"Homme libre, toujours tu chériras la mer !" "La mer enseigne aux marins des rêves que les ports assassinent." "La sagesse, c'est d'avoir des rêves suffisamment grands pour ne pas les perdre de vue lorsqu'on les poursuit." "Il est des moments où les rêves les plus fous semblent réalisables à condition d'oser les tenter." "Le voyage est une suite de disparitions irréparables." "Nous sommes de l'étoffe dont sont faits les rêves, et notre petite vie est entourée de sommeil." "Dieu nous rêve. S'il s'éveille, nous disparaissons à jamais." "Nous trouverons un chemin... ou nous en créerons un." "Le rêve de l'homme est semblable aux illusions de la mer." "Il n’est pas de vent favorable, pour celui qui ne sait pas où il va…" "Il y a trois sortes d'hommes : les Vivants, les Morts, et ceux qui vont sur la Mer." |
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*Fée*
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| Sujet: L'Or de la Fée (libre) Mar 01 Nov 2011, 05:00 | |
| La fée se réveilla en sursaut, et de cette brusquerie résulta sa chute de la branche où elle dormait. Une dégringolade de près de deux mètres qui ne fut amortie qu'au tout dernier moment par un réflexe aérien. Elle s'effondra à l'horizontale, le nez dans un tapis de feuillage en décomposition et de mousse. En gémissant, elle se frotta le visage dont la peau rougissait de quelques égratignures. Un animal plus dense, pensa-t-elle toutefois, outrepassant son malheur, se serait fait bien plus mal. Encore un avantage d'avoir un corps adapté au vol, des os légers, et une bonne prise au vent ; bref, d'être une fée. Sitôt elle se fut relevée, constatant qu'elle n'était pas trempée, comme elle s'attendait à l'être après cette étrange aventure dans une salle remplie d'eau, elle se trouva d'humeur à sourire. Vraisemblablement, il ne s'agissait que d'un rêve de plus, destiné au panthéon des songes inexplicables. Ils étaient légion ces derniers temps, et le plus troublant était que la plupart des farfadets entretenaient des visions qui allaient dans le même sens. Enfin, celui-ci avait été d'une rare intensité. Quitter sa communauté avait dû lui chambouler un peu les idées.
Elie se dit qu'il était temps qu'elle réfléchisse à son périple, justement. Elle avait pris la précaution, avant de s’endormir, de marquer avec des graviers la direction opposée à celle de son bosquet natal, mais c'était là son seul instrument de navigation. Nord, sud, est, ouest, étaient des mots peu utilisés dans une communauté qui ne voyageait jamais. La boussole lui était parfaitement inconnue et il ne fallait pas d'avantage compter sur le soleil et les autres étoiles. Le principal soucis était qu'elle ignorait presque tout de la géographie de l'endroit, et jusqu'à l'existence, d'ailleurs, de la géographie. Elle savait simplement qu'un lac devait se trouver quelque part par là... avec une marge d'imprécision de fait elle-même plutôt imprécise... et pour tout réconfort la simple conviction que l'étendue d'eau était tellement grande qu'elle ne pouvait la rater. Elle n'y avait été qu'une unique fois, cela faisait avait déjà plusieurs années, pour la petite cérémonie tribale qui accompagnait la découverte du pouvoir propre à chacun. Elle se souvint avoir pris la forme d'un raton, ce jour-là, car c'était le seul animal qu'elle avait pu attraper.
Elle se remit à voler, une fois rendue là-bas, elle trouverait bien quelqu'un pour l'aiguiller.
La végétation changeait. Elle passa au-dessus d'une étendue de ronces particulièrement épaisses, puis rejoignit un nouvel espace boisé. A mesure qu'elle y avançait, les arbres devenaient plus hauts, mais également plus espacés. Parfois même, ils semblaient s'être écartés pour laisse cheminer à travers la forêt de longs couloirs de terre nue.
C'est si facile de parcourir le monde ! Pourquoi personne n'a essayé avant ?
Le soleil commençait à décliner, et quoique son dos commençait à peser, Elie avalait toujours vaillamment les kilomètres. Elle fut alors prise d'une angoisse. Et si elle s'était complètement trompée de direction ? Pendant combien de jours pouvait-elle encore continuer ainsi sans se rendre compte de son erreur ? La terre, de ce côté, était-elle infinie ? N'avait-elle pas raté les humains pour tomber dans la gueule d'un peuple de démons tout droit sortis d'un cauchemar ? Ce gros sac de cuir, qui gisait sur le sol, n'était-il pas un de leur piège ?
Ses mauvaises pensées comme son allure s'arrêtèrent brusquement. Elle venait de repérer, entre deux amas de brindilles, une sorte de bourse qui faisait à peu près sa taille, maintenue fermée par un simple cordon. La fée s'en approcha prudemment. Elle jeta un regard circulaire autour d'elle. Personne. Elle se jeta vivement sur la sacoche, comme si elle allait disparaître d'un moment à l'autre. Précautionneusement, elle écarta les rebords, et pencha la tête pour en identifier le contenu : des disques de métal qui scintillaient à la lumière jaunâtre de la fin d'après-midi. Il y en avait plusieurs couleurs, certaines donnaient dans les dorés, d'autre dans les argents. De la monnaie ! Sans savoir vraiment quelle était leur valeur, il lui apparut clairement que celle-ci devait être importante.
Son prochain objectif était donc fixé, il s'agissait bien de transporter ce trésor avec elle. Mais encore fallait-il le soulever du sol. Elle banda les muscles de ses ailes et de ses bras, et tira vers le haut. Elle dût réussir à décoller d'un bon centimètre avant de retomber lourdement. HRP : La bourse peut-être ou non à votre personnage, c'est au choix. Considérez que la scène se situe sur le bord d'une route qui mène au lac, plutôt proche. |
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Jeu 03 Nov 2011, 02:54 | |
| - Spoiler:
Bonjour, bonjour. Alors voilà, j'ai voulut lire rapidement ce que tu avais écrit, juste par curiosité... je me suis retrouvée à la fin du texte avec un grand sourire aux lèvres. Très belle écriture Du coup, je débarque !
Une légère bise ridait la surface du lac, faisant miroiter les crêtes des vaguelettes, et poussait jusqu’aux rives où elle caressait les herbes sauvages avant de venir bruire dans le feuillage rougeoyant de l’automne. L’astre déclinait doucement au-dessus de la forêt, plongeant vers un horizon qui se teintait d’oranges et de roses. Il glissait péniblement ses rayons au travers des nuages pour leur faire lécher la terre qui suppliait pour un peu de sa chaleur. Car depuis près d’une lune, l’été et ses nuits douces avaient cessés d’être. Les animaux avaient élevés leurs petits en hâte pour qu’ils soient prêt à affronter l’hiver qui, rude et implacable, s’abattrait bientôt sur la région. Mais pas encore, pour l’heure il était temps de faire ses réserves, à chacun sa méthode. L’écureuil amassait des trésors dans des cachettes connues de lui seul, l’ours se goinfrait pour se vêtir de graisse aussi isolante que nutritive et les hommes emplissaient leurs greniers de poissons et de céréales des dernières récoltes.
Un nouveau souffle balaya l’étendue d’eau et vint faire frissonner Balsa qui se tenait sur la rive, nue comme au premier jour à ceci près qu’elle portait un anneau à son majeur droit. Des gouttes ruisselaient encore le long de ses cheveux, sur ses épaules et son échine, lui infligeant la morsure du froid naissant de cette fin d’après-midi. Elle avait passé une bonne partie de la journée à s’entraîner à l’usage de ses dons et la pratique de la lance pour finir en sueur et épuisée. L’idée d’une baignade l’avait dès lors prise comme une évidence. La nage, la sensation vivifiante de l’onde sur sa peau et la fraicheur recherchée avaient été un régal. Mais s’extraire du liquide et attendre de sécher à la maigre chaleur du soleil était une autre affaire. Ca ira comme ça, conclut-elle en essorant une dernière fois sa chevelure avant de passer ses vêtements, robe de lin et veste en peau de mouton. Elle récupéra la lance qu’elle avait appuyée contre un arbre, constata navrée à quelle point la lame en était émoussée et se mit en route vers ce qui serait son campement pour la nuit et où elle avait laissé le reste de ses affaires.
Sous la plante de ses pieds nus, la plage de galet se fit herbe jaunit, sentier de terre battu et enfin chemin forestier aux odeurs d’humus et de champignons. Champignons oui… je devrais en trouver pour ce soir. Son pas était vif, cependant son regard courait de droite à gauche à la recherche d’un repas que son estomac réclamait à grand renfort de gargouillements. Elle en trouva quelques uns, au pied d’une souche, mais leur allure rabougrie ne lui inspira qu’une grimace avant qu’elle ne s’en détourne. D’autres un peu plus loin avaient d’ores et déjà été grignotés par quelque daim aussi affamé qu’elle. On est tous dans la même galère…
Ce n’était pas tout à fait vrai, car si elle allait comme les animaux là où bon lui semblait, sa liberté était toute relative. Comme cela faisait maintenant plusieurs mois qu’elle rodait dans les environs, il allait de soi qu’elle avait écumé chaque village et chaque baraquement de pêcheur, volant de si de là un peu de nourriture, de quoi s’habiller et chaque pièce qu’elle trouvait. Et cela faisait d’elle, sans que personne n’ait pu dire à quoi elle ressemblait, un parasite plus que malvenu. Elle s’appliquait donc à rester le plus loin possible des habitations, vivotant dans la forêt. Les semaines passant l’avaient vu s’amaigrir fortement, mais les muscles qu’elle s’échinait à développer enrobaient un tant soit peu ses os et lui conservait une apparence ferme et solide.
Les cernes sous ses yeux ne mentaient pourtant pas, elle était loin d’être au meilleur de sa forme. Si je m’étais pointée dans cet état à la frontière… quoique j’ai plus d’entraînement, mais tellement moins de forces. Elle ne cessait depuis cet épisode fâcheux de ressasser les événements et de s’accabler sur sa faiblesse. L’échange de passes qu’elle avait eut avec l’elfe Lunielle et la victoire qui s’en était écoulée ne suffisait pas à lui remonter le moral. Je dois être forte, plus forte si je veux survivre. Comme si le monde entier lui était hostile, elle n’avait plus en tête que cette idée : gagner en puissance. Et il ne faisait pour elle aucun doute que cela passait par une maîtrise totale de la foudre qu’elle générait, en plus de ses capacités à manier la lance. Celle-ci reposait en son milieu sur son épaule droite et elle en tenait l’extrémité de sa main, gardant l’arme en équilibre le plus possible pour ménager son effort.
Quand elle passa le sommet d’une butte surélevée au faite de laquelle on pouvait discerner une partie de l’immense étendue du lac, elle sut qu’elle était presque arrivée. Sans avoir trouvé le moindre champignon cependant, mais l’idée lui avait quelque peu échappé. Elle avait hâte d’arriver, de trouver la couverture enroulée dans son sac de cuir et de pouvoir vérifier… Non ! Il faut que j’arrête d’être parano avec ça ! Elle dévala la pente en de longues foulées félines et tint une allure soutenue à partir de la courbe que décrivait là le chemin. Encore quelque pas et elle y serait.
- Spoiler:
Je m'arrête ici. Comme Balsa est surement bruyante au point que Elie l'entende arriver, je voulais te laisser la liberté de la faire se cacher ou venir se présenter. Hâte de savoir ce qu'elle va choisir
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| | | *Fée*
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Ven 04 Nov 2011, 21:01 | |
| -Foutue saloperie de monnaie humaine ! s'exclama la fée après une énième tentative qui lui avait encore davantage endolori le dos.
L'idéal, évidemment, aurait été de prendre la forme d'un animal assez puissant pour convoyer la bourse. Hélas, c'était une opération qui nécessitait un contact, donc qu'une bête répondant à ces critères se trouve à proximité. Or ce n'était pas le cas : pas la moindre bestiole plus grosse qu'un insecte en vue. Il restait la possibilité de partir en chercher une, mais cela impliquait de laisser le trésor sans surveillance. Une éventualité qu'elle n'envisageait même pas, outre le fait que la poursuite n'était pas si facile, même avec des ailes. L'engourdissement qu'elle ressentait dans celles-ci acheva de lui enlever toute envie de traque. Quelle que fut la solution considérée, elle semblait mauvaise. Fallait-il abandonner le butin maintenant, ou rester avec lui encore un peu ? Les séparations n'en seraient que plus difficiles, songea-t-elle avec tristesse.
Un bruit de pas interrompit sa réflexion tout en résolvant du même coup son dilemme. Si elle ne pouvait pas aller à son substrat de métamorphose, alors son substrat viendrait à elle. Surtout qu'à en croire les bruissements des feuilles mortes, il se rapprochait déjà. Elie, qui avait les yeux aussi efficaces que les oreilles, l’aperçu même bientôt. Probablement avant que cela soit réciproque d'ailleurs, la créature étant une véritable montagne. Elle n'avait jamais vu un être aussi grand. Bien sûr, il y avait quelques histoires sur des animaux appelés ''ours'', dans sa forêt, mais elle n'en avait jamais croisé. De toute façon, elle ne croyait pas qu'il existât une bête plus grande que celle qui était devant-elle. Celle qui se nommait humain. Elie sentit son cœur s'accélérer brutalement. Etait-il dangereux ? Pas plus que ça, se rassura-t-elle, se rappelant qu'une femme de cette taille avait pris part à son accouchement.
La peur est le fruit de l'ignorance se martela-t-elle, comme elle l'avait entendu souvent dans la bouche de son frère. Elle prit à toute vitesse note des éléments qu'elle pouvait observer et tenta de les interpréter le plus rapidement possible. Les mamelles proéminentes et la masse capillaire indiquaient qu'il s'agissait vraisemblablement d'une femelle. L'absence de rides, et la couleur des cheveux, d'un individu jeune (elle crut apercevoir une queue, mais fronça les sourcils et l'ignora, peu sûre d'elle). La démarche énergétique témoignait d'une bonne forme physique. La pique sur l'épaule, d'une fonction de chasseur.
Aie. Ne pas paniquer. Il, enfin, elle, ne chasse probablement pas les fées. Son outillage est trop massif. Elle ne m'aura jamais avec ce gros machin de métal.
Fallait-il fuir malgré tout, si près du but ? La combattante avait beau être massive, après une métamorphose, elles seraient toute deux à la même taille. Et au fond, si elle était venue jusqu'ici, n'était-ce pas pour rencontrer des hommes ? Elle pesta d'avoir ressentit tant d'appréhension, au cœur de l'excitation furieuse du premier contact. Elle ne devait pas se laisser refroidir par l'apparence un peu hostile du spécimen. Que vaudrait l'aventure si elle était sans risque ?
-Hé ! L'humaine ! Si tu viens par là... elle chercha frénétiquement une récompense, puis souleva à bout de bras une pièce parmi les moins reluisantes. ...je te donne ça !
Un mal nécessaire : il lui semblait impossible qu'on refuse de satisfaire une requête aussi simple contre une si merveilleuse contrepartie. L'alléchante rémunération, à n'en point douter, tuerait dans l’œuf tout soupçon infondé. |
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Sam 05 Nov 2011, 20:45 | |
| Le chemin se déroulait sous pieds et bientôt les arbres s’ouvrirent sur la petite clairière où elle avait laissé ses affaires. Un petit coin tranquille, où il n’était pas censé y avoir de passage. Sauf que apparemment si, puisqu’une créature se tenait là. Une minuscule et frêle créature ailée, voletant à quelques pouces au-dessus du sol. Les ailes qu’elle arborait interdirent tout doute à Balsa quant à son espèce, c’était une fée à l’évidence. Une seconde un bref rictus étira ses lèvres alors qu’elle se rappelait sa première rencontre avec cette espèce, quelque un an et demi plus tôt… et, coïncidence ? dans la même région.
