Aïklando
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"Homme libre, toujours tu chériras la mer !"
"La mer enseigne aux marins des rêves que les ports assassinent."
"La sagesse, c'est d'avoir des rêves suffisamment grands pour ne pas les perdre de vue lorsqu'on les poursuit."
"Il est des moments où les rêves les plus fous semblent réalisables à condition d'oser les tenter."
"Le voyage est une suite de disparitions irréparables."
"Nous sommes de l'étoffe dont sont faits les rêves, et notre petite vie est entourée de sommeil."
"Dieu nous rêve. S'il s'éveille, nous disparaissons à jamais."
"Nous trouverons un chemin... ou nous en créerons un."
"Le rêve de l'homme est semblable aux illusions de la mer."
"Il n’est pas de vent favorable, pour celui qui ne sait pas où il va…"
"Il y a trois sortes d'hommes : les Vivants, les Morts, et ceux qui vont sur la Mer."
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 Nos Retrouvailles [Balsa]

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Nazj
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MessageSujet: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyMer 01 Fév 2012, 00:10

L'heure était venue. Après des mois de recherches fastidieuses et dangereuses, et de rencontres étranges, tout était prêt, il ne manquait plus qu'un voyage…et quelques murmures. Nazj se tenait assis sur un rocher, en contemplant le soleil se fondant dans l'océan dans une lueur flamboyante…c'était beau, on ne pouvait dire le contraire, même Nazj appréciait les jolies choses qu'offrait la nature, il était dommage que des choses y vivent cependant. Et quelle était la seule chose qui pouvait rendre ce moment plus agréable encore ? Un bon repas, certainement, et c'est pourquoi Nazj était en train de manger un fromage accompagné de viande séchée. Il avait le temps, il ignorait totalement quand son "rendez-vous" arriverait, cela faisait plusieurs jours qu'il était là à attendre, et il ignorait même si celle qu'il attendait savait où elle allait…c'était amusant d'y penser. Cependant, il appréhendait un peu cette rencontre ; il attendait Balsa, l'étrange créature qu'il avait, en quelque sorte, pris sous son aile. Il avait murmuré de nombreuses fois dans la nuit, ces derniers jours, appelant à lui la chimère. Mais il ne savait à quoi s'attendre, car cela faisait longtemps qu'il l'avait laissée disparaître dans la nature, plusieurs mois peut-être, il n'avait pas vraiment compté, il avait été très occupé. Qu'allait-il trouver une fois qu'elle serait arrivée ? Une créature docile et obéissant au moindre de ses ordre ? Ou une bête recherchant à recouvrer sa liberté et prête à tuer pour l'avoir ? Un peu des deux serait la bienvenue, en réalité, quelqu'un de totalement dévoué à une cause est d'un ennui mortel…Quoi qu'il en soit, Nazj était venu tout prêt.

Alors que le sorcier était en train de manger son fromage en toute tranquillité, tout en contemplant le soleil et l'océan, deux gardiens silencieux attendaient derrière lui, observant les alentours. Ils étaient enveloppés dans des manteaux sombres et rapiécés, mais leur tête était découverte…et ce que l'on pouvait voir aurait soulevé le cœur de n'importe qui : l'un d'eux avait le visage verdâtre, dévoré par les vers et plein d'œufs de mouches, dégoulinait d'ichor puant, et aux orbites vides ; l'autre n'avait plus qu'une peau parcheminée sur ses os, ses longs cheveux gris et sales étaient plein de vermines, ses yeux exorbités scrutaient l'horizon sans relâche, et de sa mâchoire à laquelle il manquait la partie inférieure pendait une énorme langue rouge. Ces deux "comparses", le Seigneur Nazj les avaient trouvés dans la forêt non loin, au fond d'un fossé. L'un semblait avoir été tué bien avant l'autre, Nazj les avaient sans doute tiré de la cachette d'un assassin, qui allait sans aucun doute mourir de peur quand il verra que les cadavres se sont enfuis, ça aussi c'était amusant rien que d'y penser.

Tous trois attendaient ainsi depuis l'aube, et déjà le soleil avait disparu, et l'obscurité s'installait, et allait bientôt devenir totale. Nazj soupira, et se dit qu'il allait devoir attendre un jour de plus, lorsque, derrière lui, le cadavre sans bouche émit un long râle, et l'autre sans yeux dit un seul mot dans une voix gutturale : "Maître". Cela ne voulait pas dire grand-chose, mais néanmoins, Nazj comprit, et il sourit cruellement. Il se leva, et se rendit soudainement compte que s'assoir sur un rocher toute une journée a des conséquences désastreuses pour le fessier, mais il ne s'attarda pas sur le problème.

"Messieurs, guidez la je vous prie."

Et sans même se retourner pour vérifier que les deux morts-vivants ne s'étaient pas trompés, Nazj descendit jusqu'à la plage qui s'étendait en contrebas, en chantonnant une petite comptine…Puis, arrivé sur le sable au bord de l'océan, il sortit un gros sac de sel de sa manche, et commença à en répandre sur le sol en sifflotant, dessinant quelque chose…il suffisait à présent d'attendre.

Et il espérait qu'elle n'allait pas se montrer sauvage ! Cela serait très ingrat de sa part, après tout ce que le sorcier avait fait pour elle, n'avait-elle pas été épargnée ? Et il lui avait offert un anneau enchanté, cela devait compter pour quelque chose. Il avait besoin de cette jeune fille, son travail ne pouvait s'accomplit seul, et il n'avait pas vraiment envie de perdre son temps à trouver une autre âme à damner…Et qu'allait-il faire si elle se montrait hostile, l'enchaîner ? Nuls doutes que le voyage serait alors fort désagréable, et c'était un très, très long voyage qui les attendait…la tuer ? Grand Dieux non, un cadavre pouvait être utile en certaines situation, mais ce qu'ils allaient entreprendre nécessitait toute la subtilité d'un esprit bien vivant. Il faudrait donc la convaincre de nouveau, mais Nazj se dit qu'il se faisait sans doute du souci pour rien, ils s'étaient quittés en fort bon termes, ou tout du moins c'était ce qu'il semblait sorcier, dont les compétences sociales n'étaient pas très développées…mais les promesses faite à la chimère avaient enflammés les yeux de cette dernière, il s'en souvenait à présent, elle était désireuse d'apprendre, elle s'en souvenait certainement, et le sourire de Nazj s'élargit tandis qu'il entendait quelqu'un approcher.
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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyJeu 02 Fév 2012, 00:53

Un bruit dans la forêt

La peau d’ours passée sur le dos de la chimère effleurait à peine l’écorce du sapin centenaire derrière lequel elle s’était dissimulée. Son souffle chaud cotonnait dans la morsure du froid. Les flocons, lourds et épars, tombaient sans cesse depuis deux jours. Mais ce n’étaient pas les premières neiges, qui étaient tombées près de deux lunes avant ce soir. Et celles-ci avaient déjà recouvert jusqu’aux plaines de la ceinture. L’hiver battait son plein, avec ses nuits glaciales, ses vents implacables et son obscurité. Les jours étaient courts et le ciel chargé de nuages.

Le chemin sur lequel allait arriver Balsa, avant de se glisser derrière le sapin, serpentait entre les arbres. Il tentait de s’accommoder du terrain accidenté pour rejoindre le village. Rejoindre son village. Un bien grand mot peut-être pour un désert de ruines, maisons abandonnées et odeurs de mort, mais son village. Elle y avait de quoi s’abriter, se chauffer, et dormir bien plus confortablement qu’au cœur des tempêtes. Elle l’avait trouvé au début de l’hiver et comptait bien le garder jusqu’à la fin. Après, à l’Apaisement, elle pourrait le leur laisser, à ces bucherons audacieux qui tenteraient une nouvelle fois de s’installer ici. Ce qu’elle redoutait, c’était la venue d’un Géant d’ici là. Ils n’étaient pas loin, elle les avait sentit…. Elle espérait pourtant tout autant qu’elle craignait la rencontre avec l’un de ces titans. Elle voulait voir. Si possible sans être vue, au moins d’abord. Puis pourquoi ne pas échanger, si elle se pensait en situation de force. Et enfin, affronter ? Là, le doute subsistait, elle voulait attendre de voir.

Mais le bruit qu’il lui avait semblé entendre ne provenait surement pas de l’un d’entre eux. Beaucoup trop feutré, discret. Comme cela faisait un moment que ce bruit l’avait figée et qu’il avait maintenant disparut, elle décida d’aller voir. La neige du chemin, balayée par le vent qui se faufilait dans la brèche ouverte sur la forêt, offrait un terrain de pistage fantastique. Elle imprimait chaque trace, et la proie la maudissait d’offrir aux prédateur un tel avantage. Le prédateur lui, s’il était malin, pouvait deviner l’âge des empreintes, à l’épaisseur de la couche de neige en train de tomber. L’hiver, le chasseur est roi… Elle marcha délicatement, étouffant ses pas dans le blanc, jusqu’au centre du chemin. Et alors son sourire tomba en perplexité. Devant elle se déroulait la marque d’une paire de botte, marchant en direction du village.

- Il est seul…

Fort-du-col était à trois jours de marche. Qu’un cavalier ait tenté de rallier le village dans la journée se tenait. Qu’un marcheur se lance sur la route, beaucoup moins. A moins qu’il soit perdu… A l’écart entre les foulées, on voyait bien que le marcheur ne se pressait pas vraiment. Blessé peut-être. Ou alors sûr de lui… Les sourcils de Balsa se froncèrent. Se promener seul par ici demandait au moins autant d’audace et d’assurance qu’elle en avait. Sa curiosité s’éveilla : elle voulait savoir qui. Qui pouvait bien se diriger sur son royaume ? Elle commença à suivre les pas, sous la pluie blanche qui les recouvraient. L’individu était passé très récemment, probablement à l’origine du bruit, branche cassée sous le pied, qui avait suspendu le temps de la chimère. Il n’était pas bien loin devant donc. En courant elle le rattraperait sans s’essouffler. Mais si elle courait à s’essouffler, elle pouvait faire mieux.

Debout au milieu du chemin, Balsa s’arrêta. A main gauche, la pente coulait jusqu’au val. A main droite les ronces dansaient entre les troncs gelés. Le village était sur l’autre versant de la colline. En passant à travers bois, par le sommet, et en courant, elle y serait avant lui. Si elle partait maintenant. Alors elle se lança. Retournant là d’où elle venait, sous le couvert des sapins, elle se mit à courir.

Le froid saisit la peau nue de son visage. Les doigts de sa main droite accrochaient à son cou la fourrure sombre qui lui tenait chaud. Pour le reste, elle avait des bottes en daim doublées, une robe de lin et une veste longue en laine épaisse. Le couteau de chasse à sa ceinture était son seul allié. Pas de lance derrière laquelle se protéger. Pas d’anneau derrière lequel se masquer. Pas d’amulette à porter. Elle était libre, ou presque. L’ombre planait sur son village, l’atmosphère y était lourde et le silence glauque. Elle savait pourquoi, tout en refusant de l’admettre…

S’abandonnant à sa course elle accéléra le temps et atterrit sur le seuil de sa maison. Ses poumons essoufflés lacéraient son cœur de glaçons. L’air gelé à l’extérieur brûlait à l’intérieur. Apaisant sa respiration, elle s’assit sur le seuil et regarda vers le chemin d’où il arriverait. Bientôt normalement. Sa curiosité pointait. Son cœur battait vite et sa course en était moins responsable que son impatience. Derrière la volée de flocons qui troublait sa vue au loin, elle attendait qu’une forme se dessine. Une ombre se découpa des arbres environnant. Le crépuscule, couchant l’astre à l’ouest juste devant, n’aidait en rien à la perception des formes et des couleurs. Mais l’individu approcha, d’un pas lent et machinal. Il portait une armure guerrière et elle se demanda quel chasseur de géant pouvait bien être assez stupide pour voyager seul et sans cheval ici. La chimère remarqua, alors qu’il approchait, son allure blessée. Il boitait à gauche et avançait très péniblement. Il devait la voir à présent, mais il n’appela pas à l’aide, marchant inlassablement vers elle. Pour pacifiques, ses intentions n’en étaient pas moins inexplicables. Elle se leva et se dirigea à sa rencontre.

Elle l’approchait plus vite qu’il ne venait à elle, à bout de patience, et cherchait à présent le dessin de ses traits. Des cheveux longs et une barbe, noirs comme la nuit, dans le plus grand désordre. Il vient de se battre ?... La mort fit frémir les narines de la chimère. Elle connaissait parfaitement ce parfum. Une plaie béait sur la jambe gauche de l’homme. Mais le sang ne coulait pas sur la chaire putréfiée. Dans l’ombre du casque rouillé qu’il portait, ses orbites se révélèrent vides. Balsa s’arrêta net, ce qui ne perturba en rien la marche de l’autre. A quelques pieds d’elle, il s'interrompit et planta ses yeux aveugles dans ceux de la chimère. Il avait le crâne barré d’une cicatrice suivant l’arrête de son nez. Alors son visage s’ouvrit sur cette plaie, accouchant d’un œil immense et aussi rouge que le sang sur la neige. En son centre un petit losange noir apparut et la pupille tressauta quelques secondes avant de se planter sur Balsa. Le cœur de la chimère cessa de battre et elle mourut.

Son réveil fut brutal. Elle arracha les couvertures d’une main et de l’autre tenta de saisir le zombie devant elle. Ses doigts se refermèrent sur le vide et ses yeux découvrirent le décor : les pierres de l'intérieur de sa maison. Son regard glissa sur la porte fermée, sa lance, les braises du feu et enfin… L’amulette, dans le coin de la pièce, aux orbites creuses tournées vers elle. Son estomac se noua. Elle avait enterré le crâne au début de l’hiver, à l’endroit même où il se trouvait. Elle regarda de nouveau la porte et tendit l’oreille. N’entendant rien, elle attrapa sa lance et ouvrit le battant à la volée, pointant l’arme vers l’extérieur. Non de… Elle jeta un coup d’œil plein de haine à l’amulette puis contempla la paire de bottes qu’avait imprimée la neige fraîche. Ces pas partaient de chez elle, mais nulle trace de ceux qui y venaient. Et elle connaissait ces empreintes, pour les avoir examinées en cauchemar.

Elle observa le ciel : la neige tombait doucement et il ferait bientôt jour. Il était temps pour elle de partir. Où ? Elle n’en savait rien. Mais elle avait le sentiment que suivre ces pas la mettrait sur la route. Elle enfila sa veste la plus chaude et passa sa ceinture. Elle y noua le fourreau de son couteau d’un côté et de l’autre elle enchaîna d’une petite maille l’anneau et l’amulette. Ses yeux restèrent rivé sur sa lance un long moment au bout duquel elle eut un petit rire et décida d’abandonner là son arme. Jetant sur son dos la peau de bête pendue à l’entrée, elle partit.


Les traces de pas s’estompèrent sous la neige, mais Balsa continua. Elle dévala la ceinture jusqu’aux plaines en vivant de rapine et des maigres fruits de la nature. C’était tantôt un murmure tantôt un cri qui la guidait, toujours plus bas. Une fois, elle marcha vers le hurlement lugubre d’un loup solitaire, une autre elle traversa une forêt en compagnie d'un corbeau au regard insistant. Quand elle se trouva face à l’immense lac, elle suivit le fumet d’une charogne fraichement tuée pour en entamer le contournement. Ce fut à regret qu’elle quitta Olia gelé pour poursuivre vers le sud. La neige recouvrait tout, mince mais tenace. Et tombait presque tous les jours. Le temps s’adoucissait mais l’hiver battait toujours son plein.

Une demi-lune s’écoula, pendant laquelle Balsa eut tout le temps de s’interroger sur sa destination et sur ce qu’elle allait devoir faire pour Nazj. Mais ces pensées se tournaient plutôt sur ce qu’elle allait lui dire. Elle avait pour lui mille questions et autant d’attentes. Il lui avait parut extrêmement dangereux et elle voulait savoir à quel point. Elle jalousait sa force et craignait sa colère. Il lui faudrait jouer de tact sans doute et d’une grande méfiance pour approcher son esprit. Et elle n’aurait que peu de temps, car il n’allait pas s’encombrer d’elle une fois la tâche exécutée.


L’embrun marin la saisit alors qu’elle passait une colline de roches sombres sur lit de blanc. Elle avait donc progressé si loin ? La fierté l’emplit et avec elle son courage grimpa en flèche. L’océan était tout proche, comme Nazj qu’elle n’imaginait pas par delà les eaux. Elle pensait que si elle avait du infiltrer un bateau, les signes l’auraient conduite à Reilor. Alors qu’ils l’avaient conduite ici, magnifique désolation de plage, plus loin qu’aucune voix de loup ne pouvait porter de toute présence humaine.

La lune glissait entre des nuages qui répandaient ça et là de gros flocons. Quand elle apparut, sublimant l’océan de ses reflets, Balsa trouva un sourire apaisé. Qui retomba à la vue de deux silhouettes se découpant sur les lumières de la nuit. Elle comprit rapidement qu’ils s’agissaient de pantins du seigneur Nazj. Celui à qui il restait une mâchoire inférieure grommela un mot inintelligible avant de se diriger vers la gauche. Elle examina les deux morts vivants et les suivit, un sourire de délice s’affichant sur ses lèvres. Car elle venait enfin de trouver quoi dire à Nazj.

