joué cette farce. Il continua et suivit le filet d’eau qui ne grossissait manifestement pas jusqu’à plonger définitivement dans l’épaisse obscurité qu’il affectionnait tant, celle des tunnels et des mines.
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