Le sourire se dissipa bien vite cependant, au profit d’un examen plus approfondi de la toute petite chose qui se tenait là. Des cheveux longs, bien qu’ils ne fassent guère plus de quelques centimètres, d’un roux assorti à la couleur de ses yeux. Les ailes de papillon accrochées à son dos étaient dans les mêmes tons, tout cela intégrant une harmonie d’oranges et de bruns qu’on ne pouvait trouver que charmante. Sauf que Balsa n’en avait strictement rien à faire de la beauté éventuelle de ceux qui se dressaient devant elle. D’autant que celle-ci se tenait, et ce n’était surement pas un hasard, juste au-dessus de sa bourse. Elle allait cracher un « fiche le camp d’ici qu’est-ce que tu crois faire ?! » mais elle ravala ses propos, jugeant beaucoup plus intéressant de voir ce que la fée allait dire d’elle-même. Si elle avait un brin de bon sens, elle allait filer avant de piper mot. Mais la chimère espérait plus que ça. A défaut d’un combat intéressant, elle espérait au moins quelques minutes de divertissement.
- Hé ! L'humaine !
Un frisson remonta tout le long de l’échine de Balsa. Humaine ?... Je vais la tuer ! La longue queue féline fouetta l’air derrière elle, d’agacement et comme pour bien montrer qu’elle n’était pas de cette espèce. Sans doute la petite créature ne l’avait pas fait exprès, pourtant elle avait employé le terme le plus insultant qu’il soit pour la chimère. Je suis pas humaine, tête de nœud ! ouvre les yeux pour voir et refais-la moi sans trembler des genoux si tu l’oses !
- Si tu viens par là... je te donne ça !
Alors ça… La colère qui s’était vraisemblablement imprimée sur le visage de Balsa se changea en une moue d’incrédulité totale. Sa bouche s’était-elle même entre-ouverte de stupéfaction ? Elle avait imaginé toutes sortes de réactions de la fée à son encontre : excuses, peur, supplications, simple bonjour… mais ça ? Impossible de prévoir tant d’audace. Elle avait beau avoir moins d’un demi-pied de haut, elle n’avait pas froid aux yeux. Soit elle était totalement inconsciente, soit elle tentait désespérément de bluffer. Quoiqu’il en soit, ce choix de salutation qui avait mit Balsa dans tous ces états la faisait à présent tressauter. Elle eut un petit rire nerveux, suivit d’un second, puis elle éclata :
- Hahahaha ! Sérieusement ? Hahaha ! Attends, une seconde… haha… tu comptes donc me payer avec, hahaha ! non tu plaisantes ? euh… mon argent ?
Son rire s’arrêta net et elle fixa la fée d’un regard des plus mauvais, sourire large découvrant toutes ses dents. La lance en équilibre sur son épaule vint s’abattre violemment sur le sol, animée du mouvement de sa seule main droite. Elle poussa ensuite un long soupir. Non, décidemment, engager un combat contre cette frêle créature n’aurait rien à apporter et la victoire n’aurait aucune saveur. Et puis, pourquoi au juste elle veut que je m’approche ? Etait-il possible que tout cela ne soit qu’un piège. D’un œil méfiant Balsa balaya les environs, ses narines brassèrent quelques bouffées d’air en tentant d’en analyser les odeurs et elle tendit les oreilles à la recherche d’un bruit suspect. Mais rien.
- Bon… Oublions ça. Tu veux que je m’approche hein ?
Il était à noter que la chimère avait dès le départ utilisé le tutoiement, ce qui allait à l’encontre de ses habitudes. Et la raison n’était pas que la fée avait elle-même utilisée cette personne, car Balsa était plutôt du genre à faire comprendre à ceux qui l’abordaient de la sorte qu’elle trouvait cela plus que malvenu. Cette fois-ci cependant, elle tutoyait. Peut-être parce que la créature devant elle était si petite. Ou sans doute parce que l’affront porté était trop grand pour qu’elle ne mérite le respect. Affront qui n’avait rien à voir avec l’or, au passage.
- Soit ! Tu m’as fait rire, c’est pas souvent, pour ça je te pardonne d’avoir tenter de m’acheter avec mon or…
Elle parcourra la distance qui l’amena jusque face à l’inconnue et d’un geste vif elle pointa sa lame en direction de la créature voletant devant elle.
- En revanche, appelle-moi encore une fois humaine et je trouverai le moyen de t’arracher tes jolies petites ailes.
Entendre toute la méchanceté jaillir de sa propre bouche fit esquisser à Balsa un mouvement de recul, et elle baissa un tant soit peu sa lame. Le battement rapide et incessant des ailes de la petite créature l’agaçait un peu et ses nerfs étant déjà bien à vif par cette rencontre inattendue, elle conseilla :
- Pose toi donc.
Elle-même s’assit en tailleur sur le sol, posant sa lance à côté d’elle pour ne plus menacer l’inconnue.
- Recommençons du début, tu es… ?
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Dim 06 Nov 2011, 04:07 | |
| Avec un air soucieux, les lèvres pincées et arrondies, Elie admira, immobile, l'avancée sensationnelle de la géante. La terre tremblait presque sous les pas de la titanide. Elle semblait réellement furieuse, mais la fée ignorait totalement pourquoi. Après tout, peut-être était-ce là un état normal, peut-être n'étaient-ils pas capables de déployer le même panel d'expressions subtiles. Elle hésita à déguerpir, guettant chacun de ses mouvements, s'attendant à la voir charger brusquement à la manière d'un sanglier. Le tas d'or qui était toujours en dessous d'elle suffisait néanmoins encore à modérer la crainte quant à l'attitude peu amicale de l'humaine. Elle se trouvait à nouveau captivée par la présence incontestable d'un danger immédiat, à l'instar de sa fascination presque morbide pour le feu.
La face de la chasseuse changea rapidement du tout au tout et elle parut adopter l'amusement, hachant ses rires de mots prononcés avec un accent horrible. Elle parlait bien la même langue qu'elle, mais celle-ci était comme déformée. La fée n'avait jamais entendu ça auparavant et cela gêna momentanément sa compréhension. Elle fronça prudemment les sourcils en éludant le sens des dires de son interlocutrice. Alors comme cela, elle jouait la cynique, imperméable au payement qui lui était proposé... Non ! C'était pire, elle prétendait que les pièces étaient à elle ! Pour qui se prenait-elle ? Ça n'allait sûrement pas se passer comme ça. Elie ne montra toutefois aucun signe de son intense frustration qu'un regard encore plus méfiant. Elle se contenta en outre de rester sur place, telle une mère défendant sa progéniture, prête à bondir si on tentait de la lui dérober. Elle ne répondit pas aux questions, qui de toute façon, étaient uniquement rhétoriques, et s’enchaînaient à un rythme posé. Elle contempla l'arme gigantesque s’abattre sur le sol, soulevant la poussière : était-ce une déclaration de guerre ? Surtout, allait-elle venir, ou pas ?
Alors que la fée commençait à s'impatienter, ce qui arrivait après un laps de temps généralement assez court, l'humaine reprit sa marche en avant... et l'intimida soudainement sa pique, ce qui entraîna une manœuvre d'esquive horizontale peu préparée. La phrase qui suivi fut enrichissante quoique mystérieuse. Voilà donc d'où venait son mystérieux courroux, d'un simple quiproquo. Mais si elle n'était pas humaine, alors, qu'est-ce qu'elle était ? Ou les humains n'appréciaient peut-être pas d'être désignés par leur race. C'est vrai, Elie pouvait les comprendre, il n'y avait pas grand-chose de glorieux dans leur état de grosse chose bipède collé au sol. La menace qui avait suivi était d'ailleurs cohérente, puisqu'elle projetait de lui arracher les ailes, en cas de récidive. La jalousie était une réponse probable à ce comportement étrange. En cela, les hommes ressemblaient donc aux lutins, qui n'ayant pas la noblesse aérienne des fées, cherchent à tout prix à les imiter. Ils avaient juste une démarche inverse. Ça aurait été royaume d'aveugles et de voyants que certains auraient voulu devenir voyants, tandis que d'autres auraient désiré que les voyants deviennent aveugles. Un élément venait cependant contredire cette brillante thèse. La chasseresse possédait une queue, et il ne lui semblait pas que dans le cas général les humains en aient une, mais c'était difficile à vérifier. Sa communauté n'en avait pas vus depuis si longtemps qu'elle avait pu oublier ce détail. Aussi sophistiquées fussent-elles, ces explications ralentissaient à peine les sueurs froides qui commençaient à lui venir.
Bienheureusement, la vexation fut brève, et bientôt, la géante s'assit sur le sol, déposant sa lance en signe de paix. Du moins, Elie l'espérait. Elle consentit à accéder à la requête qui lui était faite, et avec panache, ses pieds nus atterrirent sur le sol. Si le contact de sa peau avec la terre n'était pas très agréable, elle considéra que c'était un bon début pour que la pseudo-humaine ne se sente pas inférieure à elle. Elle était en effet incapable de marcher longtemps, et la posture debout, en elle-même, finissait par lui causer des crampes, la faute aux muscles de ses jambes qui étaient bien moins imposants et entraînés que si elle avait appartenu à une espèce terrestre. La légèreté nécessaire au vol avait un prix. Au moins, ça soulagerait un peu son dos. Elle leva la tête vers le ciel, son seul objectif étant pourtant simplement d’apercevoir les yeux de son interlocutrice.
-... une fée. J'viens de hyper loin. Ça fait un bout de temps que je parcours le monde, et j'en ai jamais des vues, des comme toi. Enfin, des aussi grandes que toi. Elle marqua une pause, prit ses précautions, et continua avec un ton retenu : t'es pas un ours du coup non plus alors ? Non, non. Ça doit pas être ça, les ours parlent pas je crois... Ouais... alors, je sais pas ce que t'es. Mais si tu connais pas les fées, je te préviens, nous sommes de puissants magiciens. Alors, t'es qui toi ? Elle renchérit directement. Hé, sinon, moi, c'est Elie. L'aventurière. La pionnière. L'exploratrice. La voyageuse. La migratrice. L'arpenteuse. Tout ça.
Détendue par le son de sa propre voix, qui sonnait à ses oreilles comme une divine et réconfortante mélodie, elle trouva le courage de se rapprocher davantage, pas à pas. Il ne devait plus rester qu'un centimètre entre elle et la pointe du genou de la géante. Une envolée brusque, et elle pouvait espérer toucher un pan de sa peau laissée à découvert avant qu'elle ait pu réagir. Néanmoins, ce n'était pas nécessaire pour le moment. Elle remarqua pertinemment que la conversation n'était pas revenue sur la bourse. Si elle réussissait à la détourner suffisamment longtemps, peut-être l'oublierait-elle. Elle mobilisa toute sa force de commérage en ce but.
-Mais je n'ai jamais rencontré d'humains. Tu n'as pas l'air de trop les aimer, non ? Ils sont pas cool ? Moi on m'en a dit du bien. C'est aussi pour ça que je suis partie ! J'ai appris qu'ils avaient un merveilleux village qui s'appelle Railor. Oh, ça peut pas être aussi bien que les villages fées, bien sûr, mais ça peut être intéressant. J'veux dire, ils sont si maladroits, c'est déjà extraordinaire qu'ils arrivent à faire des trucs avec leurs mains, non ? NB : Elie (comme Balsa, je suppose) ne possède pas d'accent très prononcé. Mais étant habituée à une zone très isolée, où l'accent est exactement le même partout, la différence lui semble très importante. |
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Dim 06 Nov 2011, 17:40 | |
| La petite chose descendit en altitude : ses pieds minuscules se posèrent au sol tandis que ses ailes cessaient de battre furieusement l’air. Voila qui était plus reposant pour les rétines de Balsa et son agacement se dissipa, en partie tout du moins. Parce qu’il y avait toujours un je-ne-sais-quoi dans l’allure de la fée, dans le pétillement de son regard et sa posture trop confiante pour un être si faible qui enquiquinait la chimère. Sans qu’aucune menace apparente n’émane de l’inconnue, il y avait dans l’air une senteur de piège qui maintenait la méfiance au premier rang des attitudes à adopter.
La fée ne semblait pas vraiment apeurée et son histoire qui s’étirait en longueur en était bien la preuve. Elle donnait l’impression de penser tout haut, ne prononçant ces mots que pour le plaisir de les entendre. Elle se laissa divaguer à parler d’ours, ce qui souleva un sourcil de Balsa, avant d’interroger celle-ci sur son identité… sans lui laisser une seule seconde pour répondre. Et d’enchainer avec sa propre introduction, d’un ton si excessif qu’il en était risible. Tant de substantifs pour une si frêle créature, cette présentation pompeuse hérissa la chimère. Elle peut se dire aventurière, elle n’est pas pionnière, ça c’est certain ! Comment c’était son nom ? Lisa ? non... Alice ? Alissia !... ou un truc du genre… La chimère ne se forcerait pas à retenir la ribambelle de titres dont la fée s’affublait. Son nom serait suffisant : Elie, donc.
Quelque chose clochait cependant… mine du rien, cette Elie était en train de s’approcher. Probablement pour l’examiner, puisqu’elle semblait si curieuse concernant sa nature. Mais la peine qu’elle se donnait pour avancer l’air de rien laissait croire qu’il y avait une raison bien moins honnête derrière cette manœuvre. Raison que Balsa n’arrivait pas à saisir, ce qui lui donnait envie de redoubler de prudence. Seulement une créature de quelques pouces n’avait absolument rien de menaçant. La magie que la fée n’avait pas dissimulée maîtriser ne pouvait pas être bien puissante. Celle de l’autre fée, Alissia, se résumait en tout et pour tout à la capacité de chauffer ce qu’elle touchait de ses mains… Oh ? Alors comme ça tu comptes me faire un truc du genre hein ? Ben vas-y approche, touche-moi pour… merde ! Elle jeta les doigts main droite autour de son majeur droit pour en arracher l’anneau qu’elle portait. Il était rare qu’elle le porte, et ne l’avait mit que pour se baigner sans sentir l’électricité conduite par l’eau la secouer et mettre sur le dos, ventre à l’air, tous les poissons qui passeraient à proximité. L’anneau enlevé, elle plongea une main dans la poche de son manteau pour en tirer une chaînette, qu’elle fit passer dans le creux du bijou avant de se l’attacher autour du cou. La fin de sa manipulation coïncida avec la fin des piaillements de la fée, dont elle n’avait écouté la teneur que d’une oreille distraite, guère intéressée par des suppositions sur les villages humains et l’existence de villages fées.
- Oui, oui, oui, sans doute. Si tu veux te rendre à Reilor, faut viser plein sud et longer la côté vers l’est quand tu trouveras l’océan.
Sur ce conseil qu’elle se trouva bien généreuse de donner, Balsa se leva brusquement et se dirigea vers son sac de cuir. Avoir titillé son anneau, après s'être adjuré d'être prudente, lui avait rappelé à l’esprit l’existence de l’autre amulette. Objet qu’elle détestait de tout son être, pour le lien qu’il créait en elle et son maître, mais pour lequel elle ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter. Glissant le poing à travers l’ouverture du sac, elle n’eut pas à farfouiller bien longtemps pour ses doigts se posent sur la surface osseuse du crâne, extirpant un soupir de soulagement à la chimère. Elle referma son paquetage et passa la lanière en bandoulière en se tournant vers Elie.
- Je suppose que tu comptais piquer mon or d’une façon ou d’une autre. Belle tentative. Tu n’aurais pas été si faible que ça aurait été une réussite. Dommage pour toi. Maintenant je peux le récupérer ?
Bien sur qu’elle le pouvait, la force qu’elle devrait employer serait dérisoire pour prendre la bourse à ce moustique effronté. Seulement, encore une fois, la victoire n’aurait pas de saveur. Observer la réaction de la fée et voir jusqu’où elle serait vaillante était on ne peut plus amusant. Elle s’approcha de la fée et tendit la main avec un regard interrogateur. Qu’elle laissa tomber tous deux en poursuivant :
- J’ai pas bien comprit au juste pourquoi tu voulais que j’approche. Ah, curiosité ! toi seule sait faire taire la méfiance. Si tu veux quelque chose, vaut mieux le demander franchement. Entre voleuses, qui sait ? peut-être bien que je te répondrais.
Car la tentative de vol de Elie tendait à la faire apprécier de Balsa bien plus qu’elle n’était contrariante. D’autant que les pièces humaines n’avaient guère de valeur pour qui vivait en sauvage dans la nature.
- Peut-être bien aussi qu’en retour j’aurais des questions pour toi. Ah et, mon nom est Balsa. Et je doute que ça t’aide franchement mais, je suis une chimère.
Dernière édition par Balsa le Mar 07 Fév 2012, 18:17, édité 1 fois |
| | | *Fée*
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Mar 08 Nov 2011, 00:18 | |
| Je me demande si cet anneau aurait de la valeur dans la ville des humains...