Toutes les formules imaginables n’avaient cessé de tournoyer dans son esprit, aucune ne trouvant de réel sens. Du simple « bonsoir » au « maître » dominé. Du « où va-t-on ? » naïf au « merci pour l’anneau, maintenant je veux plus » trop direct, rien ne convenait. Rien à part cette trouvaille du dernier instant, inspirée par ces cadavres cauchemardesques. Un dernier sourire à entendre le mage siffloter et elle s’efforça d’afficher un air plus neutre. Il ne faudrait pas ciller à la vue de ce squelette ambulant, pâleur maladive d’un âge improbable. N’ayant plus besoin de sa lente escorte, elle la dépassa pour arriver seule face au sorcier. Celui-ci se tenait debout sur le sable, lui faisant face. Quand elle fut suffisamment proche pour voir les traits de son maître, elle s’arrêta et jeta un coup d’œil en arrière, vers les cadavres au pas trainant. Quand elle en revint à Nazj, un petit sourire s’était faufilé sur ses lèvres à son propre insu.

- Quand ces deux là vous seront plus utiles, laissez-moi les renvoyer d’où ils viennent.

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Nazj
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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyJeu 02 Fév 2012, 04:27

La voila qui arrivait…Déterminée, mieux que ce à quoi il s'attendait, en vérité; la tête haute mais pas menaçante, sans courbette à l'horizon, il n'eut pas droit à une génuflexion, ce qui ne put que lui plaire…quoi qu'il aurait certainement souri si elle avait plié le genou, tout le monde a un égo à entretenir, même le Seigneur Nazj. Elle affichait un sourire que le sorcier trouva confiant, elle n'était certainement pas soumise, cela aurait été d'un terrible ennui, elle était docile cela dit, c'était tout ce qu'il demandait…Et les premiers mots qu'elle prononça lui plurent beaucoup. Pas de banalités, laissons-les aux gens banals, quel mal y avait-il à aller directement au cœur de ce qui était intéressant ? Toutes les fioritures que les vivants s'amusaient à mettre avaient le don d'hérisser le poil de Nazj, et visiblement, quand lui parlait, cela ne plaisait à personne, aussi, quand il était en société –ce qui était arrivé !- il préférait garder le silence, jusqu'au moment où il entendait une trop grosse énormité et qu'il se sente obligé d'user de sarcasme…ce qui avait souvent le dont de rendre muet ceux qui l'entendaient, et tout particulièrement ceux à qui la remarque était adressée…Ah, mais le temps des bals et des réceptions à la cour était terminé, il avait abandonné tout ça dans l'agonie et les flammes, il s'en souvenait à présent, et avec délice. Il n'avait pu que rire, quelle autre réaction aurait pu être appropriée, quand il avait devant lui une cour pédante pliant le genou devant une meute de roturiers crasseux qui étaient enragés et déterminés à leur trancher la gorge ? Aucune, sinon l'hilarité, d'autant plus que c'était lui qui avait provoqué la colère du peuple, d'une certaine façon…c'était il y a plus de vingt ans, oui, et le sourire lui venait toujours…

Mais il n'allait pas sombrer dans ses souvenirs comme n'importe quel vieillard gâteux ! Il fallait qu'il dise quelque chose, lui aussi, il était poli tout de même, envers ceux qui le méritaient. La requête était singulière, il devait l'admettre, elle ne manquait pas d'un certain culot, peut-être n'avait elle plus aussi peur de lui ? Cette pensée le chagrina un peu, la terreur qu'il inspirait au peuple était une de ses fiertés, et ceux qui n'en ressentaient aucune étaient en général stupides au-delà de toute mesure, mais soit, qu'elle parvienne à surmonter la peur n'était pas un mauvaise signe, à son sens, car elle au moins savait qui il était et de quoi il était capable. Il se concentra à nouveau sur la "requête" –non sans se dire au passage que les digressions de son esprit se faisaient de plus en plus graves- et ne put que sourire à nouveau.


"Puisque vous êtes à présent parmi nous, je suppose qu'il n'y a plus rien à tirer d'eux, ils feraient de bien piètres compagnons de voyages, odorants et incapables de distinguer la proue de la poupe d'un navire. Ils n'ont jamais été "utiles" en vérité, j'aurais très bien pu scruter l'horizon moi-même, ils ne sont qu'une aide. Ils sont tout à vous…mais discutons avant que vous ne commenciez à fracasser des crânes, nous avons plusieurs choses à nous dire je pense, et vous pourrez vous en débarrasser quand nous monterons à bord. De plus, si un imbécile nous espionne, les yeux de l'un pourront le repérer tandis que la bouche de l'autre nous en avertira, on n'est jamais trop prudent."

Il fit signe à la chimère de le suivre, et il s'avança vers l'océan, en prenant soin de ne pas marcher sur le dessin de sel qu'il avait fait sur le sable. Il s'arrêta devant les vagues, un pouce à peine séparait ses pieds de l'eau. Il trouvait le vent frais et la bruine plutôt vivifiant…il était né au bord d'une falaise après tout, il devait avoir ça dans le sang, il ne s'était jamais attardé sur le problème. Il prit plusieurs longues gorgées d'air frais et salé, avant de reprendre.

"Dites-moi ma chère, comment avance la maîtrise de votre pouvoir ? Je n'ai pas oublié que c'était un trait…particulier chez vous, l'anneau que je vous ai offert a-t-il été d'une quelconque utilité ? Maîtrisez-vous un peu plus la force qui coule en vous ? Vous êtes vous ouverte aux arcanes de la magie ?"

Aussi surprenant que cela puisse paraître, cela intéressait vraiment Nazj, pour plusieurs raisons. Si la chimère arrivait à maîtriser la foudre, cela pourrait être d'une aide capitale dans ses recherches, et un instrument de destruction majeur, oh oui…et il elle s'était ouverte à la magie, c'était encore mieux, car elle pouvait apprendre, et Nazj pouvait lui apprendre beaucoup…La caste des nécromanciens souffrait d'une tare majeure : ils étaient peu, très, très peu, et leur nombre continuait de s'amoindrir, ceux qui tentaient d'apprendre seul mourraient bien vite de leur propre fait, sauf certains cas, des gens plus forts que les autres, comme Nazj l'avait été…il devenait vite évident que prendre quelqu'un comme disciple était d'une importance capitale, car même si Nazj allait certainement vivre bien plus longtemps que la majorité des humains -on ne jouait pas avec la Mort sans en tirer certains avantages- mais tôt ou tard, il allait rejoindre la tombe, car rien n'est éternel. Balsa, même à son âge et sans prédisposition pour cette magie en particulier, était un candidat à considérer…ce voyage allait sans doute être un moyen de le déterminer.
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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyJeu 02 Fév 2012, 20:07

Un sourire vint à son maître et se mut en mots qui formèrent la réponse à la requête de Balsa. Il acceptait. Mais surtout, il comprenait et semblait trouver cela… naturel. La chimère aurait presque eut le temps de s’en émouvoir, mais le nécromancien continua, faisant preuve d’une éloquence qu’elle était loin de maitriser. Elle eut juste le temps de froncer les sourcils à entendre parler de proue, de poupe, et de monter à bord, que son seigneur déjà lui indiquait de la suivre et se déplaçait vers l’océan. Elle lui emboita le pas sans hésiter.

Pour l’instant, elle gardait pour elle ses interrogations. Elle aurait tout le temps du trajet pour les formuler et ils se mettaient juste en route. Le fait que le mage n’ai pas l’air pressé le moins du monde rassurait Balsa. Si lui n’avait pas peur, elle n’avait aucune raison de s’inquiéter. Surtout qu’ils étaient assurés d’être avertis à la moindre approche par les cadavres ressuscités. S’en faire encadrer devait grandement faciliter la vie du mage. Les premiers pas de la chimère prirent le soin de contourner le dessin qu’elle examina rapidement. Sans rien y comprendre. Son maître l’avait préparé avant qu’elle arrive, mais pourquoi ? Etait-ce ça, la magie qui avait invoqué les morts ? Sous ses pieds le sable humide était trop chaud pour que la neige accroche. La poudre disparaissait en tombant jusqu’aux pieds des roches des premières collines. L’océan portait avec lui la chaleur du sud et sa surface ne portait aucune glace. Les vagues se levaient et venaient s’écraser sur la plage avec un rythme régulier. La marée basse sans doute, car elles étaient plutôt calmes.

Nazj s’arrêta juste avant que son pied n’effleure l’écume blanche balayant le sable devant lui. Et il reprit la parole, instant où la chimère réalisa qu’elle n’avait pas prononcé un mot depuis sa phrase d’introduction. Il lui avait semblé après la réponse du nécromancien qu’il n’y avait rien à ajouter, tout simplement. Il reprit donc la parole et s’intéressa directement au pouvoir de Balsa. Il enchaina les questions rapidement, sans lui laisser le temps de répondre à aucune et acheva de la perdre avec un terme qui l’assomma : « arcanes de la magie ». Le dessin sur le sable, c’était une arcane de la magie ? D’accord, elle avait déjà entendu ce terme, de la gueule de Akin. Mais c’était si rare et, l’anubite ne s’y attardant jamais, elle n’avait aucune idée de ce que cela signifiait réellement. Décidant de répondre en premier lieu à ce qu’elle pouvait, sa main glissa machinalement sous la fourrure, jusqu’à ce que ces doigts effleurent l’anneau et l’amulette à sa ceinture. Ils étaient toujours là.

- L’anneau fonctionne très bien, et il est très utile, oui. Mais je m’en sers le moins possible. J’entraîne ma foudre… – son vocabulaire à ce sujet lui était propre, elle se doutait bien qu’il était flou et incorrect, alors elle se reprit – Je m’entraîne souvent. Je cherche à la rendre plus forte, ou juste assez violente pour paralyser sans tuer. Sur les animaux j’y arrive assez bien. Et j’aimerais voir l’effet sur vos cadavres.

Ses yeux avaient quitté l’océan sur sa dernière phrase pour aller chercher le regard du mage à quelques pas sur le côté. Cette vision avait quelque chose d’improbable. Lui, le grand sorcier incarnant le Mal, face à la pureté de la nature. Voyait-il la beauté ? L’appréciait-il ? Après sa longue vie, s’émouvait-il encore de ce genre de spectacle ? Balsa, elle, revoyait un océan quitté de longs mois avant. Sa relation avec lui était houleuse, car le monstre d’eau avait brisé le bateau censé la conduire sur Ghurol. Ce fut son premier voyage en mer et il avait bien faillit être le dernier. Elle chassa cette pensée et ses doigts lâchèrent la petite chainette avec laquelle ils jouaient pour se faufiler au plus chaud sous la fourrure animale.

- C’est sans doute mieux que s’entraîner sur des vivants, non ? Enfin… Pour les « arcanes de la magie » j’ai aucune idée de ce que c’est. Donc non… Mais j’aimerais bien savoir.

Sans oser demander, elle espérait qu’il le lui expliquerait. Elle savait infinie la quantité de chose qu’elle pourrait apprendre de lui. Simplement réveiller des cadavres, pour qui elle trouverait foule d’utilités, ou faire apparaître une pièce. Etre capable d’un bout à l’autre du continent d’appeler son serviteur ou de faire taire la magie d’un être par un simple bout de métal. Elle ne savait pas si elle serait jamais capable de réaliser l’une de ces prouesses, mais elle voulait savoir comment s’était possible. Et essayer, au moins, voir si la nature l’avait doté de ce don. Toutes les races étaient-elles égales devant la magie ? Akin disait que non, mais Akin craignait la magie. Qu’en penserait Nazj ? Elle voulait aussi connaître les points faibles de ces sortilèges pour se protéger de ceux, si rares puissent-ils être, qui l’utiliserait contre elle. Mais là, que Nazj lui confit de tels secrets nécessitait entre eux une confiance qu’elle avait du mal à s’imaginer.

Une nouvelle vague vint s’abattre sur le continent, charriant avec elle quelques algues et un crachin au gout salé. L’odeur de la mer fit frémir les narines de la chimère alors qu’elle examinait l’horizon. Dire qu’il lui fallait franchir cet obstacle à nouveau… Mais au fait, pour où ? Et puis…

- J’ai cru comprendre qu’on allait prendre un bateau. Je pensais que dans ce cas je vous aurais retrouvé sur un port… En fait, pourquoi avez-vous besoin de moi ?

Sa patience avait cédé à la curiosité. Il faudrait bien qu’elle l’apprenne de toute façon, et le plus tôt serait le mieux si elle voulait être prête. Car pour l’instant, tout ce qu’elle voyait était elle et le sorcier, quelque part sur la côte, loin de tout. Le sens de ce rendez-vous lui échappait.

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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyVen 03 Fév 2012, 03:03

L'air pur, frais et salé le revigorait, et le vent froid faisait voleter les pans de sa robe…c'était plaisant, en vérité, il savait qu'il pouvait rester là des heures sans bouger, à sombrer dans ses pensées, à s'y noyer presque…mais il ne pouvait pas faire une telle chose, il avait du travail, beaucoup de travail, et quand il ne resterait plus rien à faire, alors peut-être pourrait-il s'arrêter et ne plus aller nulle part, attendant la Mort…Il secoua légèrement la tête, et fut surpris d'avoir émis de telles pensées…lui, mourir ? Oh ce n'était pas pour tout de suite ! Certes, toute choses avait une fin et il allait un jour rejoindre les bras froids et doux de cette Dame qui accueillait tous ceux qui trépassaient, mais sa fin a lui n'allait pas venir avant très, très longtemps, pas avant qu'il ne soit la dernière chose vivante sur l'Archipel. Il reporta son attention sur la chimère, soudain conscient qu'elle était en train de dire quelque chose…fort heureusement, il revint à la réalité suffisamment tôt pour comprendre de quoi il était question : l'anneau, et le pouvoir de Balsa. Et cela le fit sourire, il trouva cela amusant : Nazj se souvenait de leur première rencontre, là où Balsa avait, à mains nues, vaincu un spectre de la faim ! Et la voila qui disait essayer de rendre son pouvoir juste assez puissant pour ne pas tuer ! Surprenant, ne tuait-elle donc que lorsque sa vie était en danger ? Par instinct de survie ? Etrange, lui avait tendance à penser que la survie était en jeu à chaque instant, mais soit, elle allait apprendre, une fois qu'elle maîtriserait la puissance, elle n'allait pouvoir résister au plaisir que procurait le fait de le déchaîner, et du pouvoir que la puissance procurait.

Il ne lui en dit rien, bien entendu, ce genre de choses venait par soi-même, inutile d'essayer de forcer la corruption alors que c'était une chose à laquelle les mortels succombaient si facilement tout seuls. Il garda le silence, n'ayant aucun commentaire pertinent à faire, et elle continua de parler…Les arcanes de la magie, ah ! Voila un sujet délicat, et des plus intéressants, certainement...il prit le temps de réfléchir, pour tenter de trouver la meilleure façon d'expliquer à la chimère de quoi il s'agissait. Une réponse claire et concise n'existait pas, mais un début d'explication serait sans doute fort apprécié, et ils pourraient continuer la "leçon" un peu plus tard, durant le voyage…voyage énigmatique s'il en était ! La question qu'il attendait vint enfin, et il en fut tout sourire. Il se frotta les mains, sans avoir de véritable raison, il ne sentait pas le froid, puis il fit volte-face, se dirigeant à nouveau vers le dessin de sel.

"J'espérais que vous poseriez ces questions, et je suis ravi d'entendre que les arcanes de la magie vous intéressent…Les arcanes de la magie sont les secrets que le pouvoir renferme ! Avec un peu d'entraînement et de talent, n'importe qui peut tordre une flamme à sa guise, faire bouillir de l'eau sans feu, faire léviter les pierres, c'est là le pouvoir élémentaire –dans le sens de basique, et non pas relatif aux éléments-, que toute âme peut maîtriser sans trop de mal, à condition de ne pas être trop stupide…c'est aussi la raison pour laquelle certaines personnes naissent avec ce genre de dons, c'est une force naturelle, comme le vent. Mais les arcanes de la magie sont tout autres choses…ce sont les incantations, les runes et les glyphes, ce sont les profondeurs de la magie, et tout le monde ne peut pas les atteindre, certains sont tout simplement physiquement incapables d'y accéder, car il est vrai que c'est éprouvant, d'autres subissent un blocage mental, car ils ne sont pas capables de concevoir certaines choses…par exemple, essayez de visualiser l'univers, avec des frontières, une fin…et à présent, essayez de visualiser ce qu'il y a au-delà de ces frontières ! Vous voyez ? L'esprit mortel n'est pas capable de concevoir de telles choses, c'est le genre de blocage que subissent certaines personnes quand il s'agit des arcanes de la magie. Cela ne touche pas uniquement à la magie noire, oh que non, la puissance élémentaire –et là, je parle de ce qui est relatif aux éléments- possède ses propres arcanes, qui peuvent être d'une puissance terrifiante…Comprenez-vous ? Nous en parlerons plus durant notre voyages, vous aurez certainement des centaines de questions une fois que vous y aurez réfléchi…bien, à présent, le voyage."

Il sourit, presque franchement, et s'accroupit près du dessin de sel. Il fouilla dans une des poches de sa robe, et en sortit un petit poignard en argent. Sans hésiter une seul seconde, il entailla la paume de sa main droite sur toute sa longueur ! Il laisse sa main pendre au bout de son bras, et le sang coula jusqu'au bout de son majeur, d'où il tomba, goutte par goutte, sur le dessin. Le sel but le sang, il devint rougeâtre, et la tâche de sang devint plus grande à mesure que les gouttes tombaient sur les grains…et bientôt, une étrange fumée blanche s'en échappa, elle était froide et inodore, et ne montait pas vers le ciel, comme toute sorte de fumée aurait fait, elle se glissa sur le sable, jusqu'à l'océan, où elle s'étendit, de plus en plus, jusqu'à créer un genre de brume de plus en plus épaisse.

"J'aime le chaos, ma chère, le voir en toute chose est mon vœu le plus cher, bien qu'irréalisable. Cependant, il n'aurait pas été dans mon intérêt de le provoquer dans un port. Nous allons loin, très loin, et certains préparatifs pour ce que nous allons devoir faire doivent rester inconnus de tous. Voila pourquoi le bateau sur lequel nous allons embarquer est mené par un équipage…disons…loyal. Il n'y a plus qu'à attendre, vous verrez par vous-même." Il adressa un autre demi-sourire à Balsa, "Et une fois à bord, tout vous seras expliqué…Nous allons à Ghurol, et le navire sera la meilleure partie du voyage."
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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyVen 03 Fév 2012, 20:32

La demande silencieuse de la chimère, quant à savoir ce qu’étaient les arcanes de la magie, trouva une réponse. Et celle-ci n’était pas simple ni concise, le seigneur Nazj semblait avoir l’intention qu’elle comprenne. Balsa réalisa qu’elle était, aussi surprenant que cela puisse paraître, à l’aube d’un enseignement. Elle se concentra sur le discours, en buvant chaque mot comme une eau précieuse. Il commença par expliquer que n’importe qui pouvait manipuler la magie, du moins dans ses formes les plus simples. C’était encourageant et l’idée de pouvoir allumer un feu par la seule force de la pensée n’était vraiment pas pour déplaire à la chimère. Car au cœur de l’hiver, se réchauffer était primordial mais souvent difficile. Faire naître la première flamme d’un brasier demandait de l’habilité et du temps, temps pendant lequel le corps immobile menaçait de geler. Si Balsa devenait capable de maîtriser le feu, sa vie en serait bien améliorée. Et si elle était capable de plus ?

Nazj en vint à parler spécifiquement des arcanes et là, finie l’accessibilité au tout un chacun. Il fallait un esprit de fer dans un corps d’acier. Pour le corps, la chimère se voyait comme suffisamment forte pour tenir. Mais pour l’esprit… Elle se plia à l’exercice mental suggéré par le mage. S’imaginer l’univers, sa fin, et au-delà. La connaissance qu’elle avait de l’univers était si maigre que se le représenter tout entier constituait déjà un défi en soi. Le mage avait bien conscience de la difficulté de la tâche, puisqu’il considérait que l’esprit mortel n’était pas capable de telles représentations. Il conclut en repoussant à plus tard la suite de ces explications, tuant dans l’œuf toutes les questions que son monologue avait fait naître chez Balsa. Mais soit, ils auraient tout le temps.

Ils étaient revenus au dessin sur le sol alors que le nécromancien parlait. Pourquoi est-il allé à l’océan, par simple plaisir ? A présent, celui-ci s’était accroupi et tirait quelque chose de son manteau. Voila qui rappela des souvenirs à la chimère. Des souvenirs d’une nuit mortelle qui avait lié dans les promesses son destin d’aujourd’hui. Comme alors, Nazj était en train de préparer un tour. Les dessins restaient incompréhensibles aux yeux ignorants de Balsa, mais elle voyait bien qu’ils n’étaient pas le fruit du hasard, ils étaient même très précis. L’objet que le mage cherchait s’avéra être une petite lame, dont il se servit sans ciller pour sa lacérer la paume de la main. La chaire s’ouvrit et le sang coula, rouge et chaud il distillait dans l’air marin son odeur métallique. Une à une les gouttes roulèrent sur la peau parcheminée du nécromancien, longeant la maigreur de ses doigts jusqu’à tomber sur le sol. Ou plutôt, sur le dessin, qui absorba le liquide rouge peu à peu.

De la poudre blanche que Nazj avait répandue sur le sable s’échappa bientôt un filet de fumée. Ce filet s’épaissit et se dirigea, à l’encontre de toutes les lois de la nature, vers l’océan qui écrasait ses vagues devant lui. Loin de se dissiper la fumée se gonflait, s’élargissait, devenait plus dense et plus opaque. Elle s’étendit sur l’océan, sur la page et tout autour d’eux. Quelque chose de grand était à l’œuvre, quelque chose de si fantastique que l’esprit de la chimère n’arrivait pas à l’imaginer. Contemplant le spectacle, elle réalisa que son cœur battait incroyablement vite. Elle se trouva un peu stupide d’avoir cette excitation enfantine, mais aucun raisonnement et aucune rationalisation ne pouvait calmer son état. L’adrénaline pulsait en elle, courant dans ses veines et ses artères pour rendre chaque muscle plus vivant et chaque sens plus ouvert.

C’est à ce moment que le seigneur Nazj reprit la parole. Et son introduction en disait long sur le personnage. Cette volonté de détruire, cette complaisance à semer la discorde, rappelait à la chimère son ami Mataro qui, lorsqu’elle lui avait demandé ce qu’il ferait d’une vie libre, avait répondu « tuer un à un tous les humains ». Elle avait sur le coup trouvé cette réponse stupide, inconsidérée et démesurée. Le nécromancien semblait avoir un but comparable, cependant les mots qu’il avait choisis étaient plus justes. Il ne désignait pas les humains pour commencer, mais voulais voir le chaos « en toute chose ». Et surtout, il relativisait sa volonté, sagement, la sachant irréalisable. Sa haine semblait mûrement réfléchie, contrairement à la réponse naïve de Mataro. Son but en paraissait plus louable. Mais cela tenait surtout à ce que Balsa avait changé au cours de l’année écoulée. Oter la vie lui avait toujours été supportable, mais à présent elle y trouvait du plaisir. Et si auparavant elle se contentait de voyous, ces derniers mois n’importe quelle vie avait été bonne à prendre. Même innocente. Du moment que l’affrontement lui permettait d’éprouver et grandir sa force. Car en cela aussi elle avait bien changé. Elle s’était toujours sue plus puissante que la masse humaine mais aujourd’hui elle souhaitait acquérir des pouvoirs plus grands encore et s’élever au niveau où elle n’aurait plus rien à craindre de personne. Surtout pas de l’Ouest et de ses gardes.

Après la réplique de son maître, elle avait enfin comprit ce qui allait arriver. Le navire qu’ils allaient emprunter, ils allaient le trouver là. Car Nazj était en train de l’invoquer, depuis les entrailles de l’océan. Leur équipage serait loyal car il serait constitué de morts, au service entier du nécromancien comme l’étaient les deux gardes placides. Comme elle l’était elle-même aussi… Mais elle était différente. Elle était vivante et avait choisit d’obéir à ce maître des ténèbres. Tout lui serait expliqué à bord, et elle avait hâte, mais elle eut déjà un indice sur leur destination : Ghurol. Le coin de ses lèvres dessina un sourire, un sourire franc et foncièrement heureux. Elle allait enfin voir cette île dont Akin lui avait fait rêver le décor. Si son cœur n’avait pas déjà été en train de battre fort il aurait accéléré. Les yeux tournés vers l’océan et la brume qui le recouvrait, elle attendait de voir le prodige de son maître.

Alors elle essaya à nouveau de se représenter l’univers. Tout l’univers. Un univers plus grand qu’elle n’avait jamais imaginé, puisqu’il devait intégrer ce dont elle était témoin. Un univers où tout était possible. Un univers infini. Mais comment voir au-delà de ses limites, s'il était infini ? Il n’y avait rien. Rien n’existait. Et rien n’avait pas de forme ni de couleur. Rien c’était le vide. Et elle devait s’imaginer le vide.


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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyMar 07 Fév 2012, 05:00

Pendant un moment, rien ne se passa, il n'y avait que la mer qui se recouvrait peu à peu de brume épaisse, et Nazj et Balsa la contemplant, attendant quelque chose. Et puis soudain, des profondeurs du brouillard, un son puissant retentit ! Une note longue et basse qui ne pouvait sortir que d'une corne de brume qui n'était pas encore visible. Nazj sourit, cela avait été plus rapide qu'il ne l'avait espéré, les morts avaient tendance à ne pas se presser, et il s'était attendu à ce que des marins, même cadavériques, soient pires encore…Mais il était satisfait, de quoi aurait-il eu l'air s'ils étaient resté là à attendre pendant bien plus longtemps ? Il y avait un moment où l'attente extatique se transformait en ennui, et Nazj en aurait été bien embêté, son image devait rester intacte en tout temps, la moquerie ne sied pas à un sorcier, et il sentait que c'était tout particulièrement vrai devant Balsa, car son intérêt pour la magie pourrait décroître…Et se sentir obligé d'agir d'une certaine façon envers quelqu'un était fort inhabituel, et particulièrement désagréable, il se dit que ça n'allait pas durer.

Et enfin, des profondeurs de la brume épaisse, le navire apparut ! D'abord une forme indistincte, tout devint visible à mesure que le bateau avançait : il avait une coque immense en bois, devenue verdâtre avec le temps, à l'allure pourrie et couverte d'algues, de berniques et autres coquillages en tout genre. A la proue du navire, il y avait une sculpture ; autrefois cela avait sans doute été une femme somptueuse, mais à présent, ce n'était qu'une figure torturée, aux yeux si rougis par la rouille que l'on aurait dit qu'elle pleurait du sang, sa bouche était distordue dans un cri d'horreur sans fin. Le reste du corps était comme le reste de la coque, souillé, verdâtre et pourri. Les trois hauts mâts se dressaient encore fièrement, mais les voiles étaient sales et déchirées, on y voyait des trous béants et elles ne semblaient pas prendre le vent, et les gréements semblaient tout aussi pleins de moisissure que tout le reste…Sur le pont, on pouvait voir des formes s'afférer à diverses tâches, des figures squelettiques aux bouts de chair pendants et aux vêtements moisis, sales et déchirés. Ce n'était pas une vision des plus agréables, et une odeur d'algues pourrissantes l'accompagnait, mais néanmoins, le sourire de Nazj s'élargit, et il se tourna vers Balsa.


"Voici la "Bean Sith", autrement dit la Banshee, un nom qui ne lui a certainement pas porté chance lorsque l'équipage était encore de chair et de sang, mais qui lui va à ravir aujourd'hui ! Débarrassez vous de mes serviteurs, ils seront plus une gêne à présent qu'autre chose, mais faites vite, inutile de jouer avec."

Puis il leva le bras gauche, et une brève lueur verte apparut au bout de ses doigts, avant disparaître aussitôt. Les formes cadavériques sur le galion ressuscité commencèrent alors à s'affairer de plus belle, et une petite chaloupe fut bientôt mise à l'eau…elle ressemblait bien plus à une épave qu'à autre chose en vérité, et elle devait certainement prendre l'eau, mais soit, s'il devait se mouiller, qu'il en soit ainsi. Il monta dans la petite embarcation lorsqu'elle toucha le sable…il n'y avait personne à l'intérieur, ni vivant ni mort, mais il n'y en avait pas besoin, elle mènerait Nazj et la chimère. Cependant, comme le sorcier l'avait prévu, il y avait bel et bien de l'eau à l'intérieur, et beaucoup, et elle puait atrocement. Jurant, Nazj regarda autour de lui, et trouva un seau sale et poisseux…il fit la grimace, les morts avaient parfois un sens de l'humour qui lui déplaisait beaucoup, écoper allait être une tâche éprouvante pour sa vieille carcasse, et cela allait certainement le rendre ridicule…mais il ne pouvait pas se permettre d'avoir l'air plus stupide encore en laissant la chaloupe couler, et lui avec ! Il empoigna donc le seau, et commença à écoper, jurant toujours comme un charretier. Lorsque la chimère en eut terminé, et qu'elle vint le rejoindre, il décida de ne faire aucun commentaire…

"Ne vous inquiétez pas pour l'odeur, elle disparaîtra quand nous monterons à bord…"

Et sur ce, il fit un mouvement de la main dans l'air, et la petit embarcation bougea, les menant doucement vers le navire cadavérique.

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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyJeu 09 Fév 2012, 03:45

La brume se déchira au dessus de l’eau et un immense navire en jaillit. Un navire qui seyait parfaitement au nécromancien : lugubre, sale, rongé de pourriture… La Banshee, introduite par son maître. Celui-ci avait finalement changé d’avis au sujet des cadavres gardiens. Ils étaient devenus inutiles et attendre d’être à bord pour s’en débarrasser ne servirait à rien. Il autorisa Balsa à les achever. Ou plutôt il le lui ordonna : « Débarrassez vous de mes serviteurs », ce que la chimère remarqua et n’apprécia pas vraiment. Etait-il obligé de parler ainsi ? Elle préféra pourtant se taire, d’autant que déjà son œil était attiré par une lueur autour des doigts du nécromancien. Elle voyait tant de choses incompréhensibles les unes après les autres que son esprit se perdait en vertige devant l’infini potentiel de la magie.

Revenir à des sujets plus terre à terre devenait essentiel pour Balsa. Et cela tombait bien, elle avait à faire. A tester. Elle jeta son regard vers les cadavres sur la plage et se mit à marcher dans leur direction. Celui à qui il restait encore des yeux la vit, pas de doute, il se campa plus fermement sur ses os. L’autre grommela sans prêter attention à la chimère. Ils étaient totalement apathiques, sans volonté aucune et d’une lenteur effroyable. Trop stupides sans doute pour réaliser qu’il fallait se battre, ils attendaient mollement qu’une seconde mort vienne à eux. Ses pas rapides portaient la chimère vers eux et elle eut à peine le temps de se demander comment ils se battraient sous les ordres de Nazj qu’elle était déjà à leur niveau. Il ne fallait pas perdre de temps, le mage l’avait fait comprendre, alors Balsa alla à l’essentiel. Elle saisit le poignet de l’aveugle, dans une délicatesse forcée.

Rien. Le courant ne passa pas et elle ne portait pas l’anneau. Les morts vivants étaient donc morts. La magie n’opérait pas sur les cadavres, même s’ils étaient réanimés. Enfin, la magie n’opérait pas… Ses sourcils se froncèrent et Balsa serra les doigts, puis déversa toute son agressivité le long de son bras. La peau gris-vert tourna au noir sous la tension et bientôt le cadavre constata cette anomalie, tentant de reculer. La magie se forçait par la volonté. Et alors un sentiment de puissance envahissait l’utilisateur. Balsa intensifia sa charge. Le courant suivit l’eau à travers le corps, coulant jusqu’à la terre et foudroyant le zombie qui s’écroula de tout son long. Un rictus souleva le coin des lèvres de la chimère. Elle maitrisait mieux sa foudre qu’avant, c’était certain. Les yeux de l’autre étaient dardés vers elle et il leva les bras pour se protéger. Balsa n’hésita pas à l’agripper pour lui faire subir le même sort. En tentant d’être plus rapide bien sur…

Quand elle eut terminé, elle se tourna vers le dernier endroit où elle avait su Nazj. Il n’était pas bien loin, à bord d’une petite barque arrivée seule sur la côte. Par quel miracle, Balsa se le demandait bien. Elle alla le rejoindre, passant l’anneau de son cou à son majeur droit juste avant de mettre le premier pied dans l’écume. Taire l’électricité dans l’eau était toujours difficile et ils allaient apparemment en avoir les pieds recouverts jusqu’au bateau. La chimère fendit la surface blanchâtre de l’océan et enjamba le rebord de l’embarcation. Le nécromancien fit une remarque concernant l’odeur, que Balsa ne trouvait que moyennement convaincante. Les senteurs malsaines qui l’avaient saisit devraient persister. Elle supposait que barque et navire les porteraient de la même façon qu’ils étaient fait du même bois. Mais dans le pire des cas, où les parfums de morts feraient parti du voyage, la chimère finirait par s’habituer. S’adapter était essentiel pour le prédateur. Elle s’était adaptée à la jungle, à la ville, à l’hiver… Elle s’adaptait là, en écopant pour ne pas couler. Et bientôt elle éprouverait son corps face à l’hostilité du désert. Son cœur fit un petit bond.

- Ghurol… Des chances qu’on voit les anubites ?

Non, elle n’avait pas pu attendre d’être à bord. Depuis qu’elle savait qu’ils allaient sur cette île la question lui brûlait les lèvres et le souvenir d’Akin enserrait sa poitrine. L’espace d’une seconde elle s’imagina le revoir là-bas. Que dirait-il s’il la voyait ainsi ? Que penserait-il, avec le recul, de l’éducation qu’il avait donné à la jeune Balsa ? Tentant de chasser cette idée, la chimère se contenta d’écouter la réponse de son maître, les yeux tournés vers la Banshee en approche. Le navire semblait plus grand à chaque instant et ils furent bientôt au bas de l’échelle déroulée le long de la coque verdâtre.

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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyMar 14 Fév 2012, 02:03

Le navire semblait grossir à mesure qu'ils approchaient dans leur petite barque pleine d'eau…le galion mort était majestueux, à sa façon. Il semblait irréel, et d'ailleurs, il n'aurait pas du pouvoir flotter, Nazj n'en n'était pas certain mais il se dit qu'il était possible qu'un énorme trou puisse se trouver quelque part sur la coque, et que la magie mise à l'œuvre empêchait l'océan de s'y déverser, et les voile ne pouvaient pas se gonfler efficacement au vent, une autre force était à l'œuvre, et Nazj adorait l'idée d'en être la source. Il était fier de son nouveau "jouet", et pourtant…il n'aimait pas vraiment les bateaux. Il n'avait pas le mal de mer, non, il était déjà suffisant qu'il soit pris de vertige, seulement, il ne parvenait pas à comprendre comment fonctionnait un navire. Lui, Nazj, qui avait appris avec aisance les principes de la nécromancie et qui avait étudié les plus noirs et profonds secrets de la magie, ne parvenait pas à comprendre comment une construction plus grande et bien plus lourde qu'une maison arrivait à flotter sur l'eau ! L'océan contenait-il un genre de magie ? Utilisait-on des glyphes spécifiques et des enchantements pour construire les bateaux ? Les quelques études que Nazj avait mené montraient que non, le bois était verni, mais tout à fait normal, et l'océan était ce qui semblait être : de l'eau salée. Il était donc un peu mal à l'aise lorsqu'il devait monter à bord d'un navire, mais il était nécessaire de passer par ce genre de chose lorsqu'on vivait sur un archipel, et Nazj avait voyagé d'innombrables fois sur ces maisons flottantes. Il tourna brusquement la tête lorsque la chimère posa une question, et il haussa le sourcil.