Les pensées de la fée voguaient doucement alors qu'elle finissait sa dernière phrase sans trop y penser. Elle-même avait fini par se perdre dans son propre monologue, et y prêtait sur la fin moins d'attention qu'aux bijoux, chaîne et bague, de la grande. Elle était bien incapable, encore une fois, de dire en quel métal ils étaient faits. Néanmoins, ce genre de trésor attirait toujours sa convoitise, n'eut ce t-il qu'un prix hypothétique. Elle les fixa intensément avant qu'ils disparaissent dans le col de la titanide. Elle eut un peu honte de penser à les lui voler quand elle lui indiqua la direction à prendre, mais n'en fit pas grande affaire. Après tout, la propriété n'était qu'une convention entre humains. Elle ne la connaissait que parce qu'on le lui en avait un peu parlé, en même temps que la monnaie. Dans sa communauté, nulle possession, chacun utilisait ce dont il avait besoin. Aussi Elie avait-elle une notion un peu extrême du partage : elle était habituée à prendre ce qu'elle voulait quand elle le voulait. Ils étaient en effet tellement peu que les cas où deux lutins convoitaient le même objet étaient rares.
Elle redécolla dès que la femme se fut levée. Végéter sur le sol, face à un être qui la surplombait de plus d'un mètre et demi avait finalement un quelque chose de dérangeant. Elle examina, soucieuse, chacune des actions de son interlocutrice, ses yeux se posant sur l'énorme sac de peau dans lequel elle fouillait. Lui vint l'idée folle que lui aussi soit plein d'or. C'était bien connu, les humains, ou tout ce qui y ressemblait, de plus ou moins loin, croulaient sous son poids. Hélas, elle doutait qu'on la laisse se saisir de celui là. Ne lui restait qu'à protéger son cher pécule contre le brigandage de la grande.
La fée avait tenté de se contrôler jusque là, mais l'une des phrases la fit sortir de ses gonds de politesse et de sympathie. La moutarde lui monta au nez. Comment pouvait-on être aussi injuste ? Elle se retint encore quelques secondes, bouillant intérieurement, pour voir ce qu'on avait à lui dire. L'intonation avait beau être plutôt amicale, elle n'embastillait plus son ire.
-Non, désolée. J'pense que j'vais le garder, répliqua-t-elle sèchement en se positionnant à moins de deux pouces des yeux de la géante. J'vois pas pourquoi il serait plus à toi qu'à moi. Y'a pas ton nom écrit d'sus. Et c'est moi qui l'ai trouvé.
Après tout, elle ne voyait qu'une seule voleuse ici, et ce n'était certainement pas elle. Si la titanide voulait absolument avoir une bourse, il devait y en avoir plein d'autres qui traînaient sur les chemins. Pourquoi la harcelait-elle ainsi ? Parce qu'elle était plus grande ? Elie ne voyait que ça. Elle commençait à comprendre la mentalité aliénée des humains et compagnie, et la trouvait inique. Cette Balsa allait voir de quel point pouvait se chauffer une fée. Elle ne pourrait plus utiliser cet argument vexant, et surtout profondément injuste.
-Une chimère hein ? Jamais entendu parler. Ça a l'air cool. 'faut que je teste.
Ces bonnes paroles, lancées non plus durement, mais sur le ton du défi, furent le point de départ d'une action vive et bien coordonnée. D'un geste fluide, la fée passa rapidement les mains dans son dos. Elle dénoua alors la lanière retenant son seul vêtement, qui glissa, révélant un corps blanc presque entièrement parsemé de tâches de rousseurs. La tunique de petites tiges vraisemblablement tressées chut lentement au sol, à peine plus lourde que l'air. L'habit était d'une facture si délicate qu'il était impossible, même pour le plus doué des tailleurs humains, d'espérer en faire un semblable. Un des magnifiques ouvrages de sa mère, dont c'était le pouvoir et la spécialité. C'était le seul qu'elle avait prise, aussi ne voulait-elle pas le briser, ce qui se passerait si elle ne l'enlevait pas. L'aventurière jeta un regard intrépide à la chimère. Elle se réjouissait de la stupeur que la manœuvre avait déjà du provoquer chez la grande, et se demandait avec enthousiasme comment elle-même allait se sentir dans cette nouvelle enveloppe. Cela faisait une éternité qu'elle n'avait plus eu de queue, et celle-là paraissait particulièrement agile. La carrure était athlétique, et laissait présager de bonnes capacités physiques. Les marques sur le visage étaient intrigantes, mais le tout était plutôt harmonieux. L'ensemble avait l'air plaisant, si l'on oubliait la taille, qui était toutefois le seul véritable intérêt de la métamorphose.
Sans plus y réfléchir, elle bondit en avant, touchant du plat de la main la figure de la chimère.
-Wouharrr...
L'enchaînement qui suivi ne lui laissa pas la moindre chance de réagir, et fut assez confus. Extérieurement, son corps grandit presque immédiatement jusqu'à atteindre environ un mètre, puis, pris de spasmes violents, se ratatinât aussi vite, et fut jeté en arrière. Intérieurement, Elie perçu en une fraction de seconde une intense chaleur. Puis elle se rendit compte que c'était une moindre conséquence, et que tous les muscles de son corps s'étaient raidis, causant de multiples douleurs. Brusquement, ses ongles s'enfoncèrent jusqu'au sang dans ses paumes, ses paupières se serrèrent tant que ses yeux furent compressés, sa tête s'enroula contre son torse, sphincters et vessies se relâchèrent, ses jambes ses recroquevillèrent et ses talons virent frapper violemment le bas de son dos. Pire, sa respiration était bloquée, s'étouffant, et son cœur dans sa poitrine, ayant perdu la raison, cognait comme s'il voulait s'en extraire. Elle jeta un second regard, paniqué, incrédule, avant que son mal de crâne assourdissant ne laisse place à un néant complet. |
| | | =Aïkologue=
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Mar 08 Nov 2011, 18:43 | |
| La réponse était aussi claire qu’inattendue : non, Elie ne rendrait pas l’or. Balsa en resta pantoise, ne sachant pas s’il fallait rire à cette blague grossière ou écraser la fée comme un vulgaire moustique entre ses mains pour lui montrer que si, elle allait récupérer sa bourse de toute façon. Le ton suffisant et tellement sûr d’elle de la créature faisait monter une colère rageuse dans les entrailles de la chimère. Elle avait une folle envie de lui montrer à quel point c’était stupide que de lui tenir tête. Envie de la remettre à sa place, faible soumise face à la puissante. Envie de lui faire gouter à la foudre qui grondait dans ses veines et vrillait chacun de ses nerfs. Cependant, toute inconsciente de sa situation que la fée semblait être, elle avait raison sur un point : les pièces ne pouvait pas être considérées comme la propriété de Balsa. Mais celle-ci aurait bien eu du mal a accepté cette vérité, une fois volé, elle considérait l’or, ou tout autre bien, comme sien.
Elie papillonnait avec un air malicieux qui révulsa la chimère. Ses lèvres s’ouvrirent à nouveau, changeant totalement de sujet comme si l’affaire était réglée – crois-moi, tu es loin d’avoir ton compte – pour lâcher une série de courtes phrases. Que la fée n’ait jamais entendu parler de son espèce n’étonna pas Balsa le moins du monde. Qu’elle trouve ça « cool » lui fit cracher un petit rire méprisant. Qu’elle veuille « tester » était une sacrée surprise ! Tester quoi ? ma main dans ta figure ? Bien sur qu’il ne s’agissait pas de cela.
Toute consciente qu’elle était de ce que « faut que je teste » ne voulait pas dire, Balsa était bien incapable d’imaginer ce que la fée sous-entendait. Et elle voulait savoir. La curiosité lui fit ravaler sa hargne et elle observa d’un œil attentif la suite des évènements. Seule l’extrémité de sa queue se balançant en mouvements saccadés trahissait son énervement profond. Tout se joua très rapidement. Un premier élément de surprise, Elie tombant son vêtement, figea la chimère dans une expression d’incrédulité. Un éclair traversa ensuite les minuscules pupilles qui s’étaient jetés sur elle, indice délicieux d’une attaque imminent. La chimère retint le sourire qui aurait barré son visage en trahissant son plein de confiance. Allez, viens, je t’attends ! Et la fée se rua sur elle, dirigeant son vol vers la tête.
Fermant les yeux par réflexe, Balsa ne put voir l’éclair glisser d’un corps à l’autre. Elle en sentit toutefois le picotement familier, qui persista tout au long du cri de la petite créature, et encore quelques seconde après. La douleur provoquée par la foudre saisissait toujours la chimère, cependant elle avait apprit à ne pas la craindre et même en ce moment elle l’appréciait. C’était sa puissance qui rayonnait, vive et violente. Cette puissance qu’elle avait longtemps appelée « malédiction » et qu’aujourd’hui elle nommait « don ». Et l’ironie voulait que cette puissance lui vienne de sa part de fée…
Savourant par avance sa victoire, Balsa ouvrit les paupières tout doucement. On fait toujours autant la maline ? Ce qu’elle vit n’était rien que d’autre que ce à quoi elle s’était attendu : le corps frêle de son assaillante, secoué de spasmes frénétiques, tombé au sol quelques pas devant elle. De la transformation avortée d’Elie, elle n’avait rien vu. Seul le spectacle des conséquences de l’imprudence de celle-ci s’étalait devant ses yeux. C’était satisfaisant, car enfin la fée avait cessé de déblatérer des propos outranciers et insensés. Mais la satisfaction se réduisit vite à peau de chagrin. C’était trop facile… et maintenant c’est plus drôle. En effet, la créature avait cessé de remuer et demeurait là, étendue sur le sol humide, sa bouche entrouverte laissant couler un filet de bave.
- Tu espérais quoi au juste ?
Il n’y eut pas de réponse. Alors Balsa alla ramasser sa bourse, la remua pour entendre le cliquetis des métaux s’entrechoquant, puis la fourra dans son sac. Qu’il manque une pièce ou deux, elle n’en avait cure. D’ailleurs, le rond de cuivre avec lequel Elie avait tenté de l’appâter était resté par terre. Un accès de bonté, un brin de pitié et une certaine volonté d’humiliation avaient fait choisir à la chimère d’offrir ce trésor ridicule à la fée. Pour le divertissement sans doute, si maigre fut-il. Elle ramassa ensuite sa lance et la jeta sur son épaule avant de se diriger au-dessus du corps électrocuté.
- Bougre d’idiote ! Te voila morte maintenant.
Un demi-tour en souplesse et la chimère se mit en marche. Pour toute persuadée qu’elle était d’avoir ôté la vie, ce crime la laissait de marbre. Les faibles ne devaient pas affronter les forts, ou bien ils devaient être prêts à en payer le prix. Il était loin le temps où elle respectait chaque être vivant sur cette terre. Elles étaient loin les leçons d’Akin sur la valeur de la vie et la différence entre Bien et Mal. Akin… Pourquoi repenser à lui en cet instant ? Balsa sentit peser sur elle le regard brillant de l’anubite, lourd de reproches et emprunt d’une déception immense.
Elle s’arrêta, quelque chose s’était nouée dans son estomac, sans qu’elle ait la moindre idée de la nature de ce sentiment. Elle pivota pour se tourner vers la fée gisant sur le sol. Puis revint sur ses pas. Arrivée à la hauteur du présumé cadavre, elle fit basculer la lance de son épaule et vint titiller de sa pointe émoussée le ventre d’Elie. Après tout, t’es peut-être pas morte… T’es peut-être pas si faible. Allez ! debout ! |
| | | *Fée*
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Mer 09 Nov 2011, 01:05 | |
| Je pense. Je me demande : J'ai eu mal. Je n'ai rien compris. Suis-je décédée ? Non. Je pense. Je vis. Je souffre.
Cette dernière constatation, bien plus puissante et réelle que les autres, déborda rapidement de sa réflexion, saturant toute sa pensée. Elle ne ressentait plus que de la douleur, juste de la douleur, et la seule envie qu'elle cesse, même si ça impliquait qu'elle meurt. Pourtant, un instinct de survie irrépressible fit éructer ses poumons bouillants. Cela faisait plus d’une minute qu'ils n'étaient plus approvisionnés en oxygène. La première tentative d'inspiration fut un échec. La seconde ne parvint qu'à la faire agoniser davantage. La troisième fut plus intense, et s'accompagna d'un redressement brutal de la cage thoracique. Elie toussa. Après plusieurs bouffées chaotiques, elle en prit une grande, puis parvint enfin à reprendre un rythme qui la rassura un peu. Elle ne sentait pas bien, mais elle pouvait enfin respirer à nouveau. Une action si anodine quand on en était pas privée. Déjà, elle était préoccupée par autre chose. Un discret son rauque sorti d'entre ses lèvres.
-Bon sang, merde...
L'impression d'avoir une infinité de crampes savamment réparties dans tout le corps l’assailli. La fée rouvrit les yeux non sans appréhension sur ce qu'elle allait découvrir. Il n'y avait rien, ou presque. Quelques contusions, quelques entailles, un peu partout, et une marque rouge cernée de noir, bien visible, à l'endroit du contact avec la chimère. Pourtant, elle n'inventait pas les contractures véhémentes qui la dissuadaient de faire le moindre geste superflu. Quasiment imperceptible, la pression de la pointe d'une lance sur son ventre la fit malgré tout réagir. Dans cet état pitoyable, on la menaçait encore. Elle n'était pas en état de se questionner plus. Elle n'avait plus envie de se battre. Elle abandonnait toutes les causes. La lame aurait pu la perforer qu'elle n'aurait plus rien objecté.
-Qu'est-ce tu veux... gémit-elle péniblement. Elle grimaça, même ses mâchoires étaient un supplice à ouvrir. ...c'est bon, tu peux la prendre.
Sa tête redescendit, se posant finalement sur le sol avec une douceur contrainte. Elie poussa un long soupir où se mêlait douleur et soulagement. Tant qu'elle ne bougeait pas, les crampes étaient minimes. Elle voyait les branches des arbres, et au-dessus, le ciel bleu, calme, immobile, apaisant. Elle tenta de se concentrer sur cette vision pour oublier toutes les autres désagréables. Une couche dense de larmes embuait encore ses yeux, une glaire claire ruisselait de ses narines. Elle était poisseuse de sueur, collante d'urine. Et elle n'avait plus la force d'y remédier.
-Ça m'était jamais arrivé avant, articula-t-elle, monocorde, avec un détachement surprenant. J'pensais pas avoir de limite. Pas sur ça. Je suis faible. Je sers à rien. Laisse-moi mourir.
Elle ferma les yeux, et soupira à nouveau. C'était la première fois que son pouvoir la trahissait. Et jamais il ne l'avait amochée à ce point. De quoi était donc faite une chimère pour que la transformation soit si préjudiciable ? Était-ce juste une histoire de taille ? Était-ce le signal douloureux de son incapacité à se métamorphoser en un humanoïde n'appartenant pas à sa race ? Ou Balsa n'était pas vraiment un animal ? Mais alors, qu'était-elle ? Quelque chose de divin ? C'était la seule explication plausible pour Elie, qui n'avait pourtant qu'une idée très vague de la divinité. Les lutins de chez-elle n'en vénérait pas, et seules quelques vieilles légendes en parlaient, faisant plutôt office de contes pour enfants. Elle ne les imaginait que comme des êtres tellement supérieurs que même elle ne pouvait rien contre-eux. Mais elle aurait juré que s'ils avaient existé, ils auraient des ailes. Hors la chimère n'en avait pas. La fée digéra difficilement l'information. Toutefois, il y avait une chose réconfortante en cela : elle pouvait bien se pardonner d'avoir été mise en échec par un dieu.
Très lentement, elle essaya de basculer sur le côté, puis sur le ventre. Elle fit vrombir lentement ses ailes. Étrangement, elles étaient à peine endolories. Probablement, pensa-t-elle, parce qu'elles avaient brièvement disparu, lors de la semi-métamorphose, n'étant pas un organe partagé avec Balsa. Ainsi, elle parvint à se décoller mollement du sol. Les séquelles du choc magique l'empêchaient par contre d'effectuer la moindre manœuvre, et elle fut obligée adopter un vol légèrement penché, la tête pendante. Méticuleusement, elle essuya son nez avec son avant-bras. L'hygiène n'était ni la plus grande préoccupation, ni la plus grande qualité des peuples de la forêt, mais il y avait tout de même une limite.