"Des anubites ? Par les boules du Diable, j'espère que non ! Ces bêtes n'hésiteraient pas à nous dévorer…ou moi en tout cas…Nous aurons bien assez à faire avec les vampires, croyez-moi ma chère, inutile d'aller attirer l'attention de ces chiens."

Sur ce, il prit l'échelle qui pendait au flanc du bateau, et s'empressa d'y grimper. La corde était moisie, mouillée et puante, tout comme les échelons, mais elle ne céda pas. Parler, même brièvement, des peuples qui parsemaient les terres de Ghurol le rendit un peu morose…C'était là une île qu'il détestait, qu'il maudissait. Ses voyages l'avaient souvent amené à y poser le pied, mais aucun de ses séjours n'avait été plaisant, et le travail qu'ils allaient entreprendre n'allait pas arranger les choses, loin de là, cela allait être très dangereux, mais il était inutile que la chimère le sache avant qu'elle ne puisse plus faire demi-tour…il s'avérait que Nazj avait quelques problèmes pour faire confiance à qui que ce soit, même lorsque la personne lui avait fait un serment d'allégeance. Il arriva enfin au bout de l'échelle, et se hissa sur le pont…ce qu'il y vit lui redonna le sourire.

Ils étaient plusieurs dizaines, des cadavres aussi mal en points que le navire lui-même, dégoulinant d'eau croupie et arborant diverses algues et coquillages accrochés à leurs os verdâtres. Ils portaient les restes des habits qu'ils avaient de leur vivants ; des guenilles pourries. Nazj se frotta les mains et respira profondément, et si l'odeur était pire à bord du navire que lorsqu'ils étaient dans la chaloupe, il ne remarqua rien. Il jeta un regard en arrière pour vérifier que Balsa n'était pas tombée à l'eau, puis il s'avança sur le pont. Les marins ressuscités vaquaient à leurs occupations, dont Nazj ignorait totalement la nature. Certains semblaient ne rien faire, ils restaient simplement là à regarder le vide, sans doute attendaient-ils que le navire reprenne la route afin qu'ils puissent retourner à leurs poste…Ils ne se montrèrent aucunement intéressés par le sorcier ou par la chimère. Mais parmi tous ces marins qui s'affairaient sur le pont, Nazj ne vit pas trace du capitaine…jusqu'à ce que son regard se porte sur la dunette, et alors son sourire s'élargit. Il fit distraitement signe à Balsa de le suivre…


"Capitaine Cromwell, un pirate. Il était cruel et fou à lier, ce qui l'a conduit à sa perte, mais qui m'a permis d'hériter, en quelque sorte, de ce bâtiment. Il est aussi dangereux mort que vivant, ça n'arrive pas souvent, mais il arrive que les cadavres gardent quelques traits forts qu'ils avaient avant de trépasser, je suis en train d'étudier le phénomène…vous verrez par vous-même."

Sur la dunette se tenait un corps plus imposant que les autres. Il était grand et emmitouflé dans un long manteau décomposé, et sur sa tête se tenait un tricorne moisi. Nazj lui fit sèchement signe de descendre sur le pont, et le cadavre approcha d'un pas mal assuré, comme si toutes ses articulations étaient coincées. Lorsqu'il fut plus proche, ils purent voir que ce cadavre avait, comme les autres, un crâne verdâtre, il n'avait qu'un seul œil, et sa mâchoire était à moitié décrochée. On pouvait voir un reste de barbe grise et il tenait très fermement dans sa main droite un sabre rouillé. Son œil unique écarquillé roulait dans son orbite et scrutait chaque recoin de son champ de vision.

"Capitaine, vous nous mènerez à Ghurol, moi et mon invitée…vous veillerez bien sur à ce que ses quartiers soient propres et à sa convenance…elle aura bien sur droit à des valets, n'est-ce pas ?"

L'œil du capitaine fixa le sorcier…puis sur Balsa, et revint sur le sorcier, puis de nouveau la chimère. Un long râle sortit alors de sa gorge, et sa mâchoire mal accrochée commença à se mouvoir, des sons étranges se firent entendre, mais malgré les mouvements désarticulés de la bouche et les craquements retentissants, ils ne semblaient pas venir d'une gorge quelconque, plutôt de l'air ambiant, c'étaient des sons, plutôt des mots, dans une langue fort étrange, sifflante et dure…et la voix qui les prononçaient semblait être très en colère. Néanmoins, Nazj eut un petit rire amusé, et pencha la tête vers Balsa.

"Il nous dit qu'une femme à bord est de très mauvaise augure, et qu'il vaudrait mieux vous dépecer pour réparer ses voiles tandis que le reste de votre chair pourrait nourrir l'équipage…c'est un homme particulier, ne trouvez-vous pas ?"

Nazj tapota l'épaule du capitaine mort d'un air condescendant en secouant légèrement la tête.

"Non non mon ami, vous ferez comme je vous le dit, ou vos restes retourneront nourrir les poissons, suis-je clair ? Peut-être même pourrais-je vous mettre en bouteille pour vous apprendre qui est le véritable maître à bord, qu'en dites-vous ? Allons, ne perdez pas de temps, nous avons du travail, menez-nous à Ghurol."

Le capitaine agita furieusement son sabre, puis fit volte-face en braillant des ordres toujours dans cette langue d'outre tombe, et l'équipage commença aussitôt à s'activer. Nazj sourit, puis se tourna vers Balsa en lui indiquant le bastingage.

"Venez, ne nous mettons pas en travers de leur route…je serais à présent ravi de répondre à toutes vos questions, vous en avez beaucoup, et nous avons beaucoup, beaucoup de temps, nous ne serons pas à Ghurol avant plusieurs mois ! J'espère que vous ne souffrez pas du mal de mer, le navire est suffisamment vert tel qu'il est…"
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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyMer 15 Fév 2012, 20:24

Le dédain de Nazj envers les anubites glaça le sang de la chimère. Il jura, fit passer ce peuple pour des bêtes sauvages et les appela même « chiens ». Elle eut envie de le tuer. Là, sur l’instant. Akin, à sa place, aurait envoyé ses griffes au travers de la frêle poitrine du nécromancien, droit sur le cœur, ne lui laissant pas le temps de regretter ses mots. Les poings serrés, Balsa ne fit pourtant pas un mouvement. Le pacte scellé la retenait mais la peur surtout. Peur de cet être si dangeureux, peur de laisser sa peau dans l’attaque. Etait-il si puissant ? Pris de vitesse, n’était-il pas qu’un simple humain ? L’image du cadavre de Nazj se réanimant après sa mort horrifia en esprit la chimère.

La barque tapa dans la coque et le choc ramena Balsa à la réalité. Son maître grimpait déjà, ne faisant aucun cas de l’irréalité du bâtiment devant leurs yeux. Cette chose avait été un navire, oui sans doute. Mais à présent ce n’était qu’une épave, crachée des fonds marins par une magie aussi noire que puissante. Elle agrippa une corde et commença à se hisser. Les narines collées contre la coque, elle sentait bien que l’odeur nauséabonde persistait dans le bois. Sa main, attrapant une nouvelle corde, se posa sur une substance à la consistance entre solide et liquide. C’était d’un vert sombre et semblait puer plus que le reste. Elle retira sa main et d’un geste sec se débarrassa de cette sorte d’algue. Elle grimpa plus vite, inquiète à l’idée de trouver le pont couvert des relents de l’océan.

Elle y découvrit un équipage à ce qu’il semblait en bonne et due forme. A ceci près qu’ils étaient morts mais ça n’était pas une surprise. Elle considéra l’ensemble du navire vu d’ici. Et les reflets de la lune sur l’eau, puis la terre. Le brouillard troublait encore la vision et le continent avait des allures de fantôme. Non, quitter la terre ferme pour l’océan ne l’enchantait pas. Leur destination qui jusque là l’avait motivée la rebutait presque à présent. Ils ne verraient pas d’anubites, il en était hors de question. Et surtout, chose qui n’avait pas échappé à Balsa, ils allaient se frotter aux vampires. Dans les récits d’Akin, ces créatures étaient parmi les plus dangereuses et les plus mauvaises. Elle-même n’en avait aperçu un qu’une fois. Une ombre dans la nuit.

Le capitaine Cromwell fut présenté à Balsa. Et il ne fallut pas longtemps pour que le personnage l’horripile. Elle remarqua que son maître avait une attitude étrangement polie avec ses sujets. L’ordre final qu’il donna était même accompagné d’une tape sur l’épaule. Et dans la menace jamais il n’haussait le ton ou révélait une colère. Pourtant, ne devait-il pas être ferme ? Il avait dit que certains de ses sujets étaient rebelles. Le capitaine avait déjà agité son arme sous leurs nez. Pourrait-il saboter le navire ? les attaquer pendant leur sommeil ? Un frisson parcourut l’échine de la chimère. Elle observa le capitaine beugler des ordres dans un charabia d’outre-tombe et les cadavres se mettre à l’œuvre. Le navire était glauque, par endroit les planches brisées, les cordes rompues et les voiles n’étaient que lambeaux. Comment était-on censé avancer avec ça ? Elle tourna le cou à droite et à gauche, tentant d’apercevoir les extrémités du navire. Ce qui serait le terrain de sa vie pour les mois à venir… Nazj lui fit signe de le suivre vers l’océan. Il ne fallait pas déranger les marins. Il termina sur une note d’humour assez surprenante. Qui bizarrement mit Balsa plus à l’aise.

- Non ça ira. Mais je vais faire le tour du bateau d’abord. Je ne dérangerais pas vos serviteurs.

Sur ce elle se mit en direction de la poupe. Elle regardait ce à quoi les cadavres s’activaient, sans comprendre l’utilité de chaque tache. Elle eut un petit sourire en voyant un larbin appliqué à nettoyer le pont – ce qu’il avait du faire durant sa vie sans doute. Peut-être le navire serait propre d’ici un moment. Elle resongea aux valets que le capitaine, sous les ordres de Nazj, mettrait à sa disposition. Et elle aurait ses propres quartiers… Une vie presque noble, bien loin de ses réalités. Flânant au milieu des travailleurs elle se demanda si ce qu’elle ressentait était éprouvé par toutes ces « dames » à la vie facile. Ils évitaient son regard, n’osait piper mot et bien souvent semblaient ne même pas la voir. Pourtant elle les observait, chat perché sur les toits jouant le badaud, sans la moindre gêne.

Ce qui l’ennuyait c’était que tout ce luxe était en quelque sorte le cadeau de Nazj. Elle dépendait entièrement de lui et surtout, elle était très vulnérable. Si la situation tournait mal, il avait sous ses ordres plus de marins que Balsa n’en pouvait combattre. Elle jeta un œil derrière son épaule, tentant de voir ce que son maître faisait. Oui, elle finirait par le rejoindre. Mais quand elle le déciderait. Car voilà bien tout ce qui lui restait de liberté à présent.

Et puis, elle avait besoin de temps pour considérer l’ensemble des choses qu’elle avait à demander. Le bateau était à la manœuvre, se tournant pour pointer le nez vers l’immensité des flots. Elle, à l’arrière, vit bientôt le continent se glisser devant elle. Derrière la brume elle vit la plage, les collines, au loin le relief de quelques montagnes… Elle eut la pensée qu’elle ne remettrait peut-être jamais les pieds ici. Alors elle adressa un adieu silencieux à Lan Rei et partit à l’avant du bateau.

Sur le trajet elle tenta de compter les cadavres, elle en vit dix-huit, mais en devinait presque autant à l’intérieur des bâtiments. Est-ce qu’ils vont réparer le bateau ? Elle n’atteint pas la proue car, arivant au niveau du nécromancien, ses pas se tournèrent vers lui. Elle examinerait le navire plus tard. Pour l’instant, elle revenait à son seigneur. Seigneur… ce mot serra les doigts au creux de sa main. Mais c’était elle qui avait choisit cette voie, en acceptant de se lier à un maître. Elle l’avait fait parce qu’elle avait entraperçu le jour de leur rencontre l’immense savoir qu’elle pourrait acquérir de lui. Et surtout l’immense puissance.

Elle vint poser une main sur le bois humide à quelques pas du nécromancien. Elle regardait à l’avant l’océan se mêler à l’ombre de la nuit. Il ne neigeait plus que très peu et il faisait moins froid.

- C’est nouveau pour moi ce genre de vie, il faudra m’habituer. Ne rien avoir à faire pour survivre, se cacher de personne… Je pourrais y prendre gout.

Avec un sourire presque complice elle lâcha l’horizon indistinct et plongea son regard dans celui du mage.

- Je pense que la plupart de mes questions, je ne les connais pas encore. Parce que celles qui me viennent maintenant engendrerons surement des tas de nouvelles. Mais je veux pas vous saouler, alors je vais tenter d’aller à l’essentiel…

L’essentiel…Elle se tut une seconde, jetant son regard devant elle, se voyant glisser sur les flots.

- D’abord, j’aimerais que vous me disiez ce que vous attendez de moi exactement. Pourquoi m’avez-vous appelé ? Où va-t-on sur Ghurol et quoi faire ? A moins que vous ne m’envoyiez seule quelque part… Donc ça déjà, que je sache. Pour que je me prépare. Je n’ai jamais affronté de vampire par exemple. Et puis, je… je comprends pas, les vampires sont morts non ? Vous ne pouvez pas les contrôler, eux ? Enfin, je ne dis pas ça parce que je veux pas les affronter, au contraire ! Il faut que je progresse. Et j’espère bien que vous pourrez m’aider…

Elle s’arrêta un instant, réalisant qu’elle parlait beaucoup et pourtant elle avait encore des choses à demander. Elle poursuivit en regardant Nazj.

- Vous disiez aussi que des cadavres gardent parfois une part de… volonté ? Ils peuvent être dangereux ? En fait, ont-ils encore une conscience ? – elle n’était pas sûre de vouloir connaître cette réponse là – Et les autres, par exemple mes « valets », ils feront tout ce que je leur demande ?

Si c’était le cas, les zombies étaient stupides et ne méritaient aucune sorte de pitié. Elle écouta la réponse, ou plutôt les réponses, de son maître. Attentive, elle voulu entendre quelques précisions, tentant de connaître exactement les plans du nécromancien. Son corps avait beau être à bout son esprit était tout à cette discussion. Elle lui demanda ensuite si lui était capable de manier la foudre, elle voulait voir. Et d’autres sortilèges aussi… ses yeux avaient soif de connaissances.

Un voile blanc se fermait sur le continent. Les voiles, bien que déchirées, se gonflaient sous le vent de l’hiver et le navire avançait, déchirant le reflet de la nuit sur l’océan. L’équipage mortuaire aux manœuvres, ils glissaient doucement en direction de Ghurol. La chimère se souvint alors qu’ils allaient longer Aïklando. Pourraient-ils la voir ?

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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyLun 20 Fév 2012, 19:21

La chimère refusa l'invitation de Nazj à aller près du bastingage pour regarder l'océan et discuter…soit, cela ne le dérangeait nullement, elle était tout à fait libre après tout, comme toute créature vivante, bien que la plupart soient trop bêtes pour s'en rendre compte. Il eut un demi-sourire, et alla seul contempler la mer. Il fouilla dans ses manches un instant, tout en grognant, et en sortit bientôt une longue pipe en bois de hêtre gris, et il ricana brièvement. Il chercha encore un peu et il eut bientôt en main une blague à tabac en cuir noir, il se renfrogna un peu cela dit lorsqu'il l'ouvrit et découvrit qu'elle était presque vide ! Mais, ne pouvant rien y faire pour le moment, il bourra sa pipe et rangea la blague dans une poche de sa robe…il allait sans doute en avoir besoin plus tard, et il ne voulait pas perdre son temps les mains dans les manches. Une petite flamme dansante apparut au bout de ses doigts, et il alluma sa pipe…il tira longuement dessus, puis soupira enfin de soulagement tout en s'accoudant au bastingage. Voila bien longtemps qu'il n'avait pas simplement pris le temps de s'arrêter pour regarder le paysage, pipe en bouche, et ne rien faire d'autre. Il y avait toujours quelque chose à faire, toujours un endroit bien précis où aller, quelque chose ou quelqu'un à attendre, ou à étudier…ici, sur ce navire, il n'y avait rien à faire, sa destination arriverait bien un jour, et il allait devoir s'y préparer, mais il avait beaucoup de temps, du temps à ne rien faire, à regarder la mer et les nuages. Cela allait finir par l'ennuyer, bien entendu, le ciel et l'océan étaient bien beaux, mais son esprit n'allait pas le laisser s'y perdre aussi facilement, il fallait quelque chose pour l'occuper, ou il deviendrait fou ! C'est pourquoi Nazj avait fait en sorte que de nombreux livres l'attendent dans sa cabine…dont le grimoire noir à la source de son pouvoir.

Et puis, il y avait Balsa. Cette petite allait sans doute occuper une bonne partie de son temps. Il allait devoir répondre à toutes les questions qu'elle allait poser, et elle en avait certainement des centaines…il allait aussi certainement devoir l'éduquer, lui apprendre les rudiments de la magie, les flammes envieuses dans les yeux de la chimère n'avaient pas échappés à Nazj. Cela allait être fascinant, autant pour lui que pour elle, la magie n'était jamais ennuyeuse, même lorsqu'elle était pratiquée par un débutant, dans ce cas elle était même amusante, bien que dangereuse parfois même lorsqu'il s'agissait de sortilèges insignifiant. Bien sur, s'il s'avérait que Balsa n'avait absolument aucun talent pour la magie et qu'elle ne progressait pas, cela allait être fort déplaisant, mais Nazj ne se faisait pas de soucis à ce propos, le pouvoir coulait en elle, cela semblait évident…Du sang de fée, ou quelque chose dans ce goût la n'avait-il pas été utilisé dans la création, après tout ? C'étaient des créatures chez qui la magie était naturelle, il semblait normal que Balsa en "hérite". Mais au vu de la difficulté qu'elle semblait éprouver à maîtriser un talent naturel, à savoir la foudre, la magie allait demander beaucoup de travail.

La chimère arriva près de lui au beau milieu de ses réflexions, et il ne la remarqua pas avant qu'elle ne prenne la parole, et il tourna brusquement la tête vers elle lorsque sa voix retentit, puis il se détendit. Il écouta attentivement la chimère, sans l'interrompre…Dieux, que de questions ! Et à chaque fois qu'il commençait à réfléchir à une réponse, il en venait d'autres ! Il aurait du insister sur le fait qu'il aurait préféré qu'elle ne pose pas toutes ces questions en même temps, mais soit, il aurait du s'y attendre ! Elle devait les avoir dans la tête depuis des mois, il était normal qu'à présent elle veuille toutes les poser…Cela signifiait que Nazj allait devoir discourir un long moment, il sentait déjà que sa mâchoire allait s'endolorir. Il tira encore un peu sur sa pipe, puis expira longuement avant de prendre la parole.


"Commençons par la question la plus simple, voulez-vous ? A bord de ce navire, vous êtes maître, tout comme moi, et tous vous obéiront sans discuter, sans hésiter…Excepté le capitaine ! Je crains d'être le seul à qui il obéisse. Certains cadavres sont étranges, comme je vous l'ai dit, ils gardent une part de ce qui les définissait de leur vivant, un trait de personnalité particulièrement fort. Ils peuvent être dangereux, oui, mais pas d'inquiétude, ces choses là son très rares, l'être vivant devait être exceptionnel et sa volonté extraordinaire, c'est une chance –qui dis-je, un miracle !- que je sois tombé sur ce bon capitaine, vous n'en croiserez probablement aucun autre. Pour ce qui est de leur conscience…je ne puis vous répondre pour l'instant, je suis encore en train d'étudier la chose, mais ça ne m'étonnerait pas."

Il retourna sa pipe et la tapota légèrement contre le bastingage, faisant ainsi tomber les quelques restes de tabac qui y restait.

"Pour ce qui est des vampires…c'est là une question bien plus difficile. Sont-ils vraiment morts ? Ont-il jamais été des cadavres pourrissants et attendant d'être relevés ? S'ils ont trépassés, ils sont devenus bien plus que des enveloppes sans vie, quelque chose de nouveau leur a été insufflé, je pense que c'est cela qui empêche tout contrôle. Mais les vampires me seraient d'une piètre utilité, il y a bien trop de faiblesses à prendre en compte, et je ne vais pas prendre des dispositions pour protéger un simple serviteur, alors que je peux en avoir des dizaines et des dizaines à mes pieds."

Il soupira légèrement puis rangea sa pipe désormais vide dans une autre poche de sa robe…il prit le temps de réfléchir un peu, les prochaines réponses allaient être délicates.

"Et à présent…oui, il est grand temps que je vous explique en quoi consistera notre travail sur Ghurol. Il y a…certaines choses que je souhaite récupérer, des artéfacts inestimables, des livres et d'autres documents qui me permettront de progresser dans mon…travail. Malheureusement, comme vous l'aurez sans doute compris, ils comptent parmi les trésors amassés par les vampires, et son cachés très profondément dans leurs caveaux, j'imagine, ou dans leurs grandes bibliothèques…En quelques mots très simples, ma chère, nous allons cambrioler le manoir Casparek ! Bien plus facile à dire qu'à faire, mais nous ne sommes pas totalement démunis, je vous transmettrais ma connaissance des vampires, et nous avons des mois pour peaufiner un des plans que j'ai en tête. Je sais une chose cependant, c'est que seul il me sera impossible de faire quoi que ce soit ; comme vous l'avez si bien remarqué, je ne puis contrôler les vampires, et ils sont bien trop puissants pour que quelques cadavres puissent s'en débarrasser. Mes pouvoirs vont bien au-delà de la simple animation de carcasse, mais la nécromancie est très dangereuse, et requiert beaucoup de temps…Vous êtes mon atout !"

Les quelques requêtes qu'elle eut ensuite le surprirent un peu, mais il ne refusa pas, au contraire : il sourit. Pendant les instants qui suivirent, il lui montra quelques tours formidables : des éclairs d'un bleu sombre s'échappèrent de ses doigts et frappèrent un cadavre, dont les chairs qui restaient se liquéfièrent rapidement, mais le corps se releva ensuite comme si de rien n'était ; il prit aussi une grande inspiration et une immense langue de fumée verte pestilentielle s'échappa de sa bouche lorsqu'il expira. Il fit bien en sorte qu'elle ne touche pas Balsa, il expliqua qu'il s'agissait là d'une fumée des plus nocives, qui lui brûlait les poumons à chaque fois, mais c'était un mal moindre comparé à ce qu'il endurait d'ordinaire. Il fit aussi d'autres tours, comme ouvrir un trou dans l'air vide duquel s'échappa le chien monstrueux au crâne de cheval et au rire d'hyène que Balsa avait déjà rencontré, la bête disparut bientôt lorsqu'elle sauta à l'eau et se transforma en brume. Il en créa d'autres : deux loups fantomatiques qui naquirent sous ses mains, des corbeaux morts qui s'échappèrent de ses manches, et un "souvenir", comme il appelait ses choses, qui se créa à partir de la brume et qui ressemblait à un fantôme de Balsa aux yeux noirs, vides, et immenses, le souvenir retraça exactement tous les pas que la chimère avait fait depuis son arrivée sur le bateau. Mais il ne put invoquer la foudre.

"J'ai entendu dire que certains sorciers maîtrisant les éléments étaient si formidablement puissants qu'ils arrivaient à faire jaillir des lances de foudre de l'océan alors que le ciel était parfaitement dégagé, et j'ai connaissance de récits de tempêtes magiques qui ont réduit des cités en ruine ! Mais je n'en suis pas capable, pas lorsque le ciel est beau et bleu…lorsqu'un nuage noir sera en vue, je vous montrerais, mais alors peut-être serez vous capable d'en faire autant…mes quelques petit tours vous-ont-ils plu ?"
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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyJeu 23 Fév 2012, 20:13

Un cambriolage, c’était donc de cela qu’il s’agissait. Et dans un manoir vampire. Aux yeux de Balsa, le projet était d’abord audacieux. Nazj était resté très flou sur l’objet qu’il convoitait mais au final, cela importait peu à la chimère. Le nom Casparek ne lui disait rien, mais il sonnait assez noblement et elle ne douta pas de l’importance du propriétaire. Tant mieux ! L’idée de berner les hauts représentants de cette race qu’on disait immortelle et prétentieuse était plus que tentante. Mais elle savait la difficulté que cela représenterait. Le nécromancien lui-même l’admettait. Et il n’était pas capable de contrôler ce genre de morts vivants. Si ça avait été le cas, il n’aurait sans doute pas eut besoin de Balsa ceci dit. Apprenant qu’il comptait la renseigner sur les vampires, elle avait gagné en confiance.

Le pourquoi de leur voyage expliqué, ce fut avec tous ses sens que Balsa apprécia la suite de leur conversation. Le sourire qui avait saisit Nazj à ces dernières demandes, curiosités enfantines, ne lui échappait pas. Elle lui trouva même un air ravit alors qu’il faisait danser des éclairs bleus au bout de ses doigts. Il semblait s’amuser en fait, et réaliser ses tours avec plaisir. La chimère, fascinée, scrutait le moindre des mouvements de son maître. Cependant elle doutait arriver au même résultat en le mimant simplement… La vapeur verdâtre qu’il éructa eut pour seul mérite de rendre l’ambiance olfactive plus infecte. Il dit qu’elle infligeait de sérieux dégâts et d’ailleurs lui-même en souffrait… Pour exercer sa magie il sacrifiait son corps et Balsa se demanda à quel point ce vieillard était encore humain. Quel âge avait-il déjà ? Cette question resta muette : la démonstration n’était pas finie. Elle revit la bête qu’elle avait terrassé des mois avant cela. Et elle n’eut pas peur. Pas peur non plus de ces animaux, qu’elle demanda à toucher pour en éprouver la réalité. Il n’y eut que ce « souvenir », comme le mage l’appelait, pour la mettre mal à l’aise. Mais c’était sans doute de voir sa propre image, animée de surcroit. L’eau des rivières ne lui renvoyait jamais un reflet si réel.

En conclusion à cet éventail de sorts Nazj dit qu’il ne pouvait invoquer la foudre. Il évoqua cependant la possibilité de le faire. Ainsi que de créer des tempêtes magiques désastreuses. Si Balsa comprenait bien, le sorcier en était capable pour peu qu’il soit dans de bonnes conditions. Elle comprenait, car elle-même sentait sa puissance s’accroître lors des orages. Et quand l’éclair l’avait frappée, la foudre avait continué de crépiter en elle des semaines durant. Cette puissance offerte par la nature, si elle la maîtrisait maintenant, pourrait faire des merveilles… « mais alors peut-être serez vous capable d'en faire autant… » Il pense vraiment que je serais… capable de faire ça ? Ce n’était pas le vide ni le bateau qui commençait à tanguer mais la chimère posa son autre main sur le bastingage, comme prise de vertige. Elle fixait devant elle l’océan et essayait de se représenter là un éclair jaillit de la nuit. Un éclair qu’elle aurait envoyé. Peut-être qu’en l’imaginant avec assez de précision…

Elle réalisa à quel point la fatigue la rongeait alors qu’elle sentait dans ses cuisses et ses mollets l’endolorissement des muscles. Non, ce n’était certainement pas le moment de jouer les audacieuses. Elle n’avait de toute façon pas la prétention de parvenir à un tel prodige de but en blanc. Surtout pas dans cet état. Il lui fallait une bonne nuit de sommeil. Nazj avait demandé si les tours avaient plut, alors la chimère décida de répondre. Mais le sourire sur ses lèvres devait déjà parler à lui tout seul. Elle détacha son regard de l’océan pour le lancer vers son maître.

- C’est impressionnant. Il faut du temps j’imagine pour parvenir à un tel résultat.

Elle balaya ensuite le navire du regard. Les cadavres toujours à l’œuvre étaient peut-être doués d’une conscience mais leur inhumanité était certaine. Aux yeux de Balsa ils n’étaient rien de plus que des bêtes de somme, dont Nazj garantissait la parfaite coopération. Voir le sorcier abattre et relever un marin trépassé ne l’avait pas moralement choquée. Sa morale était de toute façon bien trop mince. Elle avait renié ses valeurs une à une, oublié son humanité pour devenir une chimère, pour ne plus se cacher… Sa queue battit l’air, libre entre les pans de sa robe.

- J’avoue je vous envie de pouvoir faire ça mais je comprends vraiment pas comment vous faites. D’ailleurs, comment vous faites ?

Elle le fixa un instant, attendant une réponse, puis eut un air désolé et fit signe à son maître de ne pas se donner la peine.

- Non, je crois que j’ai assez posé de questions pour ce soir… ou cette nuit…

Elle leva les yeux vers le ciel noir où couraient quelques nuages. Le vent qui les portait gonflait les voiles et les voyageurs se trouvaient déjà loin du continent dont on devinait seulement la silhouette dans la brume. Le ventre gargouillant, la chimère réalisa qu’elle n’avait bien aucune idée de ce qu’ils pourraient manger à bord. Les réserves du navire devaient être aussi pourries que ses marins. Pouvaient-ils pêcher efficacement où Nazj avait-il la possibilité de faire apparaître les repas ?… Non ! Il devait se servir de cette pièce réserve qu’elle avait vu à Olia. Elle lui demanda quand même et il la rassura à ce sujet. Il ne put que comprendre qu’elle ait faim et il partagea un morceau de fromage avec elle. Elle voulut ensuite visiter ses quartiers et ils conclurent qu’il serait sage pour eux d’aller dormir. L’équipage infatigable aux commandes, ils n’avaient aucun souci à se faire.

Hormis les pièces que se réservait Nazj, Balsa put choisir sa cabine. Elle se dirigea vers la dunette et visita les plus spacieuses. Quand elle croisa deux cadavres immobiles et le regard dans le vide, elle leur demanda de la suivre. Et c’est ce qu’ils firent. Aussi quand elle eut fait son choix, elle les avait toujours sous la main. Elle leur demanda de mettre de l’ordre et s’attela elle-même à la tache. En commençant par dégager ce qui servait de lit. Matelas et couvertures étaient trempés. Elle envoya l’un de ses valets les faire sécher et contempla le sommier de bois qu’il restait, puis l’ensemble de la pièce. Quelques pieds de large, à peine plus de long, meublée assez richement. Une large fenêtre donnait sur l’océan. Enfin devait donner car pour l’instant le verre était troublé par algues et buée. Elle alla jusqu’à cette fenêtre et l’ouvrit, respirant une bouffée d’air marin au passage. Ainsi la pièce pourrait sécher pendant son sommeil. Elle essora les rideaux ruisselants d’eau dans l’océan et les laissa danser dans le vent. Elle retira ensuite sa veste et l’étendit sur ce qu’il restait du lit.

Un frisson courut sur sa nuque. Il ne faisait pas vraiment froid et beaucoup moins que dans les montagnes d’où elle venait, cependant l’humidité avait infiltré chaque parcelle du navire et maintenant chaque parcelle de son être. Comme ces odeurs nauséabondes. Mais ça, la chimère s’y faisait déjà, du moins ça ne l’empêcherait pas de dormir. Le cadavre qu’il restait était maintenant bras et mâchoire ballants. Il avait relevé les meubles renversés et retiré quelques algues du sol. Elle lui demanda de sortir et de rester devant la porte, interdisant l’accès à tous les autres marins. Qu’il n’y en ait pas un assez débile pour venir traîner autour d’elle dormant. Il sortit et ferma la porte derrière lui mais s’il resta ou partit, Balsa n’en sut trop rien. Qu’importe, elle était fatiguée, la route avait été très longue et les retrouvailles éprouvantes émotionnellement. Elle ne se donna pas la peine d’aller vérifier. Un long soupir s’échappa entre ses lèvres alors qu’elle s’asseyait sur le lit. Elle réalisait toujours qu’elle était entièrement à la merci de son maître. Et elle avait appris des choses sur lui, sur sa magie, qui lui criaient d’être méfiante.

Mais elle savait aussi maintenant qu’il comptait lui faire largement profiter de son savoir. Elle était contente pour cela. Ce qu’elle avait vu l’impressionnait, mais ce qu’il avait dit surtout. Car il pensait sincèrement que Balsa était capable des mêmes miracles. Bien sur, il n’avait pas précisé le temps qu’il lui faudrait pour assimiler de tels savoirs. Mais il semblait assez enthousiaste à l’idée de lui enseigner. Il avait la patience, à l’évidence, et il expliquait chaque chose le plus clairement qu’il pouvait, sans jamais se lasser de discourir. Un sourire se faufila sur les lèvres de la chimère. Il lui faisait presque penser à Akin à cet instant. Elle s’allongea sur le dos, mains derrières la tête fixant le plafond.

Akin… Comment Nazj pouvait dénigrer les anubites alors que des individus comme Akin peuplaient cette terre ? Etait-il une exception au sein de sa race ? Ce qu’il racontait des siens n’était pourtant pas l’histoire de bêtes sauvages mais d’un peuple guerrier fier et sage, meurtrit par la folie des hommes. Et ils n’étaient certainement pas stupides au point d’attaquer n’importe quel innocent sous prétexte qu’il était humain. Si Nazj et Balsa n’entraient pas sur leur territoire, la chimère voyait bien peu de raison qu’ils s’en prennent à eux. Hors de leurs terres, ils étaient humbles et respectaient la vie, du moins dans les récits d’Akin. Elle espérait encore que le hasard leur ferait croiser la route de l’un d’entre eux. Mais elle savait qu’ils étaient peu nombreux et que ses chances étaient bien minces. La fatigue pesa sur ses paupières et elle ferma les yeux, se tournant pour mieux s’installer. Elle se demanda ce que Nazj pouvait bien savoir des anubites et se promit de le lui demander le lendemain. Puis ses pensées divaguèrent de Ghurol aux vampires, aux pouvoirs de son maître et à ceux qu’elle pourrait posséder… Tout se mêlait et le flou se fit, puis le noir, et elle s’endormit.

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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyMar 06 Mar 2012, 03:00

Les petits tours de Nazj avaient plus à la chimère, et il sourit…et le commentaire qu'elle fit l'amusa un peu. Du temps ? Oh oui, beaucoup de temps, et beaucoup de travail. Depuis qu'il avait découvert le pouvoir, il y a de cela très, très longtemps, il avait travaillé sans cesse, chaque jour, sans jamais s'arrêter…et il y avait encore tant à apprendre, tant à découvrir ! Nazj avait bien l'intention de vivre beaucoup plus longtemps que n'importe quel autre humain, et pourtant, à sa mort, il y aurait certainement bien des mystères encore à élucider. Il ne savait d'ailleurs comment réagir face à cela, devait-il en être attristé, devait-il être en colère, ou plutôt fasciné ? Le fait que tant de choses allaient lui échapper le mettait en colère, mais il trouvait tout de même une certaine beauté dans tout ceci, sans vraiment pouvoir dire ce que "ceci" était vraiment. Mais peut-être que des secrets allaient lui être révélés à son trépas ? Qui pouvait savoir, peut-être que les morts détenaient la connaissance qu'il avait poursuivi toute sa vie, et qu'ils en riaient, et riaient encore ! Voila qui fit grimacer Nazj.