-Merde, je suis dégueulasse... Elle remarqua alors un détail qu'elle avait ignoré jusque là, et que la nécessité lui faisait relever : la géante avait les cheveux encore humides. Tu sais, euh, vous savez, enfin tu, vous... Euh, où est le lac ?
Elle s'étira patiemment, non sans une mimique de souffrance. Cela faisait plusieurs années qu'elle n'avait pas nagé dans un vrai bassin. Généralement, elle se transformait en une bête aquatique, pour être sûre de pas se noyer. Elle se contenterait de tremper sur le rebord. Son pouvoir l'effrayait maintenant beaucoup trop pour qu'elle songe à l'utiliser à nouveau. Il fallait mettre les choses au clair. Elle ne pouvait imaginer vivre sans ce merveilleux don.
-C'est quoi, exactement, une chimère ? Un genre de dieu ? |
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Mer 09 Nov 2011, 22:33 | |
| Un tressaillement ? Sur un si petit corps, difficile de dire… Mais quand il esquissa un nouveau mouvement, tout infime qu’il fut, Balsa sut qu’Elie était encore de ce monde. Elle en éprouva une sorte de soulagement qui la surprit un peu et le demi-sourire qu’elle imprima l’aurait surprise d’avantage si seulement elle avait pu le voir. La poitrine de la fée se souleva dans une saccade qui la fit tousser à s’arracher les poumons. La chimère ayant effacé son sourire, elle observait le retour à la réalité de la chose minuscule qui luttait pour retrouver une respiration normale. L’examen qu’elle s’appliquait à réaliser de cet instant n’était emprunt ni de pudeur ni de morale. Elle auscultait attentivement la créature comme un vulgaire animal, appréciant le spectacle qui la tenait en suspense, elle va s’en tirer oui ou merde ?
Un juron craché par la fée laissa croire qu’apriori oui, elle allait se remettre. Et si c’était le signe de la fin d’une distraction, voila qu’une autre commençait. Elie rouvrait doucement les yeux, découvrant l’expression supérieure et suffisante de Balsa qui dardaient ses pupilles sur elle, la fixant sans le moindre gène. La douleur parcourait apparemment toujours ses chairs car elle ne bougeait pour ainsi dire pas. Etendue sur le dos, elle regardait la chimère. Et ce sans plus la moindre once de défi dans les yeux. Elle avait capitulé, à l’évidence, reconnaissant sa faiblesse et s’inclinant. Les quelques mots qu’elle prononça ensuite d’une langue pâteuse vinrent confirmer le sentiment de Balsa. La fée reconnaissait son échec et abandonnait son butin – comme si elle avait eu la moindre chance de l’emporter. La pointe de la lance quitta sa cible et l’arme fut plantée, lame en l’air, à côté de sa propriétaire qui tenait le manche en son milieu. L’attitude adoptée exprimait la fin des hostilités. C’était décevant, mais le combat n’avait jamais rien promit de bien reluisant.
Qu’est-ce que ?... Elle va pleurer ? Ce fut limite. Au lieu de larmes Elie laissa échapper une déclaration pathétique. Balsa sentit en elle monter le dégout. S’il était en partie dû à tant de faiblesse, il venait aussi d’un sentiment plus profond, un mal-être sur lequel la chimère n’aurait su mettre de mots mais qui lui remuait le ventre. Car ce qu’elle voyait là, et elle en prenait peu à peu conscience, c’était un reflet d’elle qu’elle répugnait. Elle qui avait essuyé des échecs maintes fois et les avaient pleuré en silence. Elle qui savait pertinemment qu’il y avait toujours plus fort que soit et à quel point courber l’échine devant les vainqueurs était humiliant. Voir sur le visage de la fée ce portrait d’elle-même était insupportable. Aussi, elle détourna les yeux.
Entendre de petits raclements sur le sol, après un court silence, fit retourner à Balsa son attention sur la petite créature. Celle-ci se relevait lentement, péniblement. Ou plutôt s’envolait, car il n’y eut pas un seul instant où elle se tint debout. A croire qu’une fée était naturellement plus à l’aise en l’air qu’au sol. Tenter d’abonder dans le sens de cette hypothèse fit creuser sa mémoire à la chimère. Elle y chercha l’autre fée, Alissia, mais les souvenirs étaient flous. Il lui semblait de plus que cette dernière avait passé la plupart du temps sur l’épaule d’Aymas le neko, à dormir. Pas très concluant, comme recherche mentale. L’écho des pleurnicheries d’Elie flottait encore dans l’air, mais elle tentait de s’en remettre, essuyant la morve qui lui pendait au nez avec une certaine… application. Elle constata tout haut qu’elle était « dégueulasse » et demanda à Balsa où se trouvait le lac.
Tiens, elle a donc une idée d’où elle se trouve, elle connait le lac Olia ? Une seconde… Quelque chose, un détail, avait changé depuis leur dernier échange. L’assurance de la fée s’était transformée en bafouillage, mais il ne s’agissait pas de cela. Elle m’a… vouvoyé ? La chimère ne cacha pas son air satisfait de cela. Il restait à savoir à quoi était du ce revirement soudain. Un respect envers sa supérieure par la force ? L’idée était alléchant, mais la chimère n’était qu’à moitié convaincue. Elle s’en contenta cependant et tendit vaguement sa main libre – l’autre n’avait pas lâché la lance – en direction du lac.
- Pas loin par là. T’as qu’à voler au-dessus des arbres je suppose, c’est pas comme si tu pouvais le manquer.
Que la fée n’ait pas pensé d’elle-même à s’élever pour avoir une vue d’ensemble de la région n’était pas une preuve de grande intelligence. Surtout si elle savait que le lac était proche. Peut-être qu’elle a le vertige. Ca serait bien un comble. La curiosité se révéla marquée chez Elie quand elle posa une nouvelle question. Question qui jeta un froid, seulement l’espace d’une seconde car la suite, la suite… Balsa mordit sa lèvre inférieure. Avait-elle bien entendu ? Une fierté démesurée gonfla sa poitrine, soufflée bien vite par la triste réalité. Non, elle n’avait rien de divin. Dommage, l’idée était pas mal plaisante. Cette idée en engendra une nouvelle qui ravit la chimère. Un pari. Pas trop risqué, si ce n’était à se rendre ridicule, et qui s’il réussissait promettait un bon divertissement.
- Et bien… C’est à toi de voir. Une chimère a l’un de ses parents divin, l’autre mortel. Je ne peux rien te dire sur mon père, mais ma mère était une panthère.
Mêler un peu de vrai au faux était un bon moyen de donner au timbre de sa voix la fermeté d’une vérité. Restait à voir si la fée mordrait à l’hameçon. Ce que Balsa voulait faire d’une croyante en sa divinité, elle n’en avait pas encore idée. Et elle réalisait bien que sa réponse risquait d’engendrer d’autres questions. Aussi elle trancha avant qu’Elie n’ait pu prononcer un mot :
- A moi de poser une question : tu voulais me faire quoi au juste tout à l’heure ? Quel est ton pouvoir ?
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| | | *Fée*
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Ven 11 Nov 2011, 03:23 | |
| Il aurait été tentant de s'élever, c'était un fait, toutefois la proposition était particulièrement dangereuse. L'élément lui avait paru assez naturel pour qu'elle y pense à peine et ne le mentionne pas. N'ayant aucune science des airs, la chimère ne pouvait tout savoir, naturellement. Néanmoins l'élément réconforta un peu l’orgueil anéanti de la fée. Faire avec les bourrasques qui, sans le couvert de la forêt, pouvaient surgir à tout instant, impliquait de changer d'angle de vol en fonction. Il ne fallait pas sous-estimer l'énergie nécessaire à lutter contre elles, quand on était deux fois moins dense qu'un animal terrestre, et que sa surface potentiellement exposée était beaucoup plus importante. Cela nécessitait le travail de tout le corps et elle ne se sentait pas du tout capable de l'effectuer, ses muscles tressaillant et distillant la souffrance à chaque mouvement. Elle avait voyagé jusqu'ici en volant à quelques deux mètres du sol, une altitude idéale et sécuritaire, sans être pénalisée par l'absence de courants porteurs : ses ailes n'étaient pas destinées à planer, mais bien à battre en permanence, ce qui permettait d'ailleurs le surplace. Il fallait admettre tout de même qu'elle n'était pas une très grande voltigeuse, n'ayant eu que peu d'occasion d'explorer quoi que ce soit, contrairement à ses dires. Aussi répondit-elle humblement :
-Euh, pas après, euh... ça. Voyez, faut des forces pour résister au vent à ce genre de hauteur. Et j'suis morte là. Fin presque.
Elle aurait volontiers exécuté un vif signe de tête en guise de remerciement, si la manœuvre n'avait pas été si douloureuse. Elle se contenta donc d'un petit merci effacé. Cette crasse l'incommodait, cependant, elle restait suspendue aux lèvres de Balsa, attendant avec impatience la réponse à sa question. Elie ne fut pas déçue par celle-ci, et écarquilla les yeux. Elle imaginait bien les dieux descendant de leurs nuages, où quel que fut le lieu où ils pouvaient vivre, n'ayant pas d'ailes, et prendre pour compagne un être mortel. Exaltée par l'image, elle ferma ses paupières brûlantes pour mieux la visualiser. A bien y réfléchir, elle n'en voyait pas vraiment l'intérêt, mais que pouvait-on faire, après tout, quand on était tout puissant, que de se battre contre l'ennui ? Elle ignorait parfaitement ce qu'était une panthère, et n'en avait jamais entendu parler. Si son héritage était visible sur sa progéniture, peut-être était-ce là une espèce à queue. L'organe lui rappelait celui des grands chats, les lynx, qui, chasseurs rusés, habiles et rapides, étaient à n'en pas douter le pire fléau des fées. Elle frissonna, ne sachant si c'était à cause de la fièvre qui commençait probablement à lui monter, où l'évocation du terrible prédateur.
-Cool, répliqua-t-elle simplement, sans l'insolence qui caractérisait généralement ce mot.
N'ayant pas le temps d'interroger la chimère sur les raisons de l'accouplement, sur la nature exacte des panthères, et s'il leur arrivait à elles aussi de se nourrir de lutins, Elie fut embarquée sur un autre sujet qui la concernait. Son propre pouvoir. Comment le définir ? Comment le mettre en valeur, face à un individu qui devait en avoir trop de maléfices pour que la fée puisse seulement les compter (ce qui signifiait en réalité seulement plus que son nombre de doigts) ? Rester floue, voire s'essayer à la poésie, au risque de l'agacer ? A l'inverse, ne serait-ce pas trop ridicule d'insister à outrance dessus, le danger qu'on lui rit au nez étant bien réel ? Quoiqu'en définitive, pouvait-elle se trouver dans une situation plus humiliante que celle-là ? Malgré l'affection qu'elle avait pour le mensonge, elle ne pensa pas une seconde en faire usage. Elle enregistra rapidement une règle que la plupart des croyants adoptaient vite : on ne mentait pas aux dieux, ne le fussent-ils qu'à moitié. Pas que ce fut plus impoli qu'autre chose, juste plus imprudent. Elle ne connaissait pas l'étendue de leur magie, et elle avait déjà entendu que certains enchantements permettaient de différencier la vérité de la fourberie.
-Ouais... Pas grand-chose d'important en fait. Je peux imiter le corps d'un animal normal, si je le touche. Mais ça marche pas sur vous... Désolée...
Le ton était incroyablement abattu. Bien évidemment, elle était davantage furieuse d'avoir échoué que d'avoir essayé, néanmoins il était dangereux de lui signaler. Elle aurait pu le prendre mal. Après tout, elle lui donnait quand même le statut de personne extraordinaire, ce qui était un fait difficilement contestable. La fée ne pouvait se comparer à elle, et si l'idée lui donnait des envies de meurtre, il était nécessaire qu'elle s'y fasse : elle ne faisait pas le poids. Elle détourna le regard, sans parvenir à se persuader que cette rencontre n'était pas prévue quelque part. La chance de croiser un être de ce genre devait être tellement faible qu'il ne pouvait pas en relever que du hasard. Elle se sentit frustrée de devoir en arrêter là, mais la situation -elle, souillée et répugnante, face à un demi-dieu- produisait un malaise trop important pour qu'elle reste là sans rien faire.
-Si vous avez pas b'soin de moi, j'vais me toiletter au lac... enfin je vais essayer, lança-t-elle en songeant à la difficulté de la tâche. Se mouiller suffirait. |
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Sam 12 Nov 2011, 16:17 | |
| «Cool », voila bien une assertion inattendue. C’était un qualificatif que Balsa n’avait pas le souvenir d’avoir jamais entendu dire à son sujet. Elle sentait qu’elle devait prendre ça comme un compliment, seulement l’espèce d’admiration qui se lisait dans les yeux de la fée la mettait un peu mal à l’aise. Enfin, elle a gobé le mensonge, c’est déjà ça. Une petite victoire sans grandes conséquences si ce n’était le vouvoiement qu’elle avait tout aussitôt adopté. Mais quel régal de comprendre sa capacité à tromper un esprit, si naïf fut-il. Balsa commença à se demander ce qu’elle pourrait bien faire de ce mensonge, jusqu’où elle pourrait pousser le bouchon avant qu’Elie ne refuse de l’entendre. Elle pourrait peut-être la mettre à son service sans doute, bien que la chimère doute de l’utilité d’avoir une fée de son côté. Cette utilité potentielle dépendait presque entièrement du pouvoir de celle-ci.
Elle l’apprit de suite après ça. Le don de prendre l’apparence d’un animal touché. Donc elle voulait prendre mon apparence ? Un rictus étira ses lèvres un instant. Là, pensa-t-elle, le combat aurait pu présenter un bien plus grand intérêt. Et il ne semblait pas bien difficile d’arriver à cette situation. Si elle enfilait son anneau, Elie pourrait la toucher sans mal et peut-être devenir chimère à son tour. Est-ce qu’elle aurait la foudre avec elle aussi ? La curiosité titillait ses entrailles. Cependant effectuer cette manœuvre la rendrait vulnérable, le pouvoir de la fée fonctionnerait sur elle ce qui lui ferait surement perdre la crédibilité de son statut de demi-dieu. Elle chassa donc l’idée de laisser la fée tenter une transformation sur son modèle et musela la curiosité avec une prudence ferme.
Elie exprima ensuite son envie de rejoindre le lac, non sans préciser d’abord « si vous avez pas b’soin de moi ». Charmant. Là était la confirmation que la petite créature était prête à se mettre au service de la grande. Il ne fallait pas la laisser filer.
- Je vais te montrer, ça sera plus simple.
C’était plutôt vrai. Bien sur, en suivant le chemin sur lequel elles se trouvaient, Elie rallierait tôt ou tard le lac. Seulement il lui faudrait d’abord contourner quelques collines et surtout traverser un semblant de village de pêcheurs. La voie la plus rapide, que Balsa avait elle-même empruntée, coupait à travers les bois pour tracer tout droit vers l’étendue d’eau.
- J’espère qu’on croisera un animal, j’aimerai beaucoup te voir à l’œuvre.
Ce qu’elle aurait aimé surtout, c’était comprendre dans ses moindres détails l’usage de la magie. Chaque petite astuce pour que cela fonctionne mieux et chaque moyen de la contrôler. De plus son pouvoir comme celui d’Elie fonctionnaient au touché et Balsa brûlait d’envie de savoir sir la fée pouvait retenir son don selon sa volonté, entrer en contact avec un autre sans déclencher la magie. Et si oui, comment elle s’y prenait. Mais le demander de but en blanc était impossible quand on était aussi fière et buté que Balsa. Puis un dieu qui demande conseil ça le fait pas ! La chimère se mit donc en route, jetant une nouvelle fois sa lance sur son épaule. Trimballer toutes ces affaires n’était pas pour la rendre plus habile mais la présence de la fée a son dernier retour avait servit de leçon : ne jamais laisser quoique ce soit sans surveillance. Elle n’avait pas vraiment besoin d’être plus paranoïaque mais cette expérience avait accentué tout de même ce trait de caractère.