Il écouta attentivement la nouvelle question de Balsa, content qu'elle le tire de ses pensées qui ne promettaient que de le mettre de plus mauvaise humeur. Mais lorsqu'elle posa sa question, Nazj se raidit, et écarquilla légèrement les yeux…Comment faisait-il ? Voila une question à laquelle il ne s'attendait pas, et il ouvrit légèrement la bouche pour y répondre, mais il fut interrompu par Balsa, qui sembla se rendre compte que le nombre de questions qu'elle avait posé en si peu de temps était énorme. Et cela rassura un peu Nazj, car en vérité, il se rendit compte que cette fois, il n'avait absolument aucune réponse à offrir ! Et cela le mettait particulièrement mal à l'aise. Il mit ce souci de côté pour le reste de la soirée, qui se déroula tranquillement : Balsa posa encore quelques questions, mais d'un tout autre ordre, puis ils mangèrent un peu…et elle partit rejoindre ses quartiers pour enfin dormir. Lui resta sur le pont, à contempler l'océan, encore pensif. Il bourra sa pipe puis l'alluma, son visage se durcit peu à peu à mesure qu'il réfléchissait à cette question toute innocente que Balsa avait posé, savait elle seulement quelle portée cette toute petite question avait ? Il tira une longue bouffée de sa pipe.

Comment faisait-il…comment faisaient tous les pratiquants de magie ? Le commun des mortels pensait-il qu'il suffisait d'agiter les bras et de murmurer des petites choses incompréhensibles ? Pire encore, les magiciens eux même pensaient-il que c'était suffisant ? Nazj se rendit compte qu'il ne s'était jamais demandé d'où venait la magie, comment se formaient les sortilèges…Pour lui, c'était quelque chose de tout à fait naturel, comme respirer ou parler, se demandait-on d'où venait l'air et où partait-il, se demandait-on d'où venaient les mots et comment l'air silencieux pouvait-il être aussi bruyant lorsqu'on agitait les lèvres ? Bien sur que non, et lui ne s'était jamais demandé comment il faisait pour pratiquer de la magie. Mais la question devait avoir une réponse ! Cela pourrait-être une avancée majeure dans l'étude de la magie, dans la compréhension de son essence ! Nazj incanta, et à nouveau une flamme vint danser au bout de ses doigts…comment avait-il fait cela ? Il s'était concentré un peu, et avait souhaité que la flamme apparaisse…il avait senti le pouvoir affluer dans ses veines, et la flamme était apparue. Mais elle n'était pas sortie de son doigt, son sang ne s'était pas enflammé ! Il avait agi sur un élément extérieur, mais quoi ? L'air ? S'il venait d'enflammer l'air, pourquoi donc n'explosait-il pas à chaque fois que l'on claquait des doigts ? Non, ce n'était pas l'air.

Mais alors, quoi ? Il alluma une autre flamme au bout d'un autre doigt. Venait-il juste d'enflammer le tissu même de la réalité ? Non, pas vraiment, mais peut-être…peut-être venait-il de manipuler une matière dans la réalité qui, comme l'air, n'était pas visible. Comment aurait-on su que l'air existait s'il n'y avait pas les arbres pour nous montrer le vent ? Et si les sorciers étaient les arbres pour cette…matière ? Nazj tapota sa pipe contre le bastingage pour la vider des restes calcinés de tabac, puis il la rangea dans sa robe, et se dirigea vers sa cabine, toujours pensif. Matière, oui, mais il n'avait pas de nom à lui donner…il fallait étudier la chose bien plus en profondeur, pour l'instant, il allait simplement lui donner le nom de "matière". Nazj entra dans sa cabine ; il s'agissait en fait de celle du capitaine, mais ce dernier n'avait besoin d'aucun repos, et allait très certainement rester tout le long du voyage sur la dunette à beugler des ordres à ses marins. Le sorcier avait bien fait en sorte que sa cabine soit propre et confortable sans qu'il ait à la nettoyer…en y repensant, il se dit qu'il aurait peut-être du faire de même avec les quartiers de Balsa, mais il ne fit qu'hausser les épaules et s'assoir au grand bureau qui se trouvait dans la cabine.

Celle-ci était plutôt spacieuse et étrangement éclairée, même s'il n'y avait que quelques maigres bougies à l'intérieur et qu'il faisait nuit noir dehors. Il n'y avait pas grand-chose, hormis un grand bureau et une petite table, ainsi que quelques chaises et un lit dans un coin, et pourtant on y était à l'étroit, car Nazj y avait entre des livres par centaines ! Il y avait là de tout, des livres de sorts, des romans, des traités philosophiques, des livres de cuisine, de tout ! Il s'était dit que le voyage allait être particulièrement long, et qu'il allait donc devoir prévoir un peu de divertissement, et qu'y avait-il de plus divertissant que des livres lorsqu'il n'y avait pas d'être vivant à tourmenter ? Nazj ouvrit un petit cahier, et y écrit la théorie qu'il venait tout juste d'élaborer. Puis il se versa du vin dans une coupe, qu'il but, encore pensif…et enfin, il se leva, agita la main pour que toutes les bougies s'éteignent, et alla dormir, enfin.


________________

Quelques semaines plus tard, Nazj se retrouva assis à se même bureau, et il se massait les tempes, les yeux fermés, et en soupirant. Rien, absolument RIEN ne s'était passé comme il l'avait prévu. Il trouvait cela incroyable, du jamais vu ! Et c'était fatiguant, fatiguant au possible. Durant ces dernières semaines, il avait été plus en colère qu'il ne l'avait jamais été pendant des mois, et ses éclats de rages avaient été tels que le nombre de poissons dans l'océan devait avoir baissé drastiquement, au vu des cadavres qui avaient flotté tout autour du navire pendant quelques jours, et il se doutait d'être la cause de la tempête qui avait fait rage sur la mer derrière eux –il en avait d'ailleurs profité pour faire tomber la foudre, pour se détendre…Plusieurs marins avait volés en éclats, tout comme des bouts du navire, et les voiles avaient pris feu plusieurs fois, mais cela n'affectait en rien la vélocité de la Banshee. Le capitaine n'en avait pas été très content, mais il ne s'était pas plaint personnellement à Nazj, il avait préféré envoyer des marins que le sorcier avait envoyés aussitôt par-dessus bord. La cause de son ire était la seule créature vivante à part Nazj lui-même sur le navire : Balsa.

Il n'avait jamais pensé que la chimère puisse à ce point le mettre en colère, mais il fallait faire face à la réalité : elle était nullissime. Nazj n'avait jamais vu un tel manque de talent chez un être vivant, elle n'avait pas progressé, pas du tout, elle ne pouvait pas lancer le moindre sort, mais même une brise, pas même une étincelle, hormis les éclairs qu'elle maîtrisait avant sa rencontre avec Nazj. Et la maîtrise de ce talent naturel n'avançait pas beaucoup, du moins c'était l'impression que le sorcier avait. Pourtant, RIEN ne l'empêchait de réussir à pratiquer la magie ! Elle comprenait la théorie, il n'y avait aucun problème, mais rien n'allait dans la pratique, pas la moindre petite avancée, c'était comme si quelque chose la bloquait. Nazj aurait pu lui parler de cette théorie de la "matière" qu'il était en train d'étudier, mais cela ne l'aurait avancé à rien, si elle ne pouvait pas faire comme tout mauvais apprenti sorcier le faisait naturellement au bout de quelques jours, alors une théorie naissante ne l'aiderait certainement pas. Nazj se dit que peut-être cela avait quelque chose à voir avec sa "conception" : elle avait une de fée, certes, mais quoi d'autre ? Quelque chose qui réduisait la magie au silence chez elle ? Si son échec persistait, le sorcier allait sérieusement considérer l'étude du corps de la chimère, en profondeur.

Parfois il la congédiait, déçu, parfois, de rage, il faisait voler tous ses livres en même temps à travers la cabine, où ils travaillaient le plus souvent. Certains soirs il ne l'appelait même pas, il préférait travailler et oublier la chimère. Mais son travail n'était pas spécialement reposant : sa théorie de la "matière" parvenait surtout à lui donner des migraines atroces, peut-être, se disait-il, que l'esprit humain n'était pas fait pour concevoir cet élément de l'univers ? Et pourtant, il persistait. Dans les deux cas, il n'abandonnait pas ; il lisait sans cesse, testait ces sorts, travaillait, réfléchissait, et il finissait toujours par rappeler Balsa et de recommencer, il ne pouvait supporter un sui cuisant échec. Aujourd'hui, il se reposait, tout simplement. Il n'avait pas envie de réfléchir, et n'avait pas envie de voir la chimère échouer encore et encore, il ne l'avait pas appelé. Il décida de sortir prendre l'air ; c'était le début de l'après-midi, le vent frais allait lui faire du bien. Il sortit donc sur le pont, et pris une grande goulée d'air…il vit Balsa, et alla près d'elle, sans mot dire. Il n'était pas vraiment en colère contre elle, pauvre chose, cela aurait été très mauvais pour son espérance de vie, non ; il était en colère contre le fait qu'elle ne réussisse pas, et contre quoi que ce fut qui l'empêchait de progresser.

Mais il se souvint qu'il s'était dit qu'aujourd'hui il n'allait pas y penser. Aussi préféra-t-il contempler la mer…et au loin, il vit une île, on ne la voyait pas très clairement, mais c'était très certainement un grand bout de terre…visionnant la carte dans sa tête, Nazj se dit qu'il ne pouvait s'agir que de l'île fabuleuse qui refusait qu'on en foule le sol…cela le fit sourire légèrement. Oh oui, l'île merveilleuse l'attirait, comme tout le monde, mais lui avait bien l'intention d'y aller, et il travaillait déjà sur la manière…et ce cauchemar enfin prendra fin !


"À quoi Rêvez-vous, Balsa ?"
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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyMer 07 Mar 2012, 23:40

Accoudée au bastingage, Balsa observait l’horizon. Légèrement vêtue pour cette fin d’hiver, elle se contentait d’une robe noire aux longues manches. Ses bottes, dans un triste état, elle les avait abandonnées dans sa cabine et allait pieds nus depuis que la neige était devenue un souvenir. Depuis le creux de son dos et jusqu’au bas du tissu, elle avait taillé une longue fente, puis attaché un pan de chanvre gris pour préserver sa nudité. Ainsi, la longue queue féline qui prolongeait sa colonne glissait entre les étoffes et se balançait librement derrière elle, se courbant naturellement à quelques pouces du sol. Le petit vent qui glissait sur sa peau et soulevait ses cheveux attachés était plus agréable que froid en ce milieu de journée. Elle frissonna pourtant, lorsqu’elle aperçu une terre pointant au loin derrière la crête des vagues.

Elle soupira. Quelle importance ? Cela pouvait bien être Aïklando où un vulgaire rocher, cela ne changerait rien à sa situation. Fermant les yeux elle tenta de fuir le navire. Fuir les cadavres et leurs chaires décomposées, fuir cet espace trop petit et ce monstre océan qui les cernait de toutes parts. Non, Balsa n’aimait pas ce navire. Elle savait dès son embarquement que le voyage serait pénible, que la terre ferme et les grands espaces sauvages lui manqueraient. Elle n’avait cependant aucune idée d’à quel point. Elle rouvrit les yeux sur le bois du bastingage, creusé par l’usure et la décomposition. Un gout amer lui monta à la gorge. Elle ne pouvait cependant pas en vouloir à l’embarcation pour le cauchemar que le voyage était devenu. Elle ne pouvait s’en vouloir qu’à elle-même.

Cet enfer qu’elle vivait ne s’était pas abattu sur elle violemment. Mais dès le premier jour il avait pointé, soufflant à ses oreilles des promesses funestes qu’elle n’avait pas voulut entendre. Elle se souvenait encore de cette première leçon. Nazj l’avait conviée dans sa cabine, lui avait expliqué par les mots la façon dont il s’y prenait et fait danser une petite flamme au bout de ses doigts. Puis lui avait demandé d’en faire autant. Elle avait imité le maître dans ses mouvements, calée sa respiration sur un rythme calme, s’était concentrée et avait dessiné le feu en esprit. Mais rien ne s’était produit. Pas découragée, elle s’était convaincue qu’en répétant l’exercice de nombreuses fois elle parviendrait à un résultat. Et elle avait essayé, encore et encore, tout le jour et toute la nuit. Le nécromancien lui avait montré d’autres sorts simples, mais la chimère n’effleura la maîtrise d’aucun. Les jours suivant, elle ne mangea et dormit que très peu, passant son temps entre le pont et ses quartiers. Avec ou sans le mage, elle s’était acharnée à faire naître en elle une nouvelle magie. Mais rien, rien n’était venu. Et si elle ne pouvait tout simplement pas ?

Cette idée s’était gravée en elle chaque jour un peu plus profondément et la plaie qu’elle creusait blessait son ego comme jamais auparavant. Elle était incapable. Faible. Plus minable encore qu’un humain. Et pour elle la seule raison à cet échec était son hybridation. Pourtant elle avait une part humaine, alors pourquoi ne pouvait-elle pas ? Elle devait être plus qu’humaine ! Elle l’était d’ailleurs en tout point. Sauf sur la magie. La déception qu’elle éprouvait n’avait pas de mesure. Ses rêves de puissance s’envolaient, elle restait cette créature faite d’os et de chaire, fragile et vulnérable. Mais le pire à digérer restait cette constatation implacable : elle échouait là où n’importe quel humain réussirait. Nazj avait été assez clair à ce sujet, tout humain pouvait prétendre créer une flammèche s’il s’y appliquait. Plusieurs semaines avaient passées, occupées pleinement à la création de ce feu qu’elle voulait détenir, et elle n’avait jamais rien vu que ses ongles trembler dans le geste pris à Nazj pour faire danser les flammes. La rage l’envahissait, emprunte d’humiliation, et parfois sa colère explosait au travers d’une foudre qu’elle dirigeait sur les cadavres. Ses valets faisaient de bons défouloirs, mais parfois relâcher du courant ne suffisait pas à la calmer. Elle aurait eut besoin de chasser, traquer, vaincre et briser un adversaire tenace. Mais tout ce qu’elle pouvait faire était tourner en rond sur ce navire dont elle eut bien trop vite fait le tour. Alors elle s’enfermait, recluse dans sa cabine, ou venait fixer l’océan sans bouger ni dire un mot pendant des heures. Son corps bien trop peu sollicité ne fatiguait presque pas, mais elle avait commencé à dormir de plus en plus, espérant faire défiler le temps plus vite, quitter cette prison et ce maître, se perdre dans les rêves pour oublier sa propre faiblesse.

Elle n’avait pourtant que ça à ruminer. Nazj s’avérait beaucoup moins loquace qu’escompté. En dehors de leurs entrainements, qui s’étaient faits de plus en plus rares, il passait le plus clair de son temps seul, à étudier la foule de livres qu’il avait apporté. Son humeur était noire et semblait déteindre sur le monde tout entier. Alors Balsa ne pouvait que se réjouir de son absence mais sans lui à qui parler, elle était totalement seule et désœuvrée sur le bateau. Ce qui la laissait avec ses pensées noires et ses échecs.

Elle n’avait guère développé d’affection pour son maître. Ils étaient bien trop différents et le rapport qui les unissait bien trop froid pour cela. Ils se respectaient, étaient toujours correct l’un envers l’autre et avaient conservé un « vous » poli. Qu’il se soit mis à la tutoyer aurait été compréhensible vu son grand âge, mais il lui aurait été désagréable. Elle ne voulait pas et ne serait jamais son amie. Sa complice tout au plus. Elle ne l’appelait jamais « maître » ou « seigneur » non plus, mais simplement par son nom : Nazj. Elle sentait qu’elle le décevait, le lisait dans son regard et l’entendait dans le silence de ces appels. Regrettait-il de s’être encombré d’une bonne à rien ? Il devait bien lui trouver une utilité pourtant puisqu’il l’avait convoquée sans compter sur son potentiel magique. La chimère se demandait si le mage la considérait comme son élève. S’il l’avait jamais vu comme telle et si oui s’il la considérait encore digne de ses enseignements. Car elle aimait apprendre, savoir ce qui était possible ou impossible de faire. Voir Nazj exécuter ses démonstrations, ou mieux, jouer à appeler le tonnerre, était toujours un spectacle ravissant à ses yeux et elle s’efforçait de ne rien en oublier. Bien sur, quand il était en proie à la même colère qu’elle ressentait, elle s’avisait bien de traîner dans ses pattes. Mais le navire n’avait rien de l’immensité des montagnes et dehors, Balsa n’avait pas manqué cette splendide invocation de la foudre en pleine tempête.

La tempête… Elle avait semblé poursuivre le navire pendant plusieurs jours. Et sous le ciel sombre Balsa n’avait pratiquement pas dormit. Dehors en permanence, elle avait joué avec sa foudre, désintégrant des cadavres trempés jusqu’aux creux de leurs os. Ils étaient résistants cependant, bien plus dur à détruire que des corps vivants. La chimère s’était en quelque sorte habituée à leur présence. Mais elle les haïssait. Ils étaient répugnants, stupides et abrutis. Les vaincre n’apportait que peu de satisfaction et en dehors de ces jours orageux elle se contentait de calmer ses nerfs sur eux sans les abîmer. Sa foudre ne progressait pas vraiment mais elle manquait de variété dans ses cibles pour la travailler. Et elle avait sentie, au cœur de l’orage, la puissance offerte par la nature qui sommeillait en elle. Si aucune autre magie ne lui était accessible, au moins ferait-elle grandir celle-là. Elle arrivait de mieux en mieux à taire sa magie sur commande aussi, pouvant toucher quelques instants un cadavre sans l’électrocuter, bien qu’elle n’y trouve guère d’intérêt. C’était le seul espoir qui lui restait, sa seule réussite, et bien peu face à sa déception.

La terre qui se dessinait à l’horizon prit rapidement une ampleur que n’aurais su avoir un simple îlot rocheux. Et Balsa était de plus en plus convaincue qu’il s’agissait d’Aïklando. L’île était bien là, semblant aussi réelle que Lan Rei. Etait-il vraiment impossible de s’y rendre ? Akin n’y était-il pas parvenu ? Le grincement du bois lui révéla la présence du nécromancien en approche. Elle lui jeta un coup d’œil mais en revint vite à l’horizon. C’était rare qu’il vienne à elle ces derniers temps. Et s’il venait lui proposer une énième séance d’essai à la magie, elle n’était pas sûre d’être motivée. Cela semblait ne plus servir à rien. Les arcanes comme la magie élémentaire lui resteraient inaccessibles, elle se rendait à l’évidence. Et son estomac se nouait. Fuir le regard du mage lui permettait de garder ces sombres pensées à distance. Au moins le temps de leur conversation, elle l’espérait. Elle se demandait cependant la teneur qu’auraient les propose de Nazj.

Il lui demanda alors à quoi elle rêvait… Quoi ? Un sourcil se leva, intrigué. Avait-elle bien entendu ? Elle ne voyait pas l’intérêt d’une telle question. Pire, elle la trouvait bien trop intime. Autant elle pouvait révéler sa nature raciale, autant ses rêves lui semblaient n’appartenir qu’à elle.

- Pourquoi ?

Entendre cette question posée à haute voix l’avait pourtant fait réfléchir à la réponse. Ses rêves n’étaient qu’une succession d’évènements plus ou moins logiques, qui même pour elle n’avait guère de sens. Mais certains, très courts, pouvaient sans doute renseigner sur son être, sur sa personnalité ou sur les événements marquants de sa vie. Elle aimait par exemple ses rêves de chasseresse, savourant l’image et les sensations de crocs qu’elle n’avait pas plongeant dans une chaire encore chaude. Elle n’aimait pas ceux où sa foudre lui jouait des tours, bien trop récurrents. Ceux qu’elle faisait plus récemment incluaient nombre de créatures morts vivantes et des océans ravageurs. Ceux qu’elle faisait sur le continent, bien plus agréables, lui laissaient la nostalgie d’époques révolues. Elle rêvait d’Akin très souvent, plutôt comme une idée que comme une réelle présence, car les traits de l’anubite s’étaient estompés avec le temps. Elle rêvait de Kaleya aussi, et d’autres. Le visage d’Hybris revenait souvent… dans ses cauchemars. Mais tout cela, elle se garderait bien de la partager. Et d’ailleurs, quel intérêt pouvait y trouver son maître ? S’il lui avait posé la question, il devait avoir une curiosité bien précise. Elle pensa qu’il voulait peut-être connaître la nature du rêve qui l’avait appelée à lui. Elle ne s’en souvenait que très vaguement… Les empreintes dans la neige, le squelette qui venait vers elle… l’amulette ? non, ça c’était à son réveil. Son regard toujours tourné vers l’île elle ferme les yeux une seconde. Alors elle comprit et les rouvrit.

- Vous parlez de rêves d’avenir n’est-ce pas ?... Ceux-là, je crois que je n’en ai pas vraiment… Je n’en ai plus. Je voulais apprendre. Et savoir. Maîtriser, devenir indomptable et me soumettre à personne, surtout pas toi…

Ses yeux quittèrent la surface brillante de l’océan et elle observa son maître, cherchant à mesurer son humeur. Pas très causant comme introduction, mais il avait au final ouvert à une large réponse. Donc prêt à discuter. Et il était certain qu’il ne venait pas l’écouter se confesser par courtoisie, il voulait vraiment savoir. Un sourire fugace, frôlant l’ironie, vint à la chimère.

- Mais vous, vous me semblez avoir une idée très précise de ce que vous voulez, je me trompe ? La question est, est-ce que toi tu vas répondre comme t’espérais que je réponde ?...

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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyJeu 15 Mar 2012, 23:00

Les rêves…un sujet fascinant, mais impossible à étudier dans son entièreté, impossible à exploiter à son plein potentiel, comme l'ensemble de la magie elle-même. Mais il n'était pas question d'étude lorsque Nazj posa sa question, il n'y avait qu'une curiosité toute enfantine, il voulait tout simplement voir de quelle manière Balsa allait répondre, il était curieux d'en savoir plus sur elle, car après tout, ils ne se connaissaient pas du tout, cela pouvait s'avérer problématique. Il y avait tant de réponses différentes à cette question, il était tout à fait stupide d'en espérer une seule, il aurait pu préciser, mais lui-même ne savait pas vraiment quelle réponse espérer, c'était simplement une question qui lui passait par la tête…peut-être étais-ce la vision de cette île qu'il pensait être Aïklando qui lui rappelait le Rêve, qui avait mené à sa question…les chimères rêvaient-elles, d'ailleurs ? Une autre question intéressante, mais il aurait tout le temps de la poser plus tard. Autre que ce rêve bien précis, la question pouvait concerner les rêves d'avenir, ou ce que la chimère aurait voulu faire dans le passé, ou, réponse plus ingénue, simplement les rêves qui la hantaient la nuit…

La chimère choisit les rêves d'avenir, soit, Nazj était curieux d'en apprendre plus…mais il fut vite désappointé. Pas de souhaits ? Pas de plans ? Pas d'ambitions ? Etrange…mais cela concordait avec la première impression que la chimère avait donné au sorcier, lorsqu'elle avait dit qu'elle ne cherchait que de l'or. C'était dommage, Nazj était certain que Balsa avait beaucoup de potentiel…hors du domaine de la magie. Cette brève pensée le fit tiquer. Non ! Il avait décidé qu'aujourd'hui il allait éviter de penser à l'éducation magique ratée de Balsa ! Y arriverait-il avant que le soleil se couche ? Il en doutait, mais autant tenter de suivre cette résolution le plus longtemps possible. Ah, mais voila que la conversation devenait intéressante, la chimère lui retournait la question…un instant il avait cru qu'elle allait rester silencieuse après sa brève réponse peu satisfaisante, et qu'il aurait alors dû trouver une autre question, ou une autre occupation pour son esprit, et cela aurait été déplaisant. Il tourna la tête vers Balsa, un demi-sourire aux lèvres.


"Concernant l'avenir, n'est-ce pas ? Quelle curieuse question à poser à un vieillard…" Il tourna la tête à nouveau vers l'océan, et son regard se perdit sur l'horizon tandis qu'il réfléchissait. "Je veux…la paix. Une paix parfaite, immuable, une paix que le monde tel qu'il est ne permet pas d'atteindre. Je veux changer le monde, ma chère, mais pas seulement pour moi, j'offre à tous cette paix qu'ils souhaitent tant mais que tous refusent. C'est le but de mon travail, et de notre mission, et bien que de nombreuses personnes se dresseront sur mon chemin, je peux vous assurer que je fait ça pour le bien de tous."

Sans qu'il s'en rende compte, un sourire cruel naquit sur son visage…sourire qui s'effaça vite.

"Etrange que j'entreprenne un travail si…altruiste, n'est-ce pas ? Les vivants ne méritent pas une telle considération, je devrais les laisser pourrir, grouiller dans leur propre corruption. Mais j'ai une bonne âme, je suis prêt à leur accorder la rédemption, j'y travaille dur…"

Il émit un léger ricanement…"bonne âme", "rédemption", de grands mots ! De jolis mots, mais sortis des lèvres du sorcier, lui-même doutait que quiconque puisse y croire…Il ne voulait pas accorder de rédemption aux vivants, oh non, loin de là, il voulait les punir, il voulait les faire souffrir, tous, il voulait leur arracher tout ce qui leur est cher, il voulait que la torture dure une éternité…pour finalement, et cela était tout à fait vrai, accéder à la paix éternelle. Il était véhiculé par la haine et la rage et non pas par la compassion et le sentiment d'aider le monde entier, mais si un aussi gros mensonge pouvait rallier les simples d'esprit à ses côtés, soit ! Tant que le plan final ne leur était pas dévoilé.

"Je suis content que vous soyez à mes côtés pour l'accomplissement de ce projet, jeune fille, même si…"

Il émit un grognement et grimaça…quel idiot ! Voila qui était fort maladroit, d'un côté la pauvre chimère allait probablement sombrer dans le mutisme, et lui ne pourrait plus s'empêcher de penser à diverses solutions ! Il était bien obligé d'enchaîner avec quelque chose…Il soupira et se frotta distraitement le menton. Soit ! Il savait ce qu'il fallait faire, ce qu'il allait dire, il comptait y réfléchir encore quelques jours, mais à quoi bon ? Au fond il savait parfaitement qu'il allait le faire quand même. De sa manche, il sortit un long couteau en acier, à la lame acérée…elle avait été rouillée, mais Nazj en avait pris soin la veille.

"Balsa…je me dis que nous avons peut-être pris votre éducation par le mauvais bout, que peut-être avons-nous visé trop…bas. Vous ne semblez pas capable de manipuler la magie élémentaire, la magie brute et simple, peut-être êtes vous faites pour quelque chose de plus…raffiné, de plus complexe, de plus…puissant. Vous avez du pouvoir, c'est évident, il suffit de jeter un œil à vos éclairs ! Peut-être n'êtes-vous simplement pas capable de le canaliser à travers vous-même. Certaines formes de magie sont trop puissantes pour que le corps seul le manipule, la nécromancie et la démonologie par exemple, nous utilisons des pentacles, des cadavres, du sang ! La magie noire, comme on l'appelle, nécessite ce genre de petits artifices, je me dis que peut-être avez-vous une certaines affinité avec elle."

Un léger sourire s'était dessiné sur son visage. Il n'était pas certain que la chimère en était vraiment capable, mais cette perspective lui plaisait beaucoup. Il agita le couteau qu'il tenait dans sa main.

"Faites couler votre propre sang. La magie du sang est brutale, violente, [/i]douloureuse, ainsi que dangereuse, mais indéniablement puissante, peut-être est-ce un pas entre la magie élémentaire et les autres formes plus…sophistiquées. Beaucoup de sorts nécessitent des sacrifices, extérieurs ou venant du sorcier, une des plus puissantes invocations que je suis capable de réaliser demande un suicide pur et simple ! La magie empêche la mort et cicatrise les tissus, mais la douleur et l'hébètement sont toujours présents, c'est ce que demande le sort…On ne s'habitue jamais à mourir."

Il tendit le couteau à Balsa en souriant toujours, poignée en avant.

"Qu'en dites-vous ?"


Dernière édition par Nazj le Mar 20 Mar 2012, 20:04, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyMar 20 Mar 2012, 19:14

Vieillard peut-être, mais bien décidé à ne pas mourir et à agir, c’était flagrant. Un instant Balsa crut qu’il ne répondrait pas, pourtant elle savait la question parfaitement légitime. Mais il avait besoin d’accrocher son regard à l’océan, se tourner vers cet horizon aussi lointain que pourrait l’être l’avenir. « La paix » résonna aux oreilles de la chimère comme une fausse note. Les mots qui expliquèrent ce choix étaient bien choisis, paraissant sincères, et le projet n’aurait pu sembler avoir un but plus louable. Mais Balsa ne s’y trompait pas, cette « paix » cachait un côté bien sombre, il n’y avait qu’à regarder leurs compagnons écervelés pour le comprendre. Le sourire qui s’étala sur le visage du mage ne fut qu’un indice supplémentaire, même s’il s’effaça vite. Car la chimère ne le lâchait pas des yeux, ne voulant pas perdre une bribe d’expression qui lui permettrait de connaître la pensée de son maître.

Effectivement, il était étrange de l’entendre parler d’une paix pour tous. Mais l’implication de son projet se révéla au fur et à mesure des mots. Balsa n’était pas vraiment surprise. Qu’il veuille créer un univers de morts était compréhensible, puisqu’il pouvait les contrôler. Il se ferait alors une sorte de dieu… C’était presque grossier pensé de cette manière, mais la chimère n’exclut pas la possibilité que pour cet homme tout se résume à vouloir contrôler un monde. Il avait de l’ego, ça oui, un ego démesuré. Et de l’ambition à l’évidence. Au travers des mots faux Balsa sentait la malveillance, un rire qu’il eut vint achever de la convaincre.

Un dégout dans la gorge elle l’entendit lui rappeler tout haut la sombre vérité : elle était avec lui, s’était embarquée sur la même voie obscure. La phrase suivante se noya dans un sujet qui n’aurait pas du être soulevé. Alors le silence se fit et elle n’allait certainement pas le briser. Mais elle ne se morfondit pas sur son sort, son esprit avait d’autres priorités à cogiter. Ce Nazj, qui osait appeler paix la mort et, par-dessus tout, devait croire qu’il pouvait se jouer d’elle. Elle n’était plus une enfant, elle n’était plus si naïve. Il était stupide en plus de masquer derrière de belles paroles ses souhaits et ses rêves. Elle aurait accepté d’entendre le pire. Une chose lui faisait peur tout de même. Si le nécromancien ne supportait à ce point pas la vie, combien de temps s’écoulerait avant qu’il chercher à se débarrasser d’elle ? Et si elle se révélait inutile vivante, ne souhaiterait-il pas l’avoir morte ? Prudence, prudence, lui intima une petite voix silencieuse. Et le plus tôt elle quitterait le nécromancien mieux ça serait.

Son prénom résonna aux oreilles de Balsa comme un long frisson lui grimpant le long de l’échine. Nazj avait délaissé les projets d’avenir pour en revenir aux pouvoirs, ou du moins à l’absence de pouvoirs, de la chimère. Et il se demandait si elle ne pouvait pas, malgré tout, accéder à certaines magies. Quelque chose d’autre, de plus puissant. Ce mot aurait enivré la chimère si elle ne s’était pas imposé à l’instant la plus grande réserve et la plus grande méfiance à l’endroit de ce maître noir. Elle se dit quelle avait raison quand il évoqua la nécromancie et la démonologie… Ce dernier terme, bien qu’elle ne l’ait jamais entendu, parlait de lui-même. Et bien qu’elle considérât facilement la puissance de cette branche, cela signifiait pour elle des associations bien funestes avec les démons, mauvais par nature. Cadavres, sang, magie noire… était-il vraiment prêt à lui enseigner de tels secrets ? Ce n’était pas la première question pourtant, qui était : Balsa avait-elle soif de pouvoir au point de se tourner vers ces formes de magie les plus sombres ? Elle ne quitta les yeux du mage pour venir examiner ce qu’il tenait qu’à ce moment là. Une petite lame qui semblait avoir bien vécu, quoique toujours largement moins que Nazj, cependant l’éclat ne laissait guère de doute sur la qualité de l’affutage. Les sourcils de la chimère se froncèrent et elle remonta son regard vers le léger sourire et enfin les pupilles du sorcier.

Le conseil final, l’explication qui se faisait presque ordre, était d’utiliser le couteau pour faire couler son propre sang. De ce qu’elle comprit, cela pourrait lui ouvrir la voix à des formes de magies plus évoluées, plus complexes, plus puissantes. Son cœur battit un peu plus vite et ses yeux fixèrent le métal brillant. Oui, l’envie était grande. L’envie de sortir de ces limites qui la rongeaient, l’envie de savoir tout simplement ce qui était possible. Elle sentit les muscles de son bras se délier et sa main avança doucement vers l’objet tendu par Nazj. Mais elle la retint, les doigts se plièrent sur le vide et elle ramena légèrement son bras en arrière. Non, elle ne pouvait pas accepter de s’infliger une blessure là, juste parce qu’il le lui conseillait. Combien de sang souhait-il voir couler au juste ? Cherchait-il à l’affaiblir ? Un instant la chimère se demanda si elle ne devenait pas trop paranoïaque. L’instant d’après elle se dit qu’elle avait surement tort. Puis le doute la regagna…. Il fallait se sortir de cette impasse. Décider de prendre ou non l’arme, décider de s’ouvrir les chaires ou d’opposer un affront évident à son maître. Ne risquait-il pas de mal, très mal le prendre ? S’il comprenait le peu de confiance qu’elle lui accordait encore, ne déciderait-il pas de se séparer d’elle ? Il était plutôt évident qu’il aimait ses sujets obéissants et qui ne posaient pas de questions. Elle allait donc éviter ce « qu’en dites-vous ? ». Elle prit tout de même la lame, l’examina et sembla se perdre dans sa contemplation.

- Ya quand même une chose que je comprends pas…

Elle oublia le couteau dans ses mains et plongea son regard dans celui du sorcier.

- Pourquoi vouloir la paix ? C’est d’un ennui… mortel, la paix.

Tout cela pour éviter le sujet de la magie du sang, certes, mais elle pensait sincèrement ces paroles. Elle ne se sentait jamais aussi vivante qu’à l’issue d’un combat rudement mené. Elle se délectait des conflits que les créatures vivantes s’inventaient, elle aimait les voir répandre le sang et la mort pour des causes qu’elle trouvait futiles. Cette stupidité humaine étalée devant ses yeux était toujours un spectacle ravissant. C’était sans doute ce qui lui permettait d’accepter sa place aux côté de ce maître de la destruction, le sentiment de participer à la création de nouvelles batailles. L’action était toujours préférable à l’immobilisme. Et la guerre, le combat, la tuerie et la vengeance réjouissait l’esprit bien plus qu’une paix artificielle, morne et fade.