Sur le trajet, Balsa marchait en tête, aussi muette qu’une tombe. Elles quittèrent rapidement le chemin pour suivre un sentier qu’on devinait à peine entre les feuilles brunes et rouges que l’automne avait fait chuter. Les seuls animaux qu’elles croisèrent furent quelques passereaux et oiseaux d’eau qui s’envolèrent bien avant de se trouver à portée de la fée. Puis le sentier disparut alors qu’on sortait du bois pour tomber face à l’immensité du lac s’étirant sur des lieues et des lieues, frétillant des reflets du pâle soleil qui en caressait la surface. Le spectacle avait de quoi émerveiller, mais la chimère par trop habituée ne ralenti pas une seconde l’allure. Elles traversèrent ensuite une prairie d’herbe jaunie puis déboulèrent sur une plage aux galets grossiers. La plage même d’où elle s’était tirée de sa baignade quelques minutes auparavant.
- Je t’en prie… dit-elle en désignant le lac. Oh et si tu croise un poisson, deviens poisson toi-même !
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Mar 15 Nov 2011, 02:17 | |
| La surprise germa en Elie quand la chimère déclara vouloir l'accompagner. Elle ne savait comment interpréter cette gentillesse supplémentaire, et l’accueillait avec une certaine inquiétude. Que cachait une telle sollicitude ? Balsa ne pouvait qu'avoir un intérêt, même indirect, à cela. A moins que, quand on était un demi-dieu, la dernière chose qu'il restait à faire était d'aider son prochain. Une idée qui paraissait certes saugrenue, toutefois qui pouvait prétendre comprendre de tels êtres ? Ou peut-être était-ce simplement qu'elle trouvait la compagnie de la fée à son goût. Ce raisonnement, moyennement crédible, bien qu'Elie ne doutait pas de la force de sa propre personnalité, l'enthousiasma tout de même. Elle ne savait pas si elle pourrait un jour considérer une grande comme une camarade, mais de toute façon elle n'en avait pas, et n'en aurait sans doute jamais. C'était bien connu, il n'y avait pas d'amis, seulement des moments d'amitié. Une vérité qui, elle ne l'ignorait pas, était encore plus vraie chez-elle, compte tenu de son caractère frivole.
-Ouais... lança-t-elle inquiète, en réponse aux espérances de la géante, qui, au vu de son état, ne pourraient être que déçues.
Au moins, elle s'intéresse à moi. C'est peut-être juste pour savoir si j'en suis capable, ou alors, c'est une capacité qui lui manque. Si ça se trouve, elle n'a pas hérité de la subtilité de ses parents.
La rythme était soutenu, à l'évidence un peu trop. Voler à la seule force des ailes, sans pouvoir s'aider des muscles du dos, représentait pour Elie une difficulté significative, qu'elle devait surmonter tout en étant épuisée. Elle n'avait pas saisie la pièce sur le sol, jugeant pertinemment que la transporter n'aurait été que souffrance supplémentaire, et craignant surtout la réaction de la chimère. Elle avait par contre repris son habit, heureusement léger, malgré les quelques bagages contenus. Elle l'avait doucement placé sur son épaule, où il pendait à présent mollement. La marche était silencieuse : ce n'était pas pour l’incommoder, car elle se retrouva vite essoufflée et incapable d'enchaîner les mots. Elle sentait la douleur croître à mesure qu'elle redoublait d'effort pour suivre le pas de la grande. Elle esquissait des trajectoires incertaines qui descendaient puis remontaient brutalement, se gardant bien de crier grâce. L'épaule de son acolyte prenait ainsi les allures d'une terre promise où il ferait bon se reposer, mais que le risque d'une nouvelle décharge rendait inaccessible. Elle ne portait presque aucune attention au monde qui l'entourait, ne pouvant s’enticher d'une distraction supplémentaire.
Finalement, les rivages pierreux du lac apparurent, ravivant de vieux souvenirs et soulageant sa volonté. Elle atterrit presque en catastrophe sur des galets qu'elle avait déjà foulés, en compagnie de sa communauté, quelques années avant. Elle expira longuement, contemplant ses pieds qui baignaient dans l'eau jusqu'aux chevilles. L'onde, en cette fin d'après-midi, était assez froide. La fée prit les choses du bon côté et se dit que sa plonge n'en serait que plus vivifiante, alors même que sa peau était brûlante. Elle posa son vêtement sur un rebord à peu près sec, et lentement glissa sur la pente douce du bassin, se laissant flotter sur le dos là où l'eau ne faisait de toute façon pas plus de quelques centimètres de profondeur. D'ici, elle voyait à nouveau le ciel. Son corps, porté par la poussée d’Archimède, pouvait enfin se délasser.
-C'est pas super facile, vous savez... vous devez pas connaître, mais faire de la magie aussi ça demande pas mal d'énergie à une fée comme moi, il suffit pas de toucher la bête. J'vais vous paraître délicate avec tout ça. Mais c'est pas trop comme ça que ça se passe, d'habitude.
Elie se sentait obligée de se justifier de sa faiblesse. Depuis qu'elle avait reçu cette décharge, elle passait, à juste titre, pour une sorte particulièrement misérable d'être magique. Il en allait de son propre honneur, et de celui des fées (pour ce qu'elle en avait à faire) qu'elle démontre à ce demi-dieu sa valeur un jour ou un autre. Le lac était plein d'animaux faciles à saisir, l'occasion était trop belle. Hélas, elle était décidément trop exténuée. Elle n'était plus qu'une parodie d'humanoïde volant, tout juste capable de bouger un membre, et dont les ailes ocres trempaient dans l'onde.
Merde. Espèce d'idiote.
Imbibé d'eau, son seul moyen de locomotion se trouvait incapacité au moins jusqu'à ce qu'elle revienne sur la rive, et plusieurs dizaines de minutes ensuite. En temps normal, elle les aurait faites vrombir, et aurait décollé lourdement. Dans cet état, sans l'appui des muscles du dos, cela relevait de la torture. Elle préférait encore essayer de soulever la bourse. Elle resta silencieuse plusieurs secondes, mais déjà sa bêtise pesait sur son moral. Elle n'allait sûrement pas avouer son inaptitude à bouger, pas encore ! Il lui fallait trouver une autre solution, quitte à se blesser. Par chance, nager était bien moins éreintant pour son corps diminué que marcher. Balsa voulait voir une démonstration de son pouvoir ? Elle allait l'avoir ! Et tant pis si ce n'était que pour quelques secondes.
-Enfin, je peux essayer...
Se redressant à la verticale, elle se mit en quête d'un sujet rattrapable. Entre ratons et diptyques, il y avait cet espèce de canard brun, qui semblait être la bête la plus noble tout en restant la moins dangereuse à approcher. Évoluant d'une brasse traînarde quoique silencieuse, elle aborda le volatile. Ses longues ailes inutiles laissaient à la surface un long sillon qui s'étendait derrière elle. L'oiseau la repéra rapidement, mais ne bougea pas, intrigué, sans doute, par ce qui n'avait pas la taille d'être un de ces prédateurs. Avec une grande précaution, Elie leva le bras dans le but de toucher l'avant du canard, se préparant à tout moment à recevoir un meurtrier coup de bec. Elle effleura une plume, puis l'action s'accéléra. Presque instantanément, la métamorphose fut faite : la chair de la fée se couvrit d'un duvet marron, alors qu'au même moment un clapet lui poussait, et que son poids triplait. L'oiseau original, effrayé par la soudaine manœuvre qui l’avait aspergé abondamment, préféra s'envoler prestement.
Habiter un nouveau corps, contrairement à ce qu'elle avait pensé d'abord, adoucit ses courbatures. Elle n'était pas en pleine forme, mais la douleur était plus légère et diffuse, probablement les muscles qu'utilisaient le palmipède n'étaient-ils pas les mêmes. Maladroitement, elle agita ses pattes palmées, se mouvant avec une facilité surprenante sur l'onde. N'osant voler, de peur de paraître ridicule si elle échouait (et voler était un art tellement complexe qu'il y avait des chances qu'elle échoue, au moins la première fois), elle rallia la berge. Sous cette forme, elle ne pouvait bien sûr parler, néanmoins, elle fixa la chimère de l'air entendu que seules peuvent afficher les fées métamorphosées en canard de cette allure.
Dernière édition par Elie Baley le Dim 27 Nov 2011, 18:44, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Lun 21 Nov 2011, 21:00 | |
| Si Elie avait prit le temps d’inspecter les environs, cela n’avait duré que l’espace d’un instant. Il semblait plutôt à la chimère que sitôt arrivée, la fée s’était laissée tomber sur la plage pour aller tremper le bout de ses minuscules pieds dans les vaguelettes. Elle disposa ses affaires au sec et plongea les quelques onces de son corps dans le lac. La voir pénétrer la surface ridée fit glisser un frisson dans la nuque de Balsa. Retourner dans l’eau froide alors que ses cheveux étaient encore humides ne lui disait vraiment rien. Et puis, si elle s’y jetait là, sans précaution, fée comme poissons subiraient l’électrique décharge conduite par l’eau. Cette idée fit une seconde sourire Balsa, d’un rictus assez malsain. Elle approcha de l’eau et se mit à imaginer sa main frôler la surface, ôtant au passage la vie. C’était si facile, le sentiment de puissance si enivrant.
Elle se ravisa et ses rêveries se dissipèrent quand Elie lui fit un semblant de cours sur la difficulté d’utiliser la magie. Comme si je le savais pas… Mais alors qu’elle dénigrait intérieurement cette leçon, quelques mots vinrent frapper son esprit : « il suffit pas de toucher la bête ». Sous-entendu, toucher sans magie était possible. C’était une information que Balsa avait bien compté tirer de la fée et qu’elle l’obtienne sans même l’interroger, masquant par là son ignorance, était un délice. Une maigre victoire sans doute, mais la satisfaction ne manquait pas. Satisfaction que la chimère se contenta de garder pour elle, affectant l’inintérêt dans un visage inexpressif.
Elle savait pourtant que le contact sans magie était possible, même pour elle. Car elle l’avait réalisé, une fois. Cela lui avait demandé un effort de concentration immense et plusieurs essais. En repensant à cette séance d’entraînement le souvenir de sa partenaire lui frappa l’esprit. Kaleya Lhil, la neko sauvage, complice de ses meurtres et fugitive à ses côtés. Il fallait une amitié solide pour accepter de jouer les cobayes pour Balsa. Et Kaleya avait accepté. L’image de se contact, si furtif avait-il été, celle du visage de la neko, puis la joie et la fierté qui avaient emplit son cœur lors de sa réussite… un sourire se dessina sur les lèvres de la chimère. Elle s’en rendit compte et le chassa aussitôt, quoique sûre que la fée en train de faire trempette n’en ai rien vu.
Revint l’écho des dernières paroles d’Elie. Elle avait l’air de savoir de quoi elle parlait, cependant tout à la fois de chercher des excuses à sa non-exécution. L’idée qu’elle était finalement incapable de se transformer, qu’elle avait menti pour mieux tromper ultérieurement fit son chemin dans l’esprit paranoïaque. Balsa riva toute son attention sur la barboteuse qui choisit cet instant précis pour ajouter qu’elle pouvait essayer. Cela avait de quoi rassurer, bien que « essayer » ne soit pas une promesse fiable. Comme Elie cherchait autour d’elle un animal dont prendre l’apparence, la chimère fit de même et posa bientôt les yeux sur la bande de canards repérés par la petite créature.
Les animaux formaient un groupe d’une quinzaine d’individus, qui picorant la surface qui plongeant la tête pour gratter le fond du lac. La première pensée de Balsa fut « J’ai faim » et elle serra la lance dans sa main en se promettant d’en attraper un une fois que la transformation, si c’était bien le pouvoir de Elie, serait effectuée. L’un des individus s’était écarté de ses congénères. Une femelle à en croire le morne marron de son plumage. Bien grasse, elle fit saliver la chimère. C’était surement dans le but d’engloutir la petite chose nageant vers elle que la canne se laissait approcher. La rondeur de ses formes et son intrépidité par rapport aux autres laissaient penser que c’était là un individu particulièrement vorace et courageux quand il s’agissait de bouffer. Enfin Balsa le voyait ainsi et pensa qu’il s’en faudrait de peu que la fée ne soit goutée.
Mais les oiseaux ne sont pas bien malins, du moins pas les canards et autres volailles. Que la canne hésitât un trop long moment ou ait oublié son idée d’attraper le repas qui se pointait vers elle, Elie ne fut pas attaquée. Elle put même toucher le plumage de la bête et presque aussitôt elle prit son apparence. L’animal modèle prit la fuite dans une gerbe d’eau et entraîna à sa suite les membres de son groupe. Ils ne perdaient rien pour attendre, le ventre de Balsa gargouillait à présent et elle était assez têtue pour les pourchasser jusqu’au milieu de la nuit. Pour l’instant, elle avait tout de même mieux à faire : contempler la réussite de la fée et en conclure qu’une fois de plus sa paranoïa n’avait pas eut raison d’être. Elie déguisée en canne vint sur la plage et s’y déhancha d’un pas pataud propre à l’espèce dont elle avait revêtue l’allure. Entre cette version de la fée et l’animal original, aucune différence n’était visible.
- Ok. Pas mal.
A la vérité, c’était même digne de félicitations. Mais la fierté de Balsa le lui interdisait formellement. D’autant qu’en elle pointait un sentiment qui lui était assez peu familier et qui lui laissait un arrière gout amer : la jalousie. Certes, ce pouvoir qu’avait Elie n’était pas bien menaçant et sa puissance dépendait bien trop du modèle utilisé. Mais ô combien devait-il être pratique pour se cacher, pour tromper ces stupides humais et se glisser jusque chez eux sans qu’ils en aient le moindre soupçon. Balsa imagina le plaisir de devenir rat, de se faufiler en douce chez quelque riche marchand et de la faire tourner casaque en faisant disparaître ses affaires, ou tout simplement en dérangeant sa maison. Elle imagina la saveur d’une supercherie ultime, déguisée en brave toutou, s’attirant les bonnes grâces des enfants et des âmes attendries… pour mieux se retourner contre eux ensuite. Mais le plaisir suprême, totalement étranger à la chimère et qui pourtant suscitait en elle plus d’envie que tout le reste réuni : la possibilité de voler. Elle pourrait alors regardait d’aussi haut qu’elle se croyait puissante le grouillement des villes et passerait la frontière de l’ouest sans plus d’effort qu’un battement d’ailes. La jalousie laissa place au sentiment de faiblesse, au dégout d’elle-même et à la haine de ce qu’elle voyait de meilleur chez l’autre.
- Allez, reste pas comme ça ou j’te bouffe.
Elle se demanda si le gout serait le même que celui d’un canard. Elle se demanda aussi si sous cette forme la fée ressentait le monde comme l’animal ou comme elle-même. Et si elle changeait de sexe si son modèle était mâle. Et combien de temps elle pouvait tenir sous cette forme. Mais toutes ces questions, elle n’avait finalement que faire de leurs réponses. Elle n’en aurait eu utilité que si elle avait pu avoir ce pouvoir. Ce n’était pas le cas et ne le serait jamais. Peut-être Nazj pourrait me donner ça, la prochaine fois… S’entendre penser à vendre ses services la dégouta un peu plus d’elle-même. C’en était trop.
- Bon. Tu m’as donné faim, j’vais me chercher un de ces canards.
Si elle restait plus longtemps, elle savait ce qui arriverait. Elle allait mettre un terme à sa jalousie, en réduisant à morte la fée rencontrée. Puis elle gouterait la viande de fée. Pour éviter d’en arriver là, elle jeta un dernier coup d’œil à Elie et tourna les talons pour suivre la plage vers le nord, lance sur l’épaule, dans la direction qu’avaient pris les oiseaux. Restait la possibilité que la fée la suive… mais c’était bien peu probable.