- Si on arrivait à une paix parfaite, il ne resterait plus rien à faire. Alors autant mourir et ça, je ne veux pas.

Elle avait insisté sur les derniers mots, son regard brûlant. Comprendrait-il le message transmit ? Qu’elle ne se laisserait pas faire et surtout qu’elle comptait bien sortir vivante de sa servitude ? Le poids du métal dans ses mains la fit jouer avec la lame, qu’elle tourna machinalement. Ne pas y penser. Ne pas y revenir… Sa volonté ne fut pas assez forte et ses yeux se baissèrent sur le couteau sans qu’elle ne puisse rien y faire. Elle n’eut alors d’autre choix que d’enfin répondre à la question originelle. Elle soupira avant de répondre.

- J’essaierai ce que vous dites. Mais pas maintenant, je suis pas… d’humeur.

Ce qui était vrai. Il y avait encore le temps, beaucoup de temps, et elle préférait attendre d’être dans de meilleures dispositions pour tenter un nouvel exercice. Mais surtout, elle attendait d’être seule. Pour ne pas se blesser volontairement devant lui, aussi superficielle qu’il attende la plaie. Aussi pour ne pas utiliser cette lame en question, car sa paranoïa avait gagnée et la pensée qu’il l’avait ensorcelée avec elle. Elle ferait couler son sang, elle tenterait d’atteindre la puissance promise. Cependant elle le ferait en temps en en heure, par un moyen qu’elle trouverait seule. Elle lui tendit le couteau dans le même geste qu’il avait fait l’instant d’avant.



Dernière édition par Balsa le Jeu 29 Mar 2012, 16:49, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyMar 27 Mar 2012, 22:53

Nazj étudia la chimère, la moindre de ses réactions, la moindre petite grimace ou tressautement des sourcils. Il tenta de rester impassible, mais il sentit néanmoins ses sourcils se hausser légèrement lorsqu'il vit la main de Balsa se tendre vers le couteau, et les coins de ses lèvres se relevèrent dans un étrange sourire qu'il cacha du mieux qu'il put. Elle prit le couteau, et Nazj attendit en silence. Allait-elle faire ce à quoi il s'attendait qu'elle fasse ? Allait-elle trancher sa propre chair et faire couler son sang ? Et si tel était le cas, quelle partie se son corps allait-elle blesser ? Son bras ? Sa main ? Ou peut-être allait-elle le surprendre. D'un certain côté, il espérait que cette alternative se réalise, il aimait voir Balsa se montrer plus intelligente qu'il ne l'imaginait, cela le confortait dans son choix d'"apprenti".

Aussi, un sourire apparut puis disparut de son visage lorsque Balsa commença à parler plutôt que de plonger la lame dans son corps…Une question ? Soit, une question, c'était toujours intéressant ! Mais le visage du sorcier s'assombrit lorsqu'il entendit la suite. Voila quelque chose qui l'irritait fortement : que tout ce pourquoi il se battait soit mis en doute ! Plus que l'irriter, cela l'enrageait ! Plusieurs fois déjà, il avait laissé entrevoir ses intentions à des mortels, ses vœux de paix, et à chaque fois, il avait rencontré des objections, des hommes et des femmes qui ne comprenaient pas…et lui-même ne comprenait pas les vivants, ils passaient toute leur vie à souhaiter une paix durable, et la refusaient lorsqu'il la proposait ! A croire qu'ils préféraient vivre dans la misère, dans une peur constante, et toujours au bord de la guerre ! Nazj en était venu à apprécier les guerres et les conflits, cela débarrassait le monde d'un certain nombre de parasites et lui donnait beaucoup de matière première pour ses…travaux. Mais ce n'était jamais assez, les vivants avaient beau passer de vie à trépas par centaines, par milliers, il en restait toujours plus, ils étaient comme des cloportes, grouillants dans l'obscurité d'une pierre, et l'on aura beau en écraser des dizaines et des dizaines, sous chaque pierre il y en aura toujours plus !

Sans respiration devenait plus forte, car il essayait de contenir sa colère…et fort heureusement, il réussit, il n'explosa pas et ne réduit pas la chimère en charpie, comme il l'avait fait avec d'autres de ses interlocuteurs…d'ailleurs, c'était probablement pour le mieux, la chimère lui réservait peut-être des surprises en cas d'attaque, et elle avait un couteau affûté dans les mains. Il l'écouta avec attention. Ce qu'elle dit était intéressant…dérangeant, mais intéressant. Plus rien à faire…que pensait-elle, qu'imaginait-elle lorsque l'on parlait de paix ? Qu'elle allait vivre dans un palais doré et répéter chaque geste chaque jour ? Non, cela serait d'un terrible ennui, et l'ennui n'apportait pas la paix, tout au contraire ! Non, dans un temps de paix, l'on pourrait toujours voyager, toujours accomplir ses rêves ! Mais les vivants étaient des parasites, pas seulement pour le monde, mais pour eux-mêmes, et ils ne pourraient s'empêcher d'essayer de marcher les uns sur les autres, et il suffisant d'un seul homme pour que la paix se brise, et que tout reprenne…La paix n'existait pas vraiment, jamais universelle, jamais éternelle…sauf sous une seule forme, et dès lors il ne restait plus qu'une seule solution.

Nazj tordit un peu les lèvres en réfléchissant, quittant des yeux le regard de Balsa pour les poser sur le couteau qui lui était présenté. Il tendit la main, et prit la poignée du couteau, puis ramena l'arme lentement à lui, et l'étudia un instant.


"Autant mourir, hein ? Alors vous mourrez, Balsa…vous mourrez, comme tous les autres !"

Elle n'était pas bête, ou pas autant qu'il l'avait imaginé, cela lui plaisait…Cela le soulageait, en vérité. Selon toute vraisemblance, elle avait compris, et tant mieux. Il n'avait plus à tenter d'inventer des histoires et de cacher ses intentions sous des mots fleuris, il n'y avait plus qu'à exposer ses raisons, qui tourbillonnaient dans sa tête sans arrêt, chaque jour depuis plus d'un demi-siècle, et qui le rongeaient. Un autre sourire, plus grand et peut-être plus franc que les autres, déforma le visage de Nazj, qui se tourna vers la mer encore une fois. Il aimait regarder la mer, cela l'apaisait un peu. Il tourna la tête à nouveau vers Balsa.

"Mais le monde ne va pas s'éteindre en claquant des doigts, petite. Ce n'est pas paisiblement dans leur sommeil que les vivants verront la fin de leurs troubles, oh que non. Vous vous plaignez que la paix n'apportera aucun divertissement ? Le monde aura tant à faire pour essayer de survivre, comme il essaye de le faire toujours, que la paix de la mort sera accueillie comme un doux cadeau, si violente soit la façon dont la Mort viendra vous prendre. Le monde ne s'éteindra pas avec le sourire, mais dans le sang et les larmes, dans la peur, l'horreur, et le fracas de l'acier ! Il y aura plus de batailles et de violence que lors de tous les conflits précédents réunis ! Il y aura tant à faire que tout ce dont vous souhaiterez, c'est la Mort, mais vous ne vous en rendrez compte que lorsque les épées briseront vos os, trancheront votre chair, et verseront vos tripes sur un sol gorgé de sang ! Et lorsqu'il n'y aura plus aucun vivant pour fouler la terre de ce monde, lorsque plus aucun oiseau ne chantera et qu'aucun arbre ne poussera…alors enfin, je mourrais, comme il se doit, pour que tout soit…parfait !"

Il souriait toujours, ravi d'avoir enfin pu parler un peu plus de toutes ces choses qui lui tournaient dans la tête. C'était étrange, ces pensées avaient beau être dans son crâne depuis des décennies, il se sentait bien mieux, et bien plus convaincu du bien fondé de son travail à présent que ces mots avaient goûtés l'air du monde…Il en allait ainsi pour beaucoup de choses, avait-il remarqué, et il ne se l'expliquait pas. Il fit un léger signe de tête à Balsa, en guise de salutation, puis pris la direction de sa cabine, tout sourire…Il était plus ravi qu'il n'avait pensé l'être en sortant prendre l'air, et bien plus ravi qu'il ne l'avait été depuis très longtemps…C'était vraiment un très bon jour !
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MessageSujet: Re: Nos Retrouvailles [Balsa]   Nos Retrouvailles [Balsa] EmptyMar 03 Avr 2012, 23:43

Nazj ne souleva aucune objection au refus de Balsa à tenter l’usage du sang pour améliorer sa magie. Il reprit le couteau d’un geste calme. S’était-il attendu à ce refus ? Il changea en tout cas de sujet et la chimère comprit alors que ses quelques paroles avaient trouvé bien plus d’écho chez le mage que son hésitation à appliquer son conseil sur le champ. Ce qu’il dit alors, cette phrase courte et insistante, vint glacer le sang de la chimère. Deux battements de cœur, forts et rapprochés, entre lesquels elle crut bien qu’il comptait la tuer là, sur le champ. Mais cette idée ne dura pas plus que le temps qu’il fallut à l’adrénaline pour faire le tour de ses veines. Car il avait toujours une posture paisible et n’était aucunement menaçant. Et puis, à y réfléchir, il aurait été bien idiot de sa part de se débarrasser d’elle maintenant, alors qu’il l’avait appelée et attendue pour qu’elle l’épaule dans ce travail qui était loin d’être accomplit.

Un nouveau rictus vint se glisser sur les lèvres du nécromancien et si ses yeux pétillaient toujours d’une lueur malveillante, ce sourire avait une sincérité que les autres n’avaient pas. Cette franchise, cette honnêteté, trouva rapidement son reflet dans les propos qui suivirent. Et il se révéla alors, démystifiant ses rêves de paix et en expliquant tout le sens. Balsa comprit vite que ce n’était pas vraiment la paix qu’il recherchait, mais le chemin qui y mènerait selon lui. Il voulait voir les hommes lutter pour leur survie, s’emmêler dans les cauchemars qu’il leur ferait vivre et en venir à un niveau de désespoir et de souffrance qui leur ferait souhaiter la mort de tout leur être. Après la douleur, le sang et le déchirement, il leur apporterait la délivrance du sommeil sans fin, de l’inconscience infinie, de la… paix éternelle. En ôtant le déguisement de ces rêves ambitieux, il se confiait à elle, quittant le masque des apparences bien-pensantes pour lui montrer sa véritable nature. Il voulait voir le monde, le monde entier, mort. Et achever ce travail de longue haleine par son suicide pur et simple. Cela relevait-il d’une peur de louper quelque chose ? Tout cela reposait-il sur sa crainte qu’après lui le monde tourne encore et que chaque mouvement, chaque bribe, lui échappe ? La chimère en arriva vite à la conclusion suivante : il était fou. Qui d’autre qu’un fou pouvait avoir des projets si démesurés, si contre-natures et égocentriques ? Mais le pire dans tout ça, ce que Balsa n’arrivait pas à comprendre, c’était sa volonté d’anéantir non pas uniquement les races humaines qu’elle méprisait aussi – quoique largement moins que lui – mais bien toute forme de vie, animaux et plantes inclus. Là, elle n’était vraiment pas d’accord. Ce monde, bien qu’enlaidit par les excès des civilisations dites intelligentes, avait tout de même tant et tant de merveilles à offrir. Les jeux de jeunes faons à l’aube du printemps, l’odeur d’humus et de champignons au cœur d’une forêt, la neige rougit par la chasse fructueuse d’une meute de loups… Etait-il à ce point vieux et lassé de tout qu’aucun de ces spectacles ne l’émouvait plus ?

Bien entendu, elle se garda de soulever la moindre remarque à ce sujet. Tout d’abord parce qu’elle savait qu’elle ne serait pas entendue, elle jeune chimère n’ayant vécu qu’une poignée d’années libre. Aussi parce qu’elle avait toujours peur de lui et peur de ce qu’il pourrait faire si elle s’opposait, ne serait-ce qu’en paroles, à son immense puissance. Mais surtout parce qu’après ces confessions, Nazj semblait de bien meilleure humeur, ce qu’elle ne voulait pas gâcher. Le sourire toujours aux lèvres, il avait trouvé une forme d’apaisement que Balsa ressentait dans le silence qui s’installait. Le nécromancien ne s’attarda pas, satisfait sans doute de leur échange, et la laissa pour replonger dans les entrailles du navire. Le regard de la chimère se raccrocha au petit bout de terre à l’horizon. Alors elle soupira, tendit les bras vers le ciel et saisit l’un de ses poignets pour s’étirer longuement. Ses muscles n’étaient que trop peu sollicités à bord et elle sentit le besoin de les faire jouer. Elle quitta donc le bastingage pour aller se promener sur le pont. Le flot de ses pensées en revint aux mots « vous mourrez, Balsa…vous mourrez, comme tous les autres ! » qui avaient été momentanément balayés par les confessions du mage. Elle mourrait. Parce qu’elle était en vie et que chaque vie avait son terme. Elle ne savait pas quand, comment, où ni pourquoi, mais sa mort viendrait inéluctablement. Combien de temps une chimère pouvait-elle vivre ? Et combien de temps avant que son chemin ne croise celui d’un adversaire qu’elle jugerait mal et qui prendrait sa vie ? Elle sentait monter un vertige en elle dont elle n’avait jamais prit conscience. Une peur insidieuse qui nouait ses entrailles. Il fallait qu’elle se vide la tête et quel meilleur moyen, du moins prisonnière de l’embarcation, que de se défouler sur les cadavres animés ? Ce que fit Balsa, jouant de sa foudre jusqu’à une heure avancée de la nuit, quand son corps n’eut plus une once d’énergie pour s’égarer en pensées dans l’échec qui était sien ou l’inévitable mort qui l’attendait.

Quelques nuits plus tard, alors qu’elle était certaine que son maître dormait, la chimère se résolut à faire couler le rouge pour libérer sa puissance. Elle alla trouver Nazj le lendemain, ses paumes couvertes de bandages de fortune. Elle n’eut pas besoin de s’expliquer sur ce qu’elle avait fait, il comprit au premier coup d’œil. Elle raconta, l’air un peu dépité, que cet effort n’avait servit à rien. Nulle flamme n’avait dansé au bout de ses doigts, rien n’avait changé. Mais elle avait eut lors de cette séance d’entrainement l’idée que sa foudre pourrait grandir d’une nouvelle façon. Elle souhaitait ne plus avoir à toucher sa cible pour que le flot d’électricité se déverse. Elle rageait un peu de n’y avoir pas pensé avant, mais cela lui donnait un nouvel objectif, une nouvelle raison de se lever, de se motiver et d’occuper le temps qui défilait bien lentement sur cet océan.

Les jours passèrent et les semaines. Depuis la discussion qu’ils avaient eu en découvrant un fragment d’Aïklando, Nazj et Balsa passaient un peu plus de temps ensemble. Il n’était plus question de magie, le sorcier avait comprit que le sujet devait rester tabou pour l’instant. Mais il leur arrivait de partager un repas, de se retrouver sur le pont pour quelques instants. Elle aimait lui demander ce qu’il avait vu du monde et en retour elle partageait sa maigre connaissance. Elle se confia à lui, par bribes, révélant tour à tour son origine, les laboratoires de l’Ouest, quelques uns de ses meurtres et sa vie qui s’était faite de plus en plus sauvage. D’Akin elle ne dit rien car elle avait sentit le mépris de Nazj pour la race des anubites et ne voulait en aucun cas voir sur le visage de son maître une expression condescendante quand elle l’évoquerait. Poussée par la curiosité elle osa même un jour lui demander de gouter son tabac. Songeant que ce que le feu allumait ne pouvait pas être désagréable, elle comprit son erreur à la première bouffée et si elle en prit quelques autres ce furent là les dernières. Car fumer était de toute façon un vice bien trop humain à ses yeux, elle ne s’y abaisserait pas. Remarque qu’elle fit à haute voix, d’un ton léger, audace qui la surprit elle-même.

Le voyage s’étira sur les flots tantôt calmes tantôt tourmentés. La notion de temps se brouillait, comme se mêlaient aux premières lueurs de l’aube le ciel orangé et son reflet sur l’océan. L’horizon où s’étalait alors la brume était indiscernable. Ce matin là, les volutes s’écartèrent pour laisser place à une forme sombre, loin au sud, qui grandit alors que l’astre grimpait petit à petit. Il faisait bon, presque chaud, l’hiver n’était plus qu’un souvenir et la caresse fraiche du vent devenait un délice. D’ici à ce que le soleil soit à son zénith, la sueur perlerait sur leurs front exposés aux rayons. Encore dans sa cabine, Balsa se trouvait allongée sur son lit, fixant le plafond qui, avec tout le navire, tanguait au rythme des rouleaux franchis. Par la fenêtre ouverte la lumière laissait deviner l’heure approximative. Ce n’était plus le moment de dormir et pourtant la chimère était épuisée. Car cette nuit encore elle l’avait passée à travailler sa foudre, préférant l’ombre froide à la chaleur du jour pour s’exercer. Après toutes ces semaines, ses progrès étaient bien minces. Mais elle était capable à présent de provoquer une décharge ses paumes à quelques pouces d’un cadavre. C’était peu et cela ne changerait guère la donne en situation de combat, mais elle avait quelque peu retrouvé le moral. Elle pouvait encore repousser ses limites, évoluer et grandir en puissance. Mais pour l’instant elle avait juste sommeil. Comme la lionne elle s’étira en baillant et sous la douceur des rayons matinaux elle se laissa plonger dans le monde des rêves… De Ghurol qui approchait, de leur débarquement imminent, elle n’avait aucune idée.

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