- Spoiler:
Désolée pour l'attente. Je sais pas si c'est la fin, ça dépend de toi/Elie ^^
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| | | *Fée*
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Dim 27 Nov 2011, 06:53 | |
| Tandis que la chimère avait son attention rivée sur lui, le canard entama une petite parade élégante, se dandinant avec la gaucherie caractéristique de l'espèce. Elie se pavanait avec un certain contentement, heureuse qu'on la respecte enfin un peu, en partie consolée de son humiliation. Elle était remontée dans sa propre estime, ce n'était pas rien. Elle hésita à reprendre sa forme normale. La phrase de Balsa semblait davantage relever de la blague que de l'affirmation sérieuse, mais elle ne savait pas trop à quoi s'en tenir. Il n'était pas invraisemblable qu'elle ait réellement faim, et pas invraisemblable non plus qu'elle s'attaque à la proie facile qu'elle faisait. Dans ce cas, elle aurait été déçue, car une fois que la vie lui aurait été ôtée, la magie cesserait de circuler dans ses veines, et faute d’alimentation, le sortilège prendrait aussitôt fin, lui faisant reprendre son véritable aspect et toute sa maigreur. Finalement, la fée choisit de rester ainsi. Elle avait peur de se retrouver bloquée au sol si elle se retransformait maintenant, contrainte de marcher sur des jambes qui n'avaient plus grande envie de la porter. Elle la regarda la géante, interrogative, avant que celle-ci lui annonce, justement, et cela justifiait en quelque sorte la méfiance dont elle avait fait preuve, son projet de capturer un volatile pour le manger. Toutefois, rien ne sonnait comme une invitation à rester là et à ne pas la suivre, alors, assez naturellement et sans se poser plus de questions, elle décida de lui emboîter le pas. Ou presque.
-Coin, cancana-t-elle, affirmant par là son assentiment sincère.
La métamorphose en oiseau modifiait profondément son anatomie. L'être qu'elle était, et celui duquel elle avait la forme évoluaient tous deux dans les airs, mais leur structure, leur manière de fonctionner était particulièrement différente, notamment pour ce qui était de leurs ailes. Celles des insectes, en règle générale, était bien plus maniables et efficaces que celles emplumées, quoiqu'elles avaient des désavantages sur ces dernières concernant le vol en altitude. Jusque là, cette dichotomie c'était une bonne chose, lui permettant d'atténuer ses douleurs en utilisant des muscles qui n'avaient pas d'équivalents. Cela se compliqua quand elle tenta de prendre son envol : elle n'allait de toute façon pas continuer à se traîner sur le sol avec ces pattes palmées, noble entité aérienne qu'elle était. Elle décolla maladroitement, battant des ailes beaucoup trop vite, et peinant à équilibrer le poids de son corps. Se rendant bien compte qu'elle n'y arriverait en utilisant une méthode aussi épuisante, elle se laissa retomber approximativement, le bec dans les galets. Elle n'abandonna pas pour autant, et ralentissant un peu ses mouvements, parvint à s'envoler avec plus de stabilité. En réalité, il était indispensable d'éviter le surplace, qui provoquait immédiatement fatigue et perte d'altitude. Mieux valait tracer de petits cercles dans le ciel. Le canard ne faisait pas tout à fait figure d'un modèle de souplesse lorsqu'on avait goûté à des incarnations plus petites, mais elle s'en accommoda bon grès mal grès.
Perplexe, Elie voleta tant bien que mal derrière la chimère, et attendit qu'elle marqua une pause, à une dizaine de mètres de l'endroit où le groupe de palmipèdes s'était rétabli. Comment allait-elle s'y prendre ? Allait-elle se révéler suffisamment rapide pour bondir sur un infortuné individu ? Cela lui semblait difficile, mais peut-être la fée estimait mal la distance qui était à parcourir, en fonction de la taille des jambes de Balsa. Ou allait-elle projeter la lourde lance qu'elle transportait depuis tout ce temps ? Ne venant pas d'une culture guerrière, ou pratiquant une véritable chasse, là aussi, le succès d'un tel acte lui paraissait improbable. Il devait falloir une force phénoménale pour jeter correctement un objet aussi lourd. La métamorphe n'y tint plus et dissipa son sort, afin de pouvoir parler. Les courbatures s'étaient atténuées légèrement, aussi tenait-elle à peu près debout, du moins pour l'instant.
-Dites, vous arrivez vraiment à toucher quelque chose avec ce... truc ? s'interrogea-t-elle sur un ton innocent.
Elle contempla l’énormité de l'arme, et l'énormité du gibier. Finalement, ça se valait sans doute... Il y avait assez de viande dans une volaille comme celle-là pour nourrir toutes les farfadets qu'Elie avait connu dans sa vie entière pendant une bonne journée. Elle n'avait jamais beaucoup mangé de viande, et cela en faisait un met rare et apprécié. D'oiseau en particulier, trop difficile à attraper, même dangereux. Tant qu'ils n'évoluaient qu'en deux dimensions, les prédateurs n'étaient pas un danger sérieux pour une fée attentive, en revanche, sans le couvert des arbres, la menace d'un rapace se révélait souvent mortelle. Elle connaissait bien aussi une poignée de lutins qui élevaient de petits volatiles, mais jamais ils n'auraient accepté d'en dévorer un. Paradoxal, quand on savait qu'ils s'en servaient comme montures et les faisaient cruellement trimer, parasites pitoyables se gaussant sur leur dos. Une sorte d'esclavage qu'elle avait toujours considéré bien plus terrible et immoral qu'un abattage en règle. Surtout un abattage aussi savoureux. En l’occurrence, plus elle y pensait, et plus elle salivait. Vue la taille de l'animal, il en resterait certainement pour elle. Il suffisait de prendre son courage à deux mains, ce qui n'était pas pour lui poser problème. Elle frétillait, aussi impatiente de déguster la chair délicate que d'observer les prouesses semi-divines de la chimère.
-J'en prendrais bien un morceau, si vous mangez pas tout, lança-t-elle, l'air de rien. |
| | | =Aïkologue=
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Mar 29 Nov 2011, 23:03 | |
| Elie ouvrit le bec pour en laisser échapper un « coin ». Cela pouvait bien signifier n’importe quoi, être un adieu ou une protestation, Balsa s’en fichait éperdument. Elle marcha sans se retourner vers le canard, avançant d’un pas vif et déterminé, bien décidée à mettre le plus de distance possible entre elle et la fée. Il lui semblait pourtant entendre derrière elle les pattes palmées fouler les galets à sa suite. Pas moyen ! De crainte de voir que l’animal venait après elle, la chimère garda le regard rivé droit devant. En ignorant la fée, elle espérait sans doute qu’elle partirait d’elle-même.
Un bruissement d’ailes énergiquement suivit du bruit d’une chute vinrent faire vibrer les tympans de Balsa, l’informant de la tentative échouée d’Elie de prendre son envol. Ce qui ne manqua pas de soulever un rictus au coin de ses lèvres. Sans ralentir son allure elle tendit l’oreille pour deviner ce qui se tramait dans son dos. Les ailes battirent l’air une nouvelle fois et le bruit qu’elles firent se rapprocha de celui qu’on pouvait attendre d’un canard au décollage. Le sourire de la chimère retomba et son agacement se renforça. Savoir cette stupide fée en train de s’élever dans un univers qu’elle-même ne pourrait jamais atteindre la frustrait au plus haut point. Et cet agacement ne fit que s’accroître quand elle comprit que l’oiseau ne s’éloignait pas mais restait plus ou moins juste au-dessus de sa tête. Elle stoppa sa marche le temps de lever les yeux et de confirmer cette impression, puis repartit en mordillant sa lèvre inférieure de rage. Qu’est-ce qu’elle cherche, les emmerdes ?
Arrivée au point de la rive le plus proche du groupe de canards sauvages, Balsa planta le bout de sa lance entre les cailloux et observa les oiseaux flottant sur le lac. Elle était censée être en train de repérer un individu faible ou isolé, une proie facile parmi la masse de plumes et de becs. Mais en réalité, elle cherchait surtout à retrouver son calme, prenant une longue inspiration et soupirant face à l’évidence : Elie ne la lâcherait pas comme ça.
Une petite voix dans son dos, au timbre innocent et posant une question idiote, crispa Balsa. Elle s’intima fermement de ne pas se retourner, de feindre de n’avoir pas entendu – ce qui était tout à fait improbable – et d’ignorer la chose qui persistait à se tenir là. Nue sans doute, puisqu’elle venait de retrouver son apparence. Se concentrer sur les canards… Ca piaillait sur le lac, on se bagarrait des pour miettes qui souvent n’étaient que débris végétaux qui seraient recrachés. On faisait mine de s’éloigner aussi, surement à cause de cette grande créature qui se tenait bien trop près de l’eau. Mais la créature était patiente… en temps normal, quand il ne s’agissait que de chasse. Des fois que Balsa ne soit pas assez sur les nerfs, Elie s’invita à sa table. Cette fois la chimère n’y tint plus et se retourna vivement.
- T’as pas oublié tes fringues par là-bas ?
Elle désignait vaguement un autre endroit de la rive, qui pouvait bien être n’importe où pour elle du moment qu’il était ailleurs. Elle contempla un instant la petite chose interloquée avant de poursuivre plus bas, tout en lui tournant le dos à nouveau.
- J’imagine que t’as pas la moindre notion de chasse. Sinon tu parlerais pas si fort… T’aurais même pu te rendre utile en fait, si t’étais resté en canard.
Si un de leur semblable s’était pointé vers eux, il y avait de grandes chances pour que les oiseaux viennent à sa rencontre. Si Balsa avait été moins fière, son cerveau aurait pu penser à temps et accepter de mettre en place ce genre de piège en collaboration avec la fée. Car elle devait bien l’avouer, ce gibier allait surement lui en faire baver. Il faudrait d’abord que les canards veuillent s’amènent assez près d’elle. Elle pouvait tenter de les appâter, avec quelque brindille si cela suffisait à attirer leur curiosité affamée, ou avec des graines et baies s’ils se montraient trop méfiants, mais encore faudrait-il trouver ces denrées en forêt. Ou alors attendre, toute la nuit s’il le fallait. Quoiqu’il en soit, dès qu’elle jugerait un ou plusieurs animaux assez proches, elle n’aurait plus qu’à plonger le bout des doigts dans l’eau.
Elle avait découvert cette technique par hasard, peu de temps après l’éclair qui s’était abattu sur elle. En se lavant les mains et le visage dans un cours d’eau. La douleur crispante ne le lui avait fait réaliser qu’au bout de quelques minutes, mais deux poissons flottaient non loin d’elle, paralysés par la foudre. Elle s’était méfiée de cette nourriture, l’imaginant gâchée par le procédé. Mais dans la jungle de Rosyel, la faim l’avait vite emportée sur la méfiance et poisson comme viande se révélait tout à fait mangeable malgré tout. Balsa arracha sa lance du sol et avança le plus calmement possible à la suite des oiseaux. Par chance ils ne s’éloignaient pas trop de la rive, trouvant surement plus à manger ici, à la surface comme dans la vase qu’ils fouillaient, qu’au centre de l’étendue.
- Si j’peux pas t’empêcher de me suivre, au moins parle doucement. Et j’aimerais bien comprendre dis-moi, pourquoi t’es encore là ? Pour manger du canard ?
- Spoiler:
Si jamais tu pense qu'Elie va chercher ses vêtements, on peut imaginer qu'elle fait l'aller-retour pendant que Balsa se plonge dans ses souvenirs... ? Ou pas. T'as le droit aussi de dire que Bal parle dans le ide à la fin :p
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Ven 09 Déc 2011, 01:41 | |
| Bien sûr, Elie n'était pas une parfaite idiote, et elle finit par se rendre compte que l'humeur de la chimère se dégradait à mesure qu'elle s'agaçait de sa présence. Toutefois, son interlocutrice lui semblait être une personne parfaitement raisonnable, et sa candeur l'empêchait de craindre quelque éclat, ou quelque risque physique que ce fut. Vu ainsi, elle avait plus à gagner en restant avec elle qu'en partant de son côté. Elle avait là l'occasion de rester encore un peu au côté d'une demi-déesse, chasseuse sans-doute hors-pair, et voyageuse certainement expérimentée ; un privilège qui n'était pas donné à tout le monde. Ce pouvait facilement être un modèle pour elle, et elle apprendrait probablement pas mal de choses rien qu'en la regardant bouger. Si la géante voulait qu'elle parte, de toute façon, elle n'aurait qu'à le dire clairement. Suite à la suggestion qu'on lui faisait, la fée se retourna vers ses habits étalés plus loin sur la plage, curieuse. Elle pensait repérer un danger pour ses vêtements, mais ne remarqua rien de particulier qui puisse justifier l'attention particulière que Balsa leur portait en cet instant. Elle haussa les épaules en expliquant :
-Normalement, y intéressent pas les bestioles. Les grosses bien sûr, mais les p'tites non-plus. C'est pas des feuilles comestibles, et elles le savent. C'est drôlement pratique. C'est ma mère qui les fait, c'est son pouvoir, adapter les plantes comme elle veut.
Se retrouver malgré elle à parler de sa génitrice frustra la jeune fée. Pas qu'en soit, elle en ait honte, ou qu'elle considère cela comme puéril. C'était qu'elle faisait son possible pour s'éloigner de ses racines, et pourtant, même dans un lieu aussi lointain, elles avaient l'impolitesse de revenir au galop. Elle voulait à s'en affranchir à tout prix, mais devait se rendre à l'évidence, la totalité de ces références en étaient fonction. N'ayant jamais vécu ailleurs, elle ne pouvait pas faire sans. Les bois isolés du Nord-Est du Lan Reï avaient forgé sa manière de voir et de comprendre le monde, songea-t-elle avec consternation. Ils constituaient sa personnalité, et ce serait le cas tant que de nouvelles valeurs ne viendraient pas remplacer les anciennes, ou du moins les nuancer. Cette remarque lui fit paraître son émancipation dans le même temps plus difficile, et encore plus nécessaire.
Elie prit le temps de s'installer délicatement sur un grand galet plat de la rive. Elle avait prit la décision de se mettre à l'aise pour assister au spectacle, la chimère ne donnant pas davantage l'impression d'être pressée. Elle grimaça lors de certains mouvements qui nécessitaient la flexion des jambes, mais y parvint sans trop se blesser, allongée sur le ventre, la tête sur les coudes, tournée vers le centre du lac, tignasse rousse dépassant de deux brins de végétation. Elle s'étira épaules et bras en même temps que les ailes. Si la métamorphose en canard l'avait soulagée, elle l'avait de plus partiellement séchée. L'eau qui coulait sur les plumes avait été en partie éparpillée quand elle s'était envolée, et seule une fraction était retombée sur elle quand elle avait repris sa forme. Avec un peu de chance, un vol lent et méthodique pourrait être envisagé bientôt.
-Ouais. C'est pas vraiment ma spécialité. Elle sourit devant l’euphémisme ; en effet, elle n'y connaissait rien. Assez quand même pour savoir que vous avez aucune chance d'en toucher un avec votre pique, pas vrai ?
Elle n'avait écouté le conseil de Balsa que de façon insoucieuse, et parlait avec un ton tout juste moins élevé. Heureusement, sa taille ne permettait pas vraiment à ses cordes vocales de porter, et même si elle avait crié, le bruit qu'elle aurait dégagé aurait été moindre. A peine suffisant pour effrayer les oiseaux, à cette distance, pour peu qu'ils ne soient pas trop craintifs. Elie n'avait aucune idée de la manière dont la géante allait s'y prendre, toutefois, présentant que l'opération allait être violente, peut-être une idée découlant simplement de l'immensité de la chasseuse, elle concentrait son attention alternativement sur la prédatrice et sur les proies. Elle contint à demi un bâillement, tout en remontant sur les genoux. Le regard de la chimère se perdit dans le vide l'espace d'un instant, instant que la fée trouva long. Cette dernière fut enchantée quand elle lui adressa finalement la parole, et s'empressa de répondre, sans véritablement saisir la note de reproche qui y siégeait.
-Ouais, c'est merveilleusement bon, paraît. Pis, savez, c'est pas tous les jours qu'on rencontre des gens comme vous. Cool comme ça. Ah, et aussi, une fée pas capable de voler, seule dans la nature, ça fait pas bien long feu, souvent. Sauf mon frère, lui il aurait survécu à n’importe-quoi... mais il était bien plus hargneux que n'importe quel animal qui aurait pu lui tomber dessus, en même temps. Elle réalisa qu'elle en était encore à discourir de sa famille, et perplexe, se reprit. Comme c'est un peu à cause de vous que je suis comme ça, vous pouvez bien m'accepter un peu, pas vrai ? termina-t-elle, en baissant pour le coup franchement le volume de sa voix. |
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Ven 16 Déc 2011, 00:10 | |
| Les voix qui s’élevaient de la plage n’étaient pas franchement pour lui plaire. Sans qu’il ne sente la menace, le barboteur plumé préférait le calme de la forêt aux parlottes humaines. Aussi il dérivait doucement vers l’astre déclinant, suivant le mouvement du reste de son groupe qui en pensait tout autant. Ils restaient toujours à la fois proche des berges pour espérer trouver à la surface de quoi grignoter et à la fois assez loin de ce terrain potentiellement dangereux où une géante donnait la réplique à la plus petite créature humanoïde qui soit. Lui, du haut de ses deux étés, n’en avait jamais vu de pareil. Mais si les canards avaient été dotés de la parole, il y aurait bien eu quelques becs pour lui conter la venue de toute une troupe de ces gros moustiques bruyants et non comestibles. Les saisons étaient venues, passées et revenues depuis, cependant aucune mémoire aviaire ne devait avoir gardé de mauvais souvenirs de cette visite, car personne n’avait décollé. Quant à la plus grande, aucun doute pour les canards, elle appartenait à l’espèce des deux-pattes. Ceux-là venaient des fois, embarqués dans de grotesques coques de bois, rider l’étendue d’eau et lancer leurs filets. Il n’y avait alors bien que les poissons et leur bêtise légendaire pour se faire attraper. D’autres deux-pattes se promenaient régulièrement sur la plage, bruyants dès qu’ils étaient plusieurs. Certains, les plus petits d’entre eux, jetaient même parfois sur l’eau des miettes qui s’avéraient gustativement très intéressantes.
L’approbation qu’Elie cherchait de son « pas vrai ? » non seulement ne trouva pas de réponse mais aussi accentua l’agacement de Balsa. Déjà en ce qu’elle trouvait que son ton se faisait bien trop familier. Et puis, et surtout, parce qu’elle supposait la chimère incapable de se débrouiller pour assommer ou pourfendre un oiseau de sa lance. Bien sur que je le pourrais ! Mais le prouver ne serait pas à l’ordre du jour car pour autant qu’elle s’en juge capable, Balsa savait que cela ne serait pas une mince affaire, qu’elle devrait probablement faire face à plusieurs échecs avant d’y parvenir. Se gardant bien de ne pas répondre, pour éviter tout entrain qui l’amènerait à relever ce défi, la chimère serra les dents et suivit d’un pas lent et régulier le déplacement des canards. Elle longeait la plage et de ses yeux poursuivait sa marche, examinant devant elle la découpe que roches et galets dessinaient au bord du lac. Elle ne manqua pas de repérer la langue d’eau qui s’avançait dans la forêt, peut-être l’embouchure d’un ruisseau ou une simple excentricité du paysage.
Elle se surprit elle-même à se retourner, regardant ce que faisait Elie. Celle-ci était toujours nue, nonchalamment installée sur les cailloux à quelques pas derrière. Cette nudité qu’elle ne se donnait même pas la peine de cacher n’était pas franchement la bienvenue. Ce n’était pas par pudeur que Balsa réprimant intérieurement ce comportement. Mais par l’impression une fois encore que la fée était trop familière avec elle. N’avait-elle pas un minimum de tenue ? Qui plus était face à ce qu’elle prenait pour une demi-déesse, qui venait de lui désigner ses vêtements laissés plus loin ? Cependant à y réfléchir, cette familiarité qui s’installait était sans doute en partie de sa faute. En tutoyant la fée et en ne prenant pas garde à la correction de son langage, la chimère avait lui avait ouvert la porte.
Coupant court à sa réflexion, la chimère demanda à Elie de s’expliquer sur sa présence. Chose qu’elle fit, de la manière la plus surprenant qu’il soit. La qualifiant de « cool », elle osa lui faire comprendre qu’elle espérait une sorte de protection en sa compagnie. Après un aparté sur son frère, elle poursuivit en justifiant sa requête par la responsabilité qu’avait Balsa concernant son état, c’est-à-dire incapable de voler. Le « pas vrai ? » qui conclut son explication, écho de celui qui avait tant agacé la chimère quelques instants auparavant, fit l’effet d’une bombe.
- Tu crois que tu es plus en sécurité avec moi ? haha ! Grossière erreur ! Je sais pas ce qui me retient de te prouver le contraire et par la même occasion te montrer à quel point je sais manier cette lance.
Elle n’avait pas mesuré le volume de sa voix et lorsqu’elle s’en rendit compte, un coup d’œil vers les oiseaux confirma ses craintes : ils nageaient un peu plus vite pour s’éloigner d’elles. Merde ! Elle pesta contre elle-même, rageant de constater son manque de sang-froid. Elle avait toujours faim, mais la chasse prenait à présent une place bien moins importante que remettre à sa place la petite idiote qui s’était largement trompée sur son compte.
- C’est uniquement de ta faute si tu es comme ça, tu m’as attaquée je te rappelle, tu as misérablement tenté de voler ma bourse. Et tu as l’audace de demander un dédommagement ? Tu rêves !
La lance qu’elle avait agité de colère, pointant vers la fée puis décrivant des mouvements brusques, avait finit de faire fuir les oiseaux. Ils n’allaient pas tarder à dépasser la petite crique qu’elle avait compté utiliser comme piège. Balsa poussa un râle de colère, se baissa précipitamment pour ramasser quelques pierres et en se relevant darda sur Elie un regard de feu.
- Tu sais quoi ? Je vais arrêter de perdre mon temps à discuter avec toi et je vais l’attraper ce canard si « merveilleusement bon ». Je te conseille de rester là bien sagement en attendant et si t’as de la chance, je laisserais des miettes que tu pourras grignoter.
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Mar 07 Fév 2012, 00:59 | |
| Consciente de sa position de faiblesse, Elie prit le parti de ne pas paraître trop fâchée par les paroles de la chimère, et surtout, de ne pas répondre avec trop de véhémence. Bien que bavarde et impétueuse à l'ordinaire, elle savait se faire petite quand la situation l'exigeait, et en l'occurrence, elle avait faim. Elle ne put toutefois s'empêcher d'afficher une grimace vexée. Elle aurait peut-être davantage détesté la situation sans cette perspective d'un alléchant repas. Du reste, quoi qu'en dise Balsa, en l'état, la fée était bien plus en sécurité auprès d'elle que seule dans la nature. Elle n'était pas en mesure de fuir un prédateur, mais elle savait que la simple présence de la géante suffirait à en dissuader bon nombre. Le seul risque tangible provenait de l'humeur de sa protectrice, et elle était à peu près sûre que celle-ci ne l’abattrait pas de sang-froid. De fait, elle n'avait jamais vu deux êtres intelligents s'entre-tuer, et n'avait qu'une conception très vague de l'homicide ; quelques bonnes bagarres, bien sûr, et elle avait entendu parler de quelques accidents, sans jamais aucune volonté d’assassiner. En réalité, elle pensait même qu'il était improbable qu'on l'abandonne. La Grande ne l'avait pas laissée lorsqu'elle s'était trouvée inconsciente, alors à présent que la sympathie de sa protégée rayonnait, les chances qu'elle change d'avis étaient moindres... De toute façon, dans cet état, elle était plus apte à négocier avec le plus sanguinaire des agresseurs qu'avec un animal qui ne la comprendrait même pas. Elle se força à baisser les yeux :
-Ptêtre parce que vous êtes une personne bienveillante ? Il en faut, vous savez. Me faire du mal vous apporterait pas beaucoup de satisfaction, pas vrai ? Trop facile pour une déesse.
Les neurones éparses qui constituaient son cerveau de fée commençaient lentement à cogiter. Elle était de plus en plus perplexe sur ce qui était arrivé au moment où elle avait tenté de prendre l'apparence de la géante. Elle avait pensé d'abord que cela venait d'un défaut de son propre pouvoir, et n'avait pas été plus en mesure de réfléchir. Plus elle y pensait, plus des hypothèses contraires fleurissaient. Elle n'avait jamais eu ce genre de retour, quel que soit la taille de l'être qu'elle avait imité, alors pourquoi cette impossibilité à copier une chimère ? Son statut semi-divin n'expliquait pas tout, Elie ne faisait que copier les corps, et aucunement la puissance magique ou spirituelle et d'autant qu'elle pouvait en juger, celui de Balsa n'avait rien d'exceptionnel. Il restait une seconde possibilité qu'elle n'avait pas envisagé : et si le violent choc était la conséquence d'une action de la Grande ? Cela soulevait une nouvelle question. Si elle s'était défendue, c'était peut-être qu'elle avait quelques peurs. Elle ne semblait plus en avoir à présent, mais il était possible que face à l'inconnu, elle ait entretenu des doutes quant aux dégâts que la fée aurait pu lui causer. Ainsi, l'éventualité qu'elle soit plus vulnérable qu'elle prétendait l'être devenait moins négligeable. Elie soupira, pour l'instant, ça ne faisait aucune différence. Elle n'aurait pas été en mesure de défaire un lièvre.
Le gros dytique qui flottait paisiblement devant-elle, en revanche... La tentation de montrer à Balsa qu'elle était capable de se nourrir sans elle était forte. Assez forte pour justifier une nouvelle plongée, malgré la douleur encore latente. Elle atterrit mollement, ralentie par ses ailes, les bras écartés sur l'insecte de deux bons centimètres de long, ce qui représentait un peu plus de la distance séparant son pied de son genou. Elle planta aussitôt canines et incisives dans la large zone molle séparant la plaque médiane de la tête, et, insistant, décapita prestement sa proie. Avec une petite plainte, l'opération ayant relancé ses crampes à la mâchoire, elle tira le gibier vers la rive, suffisamment proche pour qu'elle ne se mouille que jusqu'à la taille. La traction n'en fut que facilité par les bulles d'air contenues dans les élytres qui faisaient toujours leur travail de bouée. La carapace du dytique était un peu trop coriace pour la dentition de la fée, néanmoins, le ventre était friable et renfermait une chair plus intéressante et juteuse. Elle en arracha une portion : la viande était à la fois amère et sucrée. On ne savait jamais vraiment à quoi s'attendre, avec les insectes. Les saveurs étaient extrêmement diverses, même au sein d'une même espèce. Elle en avala une bouchée supplémentaire, puis se découragea. Cela ne valait probablement pas la saveur d'un canard. Les doigts pleins de lymphe, elle repoussa le reste de son repas, et s'intéressa à la chasse de Balsa, silencieuse et attentive. |
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Mar 07 Fév 2012, 20:39 | |
| Les canards avaient beaux être bavards, ils ne supportaient pas pour autant les discussions des autres. Surtout quand le ton de celles-ci montait. Ils brassaient vigoureusement l’eau de leurs pattes palmées et glissaient rapidement le long de la côté. Balsa avait laissé tomber Elie après son dernier mot, tournant le dos à la fée qui s’était tue et n’avait pas tenté de la suivre. Elle jeta sa lance sur l’herbe et accéléra. Sa main droite prit dans sa main gauche un galet ramassé et son bras se leva, prit son élan et se déroula soudainement pour envoyer la pierre le plus loin possible. Alors elle s’arrêta net, les yeux rivés sur les animaux.
Le galet vint frapper l’eau à quelques pieds des meilleurs nageurs, devant eux en direction du lac. Les premiers oiseaux décollèrent lourdement et, fuyant le bruit et l’éclaboussure, dirigèrent le groupe sur la plage. Ils ne manquèrent pas de remarquer l’avancée d’eau et son confort flottant, bien plus attrayants que la plage et sa pesanteur. Alors les plus feignants ne sortirent même pas de l’eau, se contentant de vriller leurs palmes pour les tourner vers la crique. Ceux montés sur la plage, les pattes torturées par les roches, les ronces et les embuches, regrettèrent bien vite leur choix, à voir certains de leurs congénères se prélasser gentiment sur l’eau. La jalousie les tirailla et nombre se laissèrent tenter, redescendant déjà retrouver leur élément. Mais certains, les plus expérimentés, dardaient leurs yeux sur la chimère, semblant prêts à décoller. S’ils se lançaient ils entraîneraient le groupe. Et un galet ne les ferait pas changer de direction en vol…
Les mèches de sa queue de cheval se soulevaient dans le vent, mais en dehors de cela Balsa était parfaitement immobile. Et elle le resta longtemps, jusqu’à ce qu’ils l’aient oublié et qu’ils rejoignent la sécurité du groupe. Ils entrèrent à leur tour dans la crique et Balsa eut l’impression de respirer de nouveau. Elle n’avait pas loupé sa chance, même s’il lui restait encore à faire et nombre d’erreur à éviter.
Elle jeta bas sa veste et descendit vers l’eau, dans la direction opposée au groupe, meilleur moyen de rassurer les animaux les plus méfiants. Rentrer à nouveau dans le froid du lac ne l’enchantait pas vraiment. Elle se consola en se convainquant que c’était là pour elle un bon exercice. Une fois devant l’eau elle détacha sa chaine pour prendre l’anneau et elle se le passer au majeur droit. Puis elle fit faire deux tour aux mailles autour de son cou, pour s’assurer que qu’elles ne tombent pas. Prenant une grande inspiration elle entra dans l’eau, avançant doucement mais se forçant à ne pas s’arrêter. L’eau lui monta vite aux genoux, aux hanches et aux épaules. Enfin, elle disparut sous la surface. Les rides provoquées par la plongée s’élargirent en cercles et disparurent, englouties par celles levées par le vent. Quelques cent pieds plus loin vers le large, le prédateur sortit la tête de l’eau.
Oh, juste assez pour respirer. Et observer alentours. Les yeux rivés vers la crique, la chimère s’approchait avec une lenteur reptilienne. Elle avait choisit de piéger les animaux, quitte à en blesser plus que nécessaire, pour être sûr d’en avoir un. Car, fierté oblige, elle se serait damnée de revenir bredouille. Quand elle arriva à la moitié de la distance qu’elle avait mise entre elle et ses proies, elle cessa de nager. Puis prit une grande inspiration et disparut de nouveau. Bien que l’eau fût trouble, elle parvenait à se repérer sous la surface, à la lumière et au courant. Le fond approchait de la surface au fur et à mesure qu’elle avançait et bientôt elle aperçut sa première patte de volatile. Elle se laissa dériver, guidée par les seuls mouvements de sa queue féline, pour ne pas qu’il la perçoive à travers l’onde. Elle montait doucement vers la surface… Quand un volatile pagaya au-dessus d’elle, elle était prête, doigts cramponnés à son anneau. Elle l’arracha.
Quelques canards poussèrent des cris de douleurs et déjà le groupe décollait. Balsa jaillit de la surface, se tenant debout sur le fond du lac, à côté d’un oiseau aux mouvements saccadés. Elle se jeta sur lui, l'attrapant d'abord par une aile. Puis elle lui saisit le cou et brisa les cervicales d'un poigne sèche. Entre ses dents la chimère tenait le petit anneau. Elément si indispensable à ce plan et si précieux... Les dernières gouttes d’eau soulevées par l’attaque retombèrent briser la surface et Balsa réalisa qu’elle avait vaincu. Le prédateur en elle avait une nouvelle fois parlé, rit, rugit. Les vêtements dégoulinant, elle lâcha le canard le temps de remettre l’anneau à son cou puis rattrapa le petit corps flottant avant de se diriger vers la plage. Vers Elie en réalité. Considérant ce fait la chimère se surprit elle-même. Qu’est-ce qui la poussait vers ce petit être inutile ?
Une fois les pieds au sec, la chimère bifurqua vers la veste qu’elle avait laissée avant de se mouiller. Au bout de son bras le cadavre encore chaud se balançait, pas ménagé le moins du monde. Il était mort qu’importait ? Elle avait eut une pensée pour lui au moment de lui rompre les cervicales mais depuis, il n’était à ses yeux plus que viande et sang. Ne restait plus qu’à récupérer la lance et Balsa pourrait le déguster.
Sur le trajet elle se souvint des deniers mots d’Elie avant quelle n’ai la sagesse de se taire. Un excès de naïveté et elle toucha du doigt une certaine vérité. Balsa n’aurait aucun mérité à se débarrasser de la fée. Cela ne garantissais pourtant qu’assez peu la sécurité d’Elie. Si la petite chose se faisais trop bavarde, familière, impudente, la chimère n’aurait que peu de remord à muer le flot de mots irritants en flot de sang féérique. Ce qu’avait finit par dire Elie avait tout de même amusé Balsa. D’abord parce que cela confirmait la naïveté d’Elie et surtout parce qu’elle s’imaginait des dieux bien aimables. Si dieux ils y avaient, oh certains devaient être bons. Mais quand on vit l’éternité et que notre seul jeu est la vie des mortels, n’a-t-on pas envie aussi de tuer ? Effacer une civilisation, déclencher une guerre des races pour chercher la plus brillante, la plus sauvage… Du moins c’était ce qu’elle imaginait. Des dieux qui avaient laissé les anubites pratiquement disparaitre ne pouvaient que jouer à un jeu sordide. Mais de fait, s’imaginant à leur place, elle les comprenait.
Arrivée sur l’herbe où elle avait jeté son arme, Balsa s’assit en tailleur. Elle n’hésita alors pas à dérouler cet appendice qui la rendait inhumaine. Elle l’avait caché pourtant, toute sa vie depuis le départ des laboratoires. Elle avait voulu se fondre dans la masse, se faire passer pour humaine. Mais humaine elle n’était pas et ne le serait jamais. Entrer dans la peau d’une semi-déesse était bien plus adéquat. Balsa sortit une petite lame, fit signe à Elie d’approcher et entama le plumage. Quand la petite fée fut à sa hauteur, la chimère arracha une première touffe de plumes marrons et planta son regard dans les minuscules pupilles.
- Dis-moi, tu as quel âge ?
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Mer 08 Fév 2012, 02:04 | |
| Levant le regard pour observer la stature imposante de la chimère, Elie mit plusieurs secondes avant de se rendre compte que celle-ci n'était plus en vue. Il ne restait que sa veste, sur le bord de la rive. Elle plissa les yeux, et finit par apercevoir un peu plus loin une onde qui déformait la surface de l'onde. Incrédule, elle contempla l'énorme animal aquatique filer droit vers les canards. Était-il possible pour un être aussi massif de s'approcher suffisamment discrètement, puis assez vite, de ses proies pour en attraper une avant que toutes s'envolent ? Elle en doutait sérieusement, admirant néanmoins bien malgré elle la qualité du déplacement aquatique de Balsa. Ce devait être beaucoup plus simple de s'éloigner autant de la rive, quand on avait pied tout du long, songea-t-elle. Toutefois, la natation sous forme humanoïde lui avait toujours paru fatigante et dangereuse. Il fallait la laisser aux animaux qui étaient constitués pour, même s'ils étaient surprenant que les poissons ne défendaient pas mieux leur domaine, pourtant si petit, la majorité du monde étant recouverte par des terres sur lesquelles ils ne pouvaient évoluer. Évidemment, la fée, elle, dans le grand bonheur que lui procurait son pouvoir, ne se connaissait aucune frontière, qu'elle soit de glèbe, d'eau ou d'air.
Et puis il y eut ce moment étrange, où la plupart des oiseaux s'enfuirent à tire d'aile. Sauf un. Le malheureux s'agitait sans parvenir à coordonner ses mouvements, ne faisant que soulever des gerbes d'eau. Elie comprit vite ce qui se passait, et pour cause : elle l'avait vécu, même si elle ne s'en souvenait pas vraiment. Le choc, le fameux choc, celui qu'elle avait enduré lorsqu'elle avait essayé de se transformer, l'infortuné canard devait le subir en ce moment même. Pour une fois, elle compatissait sincèrement au sort de la proie. Toutefois, l'agonie du gibier paralysé fut courte, car la géante ne tarda pas à lui rompre le cou. Un geste comparable à la morsure qui avait décapité le dytique une minute plus tôt, mais la sauvagerie de la fée y était remplacée par une efficacité qui révélait l'habitude de la chasse. Les os du palmipède, pourtant cinq ou six fois plus grand que la fée, avait cédé avec une facilité qui la pétrifiait. Il aurait donc suffi à Balsa de serrer le poing pour la réduire en bouillie rougeâtre. La perspective n'était pas très alléchante, mais à aucun moment l'inquiétude ne filtra sur son visage. La chimère revenait calmement vers elle, et ne semblait pas avoir d'intention particulièrement meurtrière à son égard. Du moins, pas davantage que quand elle était partie.
-Hé, bravo ! lança-t-elle de vive voix, espérant à la fois exprimer son adhésion à l'action, contenter l'orgueil de son interlocutrice, et ainsi recevoir sa part du repas.
Elie esquissa un sourire, assez amusée par le fait que la Géante n'avait enlevé que sa veste pour plonger, et que tout le reste de son habit était à présent trempé. Le soleil crachait sur la terre de ses derniers rayons orangés, et la nuit tomberait sans aucun doute dans l'heure prochaine. La belle saison était terminée, et elle se félicita d'avoir encore une tenues préservée de l'humidité, quoiqu'elle ne fut pas très frileuse. L'avantage quand on faisait une poignée de centimètres, dans tous les cas, était que la moindre feuille pouvait facilement faire office de couverture. C'était bien la preuve que son espèce était bien plus adaptés à la vie que tous ces mastodontes qu'étaient les chimères et les humains. Les plus gros animaux, comme les sangliers, ou, lui semblait-il, les ours, avaient au moins le bon sens de se prémunir d'une fourrure. Ces benêts de titans, eux, avait apparemment une peau pareille à celle des fées, sans pouvoir trouver dans la nature de plante assez grande pour les protéger. Et elle imaginait mal le travail que demandait la confection d'un seul vêtement pour eux. Sa mère y aurait passé des semaines.
On se demande comment ils ont survécu...
D'un autre côté, ça expliquait peut-être pourquoi elle en avait rencontré si peu. Ils devaient vivre pour la plupart dans des contrées plus chaudes, où la température était maintenue, même pendant les plus rudes hivers, par de perpétuels brasiers, et seuls les plus téméraires s'aventuraient dans les terres réservées aux êtres supérieurs. Enfin, il ne fallait pas oublier qu'elle avait affaire à une semi-déesse ; probablement ne craignait-elle pas le froid plus qu'elle.
A la demande de Balsa, qui s'était assise, elle avança vers elle, mi-volant, mi-sautillant, pour répartir au l'effort sur le plus grand nombre de muscles possibles, utilisant le battement de ses ailes presque sèches pour tenir debout. Elie fut surprise par la question qu'on lui posa. L'âge ne revêtait guère d'importance de la où elle venait et bien qu'on le compta généralement en saison, la compétence de chacun, ou les liens de parentés entretenus faisaient plus foi que l'ancienneté, quand il s'agissait de faire preuve d'autorité. Aussi ne vit-elle aucun intérêt à mentir et répondit sur un ton naturel :
-Pas beaucoup moins que vous. J'suis née il y a quatre étés, à peu près...
Elle ne songea même pas que le temps pouvait ne pas avoir d'influence sur les chimères, qui pareilles aux arbres épais, grandissaient avant de se figer et de ne plus bouger pour bien longtemps, si ce n'était l'éternité. A sa connaissance, aucun animal ne vivait plus longtemps que les fées, même si quelques légendes courraient à propos de lézards quinquagénaires, et aucun n'avait une enfance si longue, puisqu'elle s'étalait sur presque trois ans. Elle décida de tirer partie de l'attention qu'on lui portait et de la similitude supposée entre Balsa et elle aussi vite que possible, enchaînant sans scrupule.
-C'est jeune pour être bouffée par une bestiole, pas vrai ? Alors vous voudriez pas qu'on se serre les coudes, pour cette nuit ? J'suis mal si un truc me tombe dessus, dans cet état, vous savez. |
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Dim 12 Fév 2012, 21:48 | |
| Quatre années ? et cela devait être « pas beaucoup moins » qu’elle ? Balsa fut choquée par la réponse. Une seconde. Après elle reprit le plumage du canard, réalisant que tout s’expliquait. Et puis, elle avait appris d’Akin, du moins croyait-elle s’en rappeler, que les fées vivaient peu d’années. La naïveté et le ton d’Elie étaient enfantins, simplement. Quatre ans après sa naissance en laboratoire, la chimère était tout aussi crédule que la fée. Ses dieux à elle étaient les humains, qui faisaient la pluie et le beau temps, décidaient de tout et étaient de toute façon plus forts, il ne fallait pas se poser la question. Elle cherchait auprès d’eux le réconfort et la protection que la fée semblait attendre d’elle. Si cette dernière en savait aussi peu sur le monde que Balsa à son âge, forcément la méfiance et la crainte n’étaient pas ancrées en elle. Ce qui expliquait qu’elle se permette de commenter. Balsa serra la base des plumes entre son pouce et sa lame et tira un nouveau coup sec.
- Je reste pas là cette nuit et tu me suivras pas…
Le vent sur ses vêtements mouillés rappela Balsa à la fraicheur automnale. On sentait même dans l’air une pointe d’hiver, courant gelé glissant sur la peau à se faire hérisser les poils. Réprimant un frisson, la chimère accéléra sa tâche, s’y plongeant totalement pour être plus efficace. Pour ne pas se laisser avoir par le froid il fallait bouger. C’était peut-être idiot de ne pas avoir retiré ses vêtements pour nager mais elle n’y avait même pas songé. Une sorte de pudeur, née de son sentiment de difformité par rapport aux autres. Elle ne laisserait personne examiner ses traits nus. Elle ne laisserait personne assouvir sa curiosité de scientiste. Se déshabiller sous les yeux de quelqu’un lui rappelait toujours les examens cliniques quotidiens auxquels elle avait droit. Ses cicatrices, sa vraie nature, resteraient secrètes.
Le temps passa et Balsa, silencieuse, finit par avoir découvert tout le ventre de l’animal et son cou. Alors elle se leva et fit quelques pas vers le bas de la plage. Elle avisa une grosse pierre lisse et y étendit le canard qu’elle portait. D’un mouvement vif elle fit glisser la lame en travers de la gorge nue. La chair s’ouvrit et le sang coula sur la tête qui pendait au-dessus du sable. Il y eu une éclaboussure qui tacha le dos de sa main et la chimère lécha le rouge pour la nettoyer. Le gout d’un sang encore chaud caressa ses papilles. Un fois le flot tarit, Balsa mit l’animal sur le dos et lui ouvrit délicatement le ventre. Elle pencha alors l’animal et vida ses entrailles sur le sol rougeâtre. Le foie qui n’était retenu que miraculeusement par un fil fut arraché entre la lame et le pouce de la chimère qui s’empressa de le manger. La saveur d’une chaire fraîche et d’un morceau de choix attisa son appétit.
Elle revint ensuite s’asseoir près de sa lance et donc d’Elie. Plaçant le canard à côté d’elle, elle s’appliqua à en prélever une fine tranche dans le magret. Elle la porta à ses narines, renifla l’arôme de la viande et la prit dans sa bouche. Tout en mâchant elle se dit que la petite fée devait s’attendre à recevoir un morceau à présent. Elle coupa une nouvelle tranche, la mangea et lécha ses doigts ruisselants de sang et de graisse. Elle avait prévenue, Elie n’aurait que « les miettes ». De toute façon, un corps de cette taille n’avait pas besoin de grand-chose. Et Elie devrait attendre. Attendre que le prédateur abandonne la carcasse une fois son ventre plein. Cela dit Balsa imaginait bien qu’un esprit si jeune et si naïf ne verrait pas les choses sous le même angle. Et ce n’était sans doute qu’une question de temps avoir que la fée ne quémande. Avec tout le naturel et l’innocence du monde, bien sur ! Un petit sourire amusé leva le coin des lèvres de la chimère. Entamant une troisième coupe, elle attendait le moment où Elie dirait quelque chose.
A nouveau elle frissonna et elle jeta un regard mauvais au soleil qui déclinait. Les jours raccourciraient et bientôt la nuit serait reine. Tant mieux. Balsa préférait la nuit pour marcher, plus calme et silencieuse. Elle comptait prendre la route et moins elle croiserait de monde mieux elle se porterait. Bien sur, si elle croisait un idiot assez fou pour s’en prendre à elle, elle se ferait une joie de l’anéantir. Elle avait sa lance et des années d’expérience enrichies de ces derniers mois d’entraînement. Cessant de tailler dans la viande un instant elle posa les yeux sur l’arme à côté d’elle. Ce n’était pas sa lance. C’était celle du guerrier que Kaleya avait battu. Un peu trop lourde et en mauvais état, mais elle faisait toujours l’affaire. Et puis il y avait la foudre. Un an après la découverte de ce pouvoir elle avait apprit à le manier, à l’utiliser correctement et, surtout, à l’apprécier. Sans doute depuis qu’elle pouvait le taire, grâce à l’anneau de Nazj. Nazj… Elle fronça les sourcils et déglutit.
- Je vais te donner un conseil Elie. Trouve-le ton protecteur ou te vas te faire bouffer par le monde. Un humain ferait bien l’affaire, surtout si tu veux aller à Reilor.
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| | | *Fée*
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Mar 21 Fév 2012, 02:29 | |
| Une nouvelle fois, Elie ravala les mots dangereux qui lui venaient à la bouche. Était-ce son état de relative faiblesse qui la rendait si retenue et pragmatique, ou la raison se trouvait-elle en son simple instinct de survie ? Ça ne lui ressemblait pas vraiment : quand bien même elle pouvait se faire actrice, elle réagissait habituellement de façon plus explosive, ou plus mesquine, à la frustration. Et de la frustration, il était certain que le refus de la chimère en générait beaucoup. Qu'on la rejette la rendait intérieurement furieuse. Elle se demandait pourquoi la géante ne voulait pas d'elle. Sans doute la pensait-elle faible. Comme tout aurait été différent s'il n'y avait pas eu ce maudit incident ! La fée ne pensait guère rivaliser avec une demi-déesse, cependant, elle ne doutait pas d'être une des créatures les plus puissantes au monde. Elle partait du constat devenu principe que plus la taille d'un animal était éloignée de celle d'un lutin moyen, et plus celui-ci était intellectuellement limité (peut-être fallait-il consentir à une exception pour les humains, qui semblaient doués d'une forme de raisonnement assez pertinente, enfin, elle n'en était pas sûre). Ainsi, les bêtes les plus grosses étaient aussi les plus stupides. Mais si on ajoutait à ces corps énormes son intelligence féerique, elle était certaine de pouvoir incarner une force terrible.
Elle aurait vraiment souhaité démontrer davantage ses capacités à Balsa, malheureusement, elle ne voyait pas comment s'y prendre. Courir à nouveau le risque de se transformer en géante ? Si elle la surprenait... Oui, cela devait être possible, en s'y prenant assez vite... Mais elle n'avait pas d'assurance que cela fonctionne, et elle gardait un souvenir assez terrible de la première tentative pour sérieusement pondérer toute envie de récidive. Hélas, demander la permission au modèle faisait perdre à l'action tout son intérêt.
Les bras croisés et faisait la moue, la fée donnait l'impression de bouder, et dans les faits, c'était à peu près ce qu'elle faisait. Toutefois, elle suivit patiemment et sans se décourager le plumage du gibier et le déplacement de la chasseuse vers le plan de travail. Ses yeux s'illuminèrent quand le sang de la volaille commença à goutter sur la pierre plate. Le sentiment se précisait : Elie était affamée. Elle prit encore la précaution de regarder la chimère se nourrir de quelques morceaux. Elle savait que dans les espèces sociables aux mœurs les plus primitives (les loups, les rats, les humains probablement) il était d'usage de laisser le dominant se repaître en premier. Quoiqu'elle puisse prétendre, Balsa n'avait à l'évidence rien à voir avec le peuple féerique et ses habitudes évoluées, aussi elle respecta l'ordre qui devait être celui des panthères, ou de la race de son autre parent. Très vite cependant, elle n'y tint plus et sitôt la gigantesque part de la demi-déesse prélevée, elle se fit entendre, poliment bien que sans parvenir cacher sa hâte :
-Si vous pouviez me laisser les miettes maintenant, ça serait sympa.
Après tout, pensa-t-elle, même les débris seraient un festin si on considérait ce que la Grande avait déjà avalé. Elle s'installa le dos contre un galet à demi-couché que son poids était loin de suffire à faire basculer. La journée avait été épuisante. De toute sa vie, elle n'avait jamais fais autant de chemin en si peu de temps. Se retrouver si loin de chez-elle si vite était effrayant, et elle ignorait comment se poursuivrait le voyage. Le conseil de la géante ne surprenait pas la fée, qui était passé experte dans l'art de tirer profit des autres, mais ici, il n'y avait qu'elles deux. Alors elle se trouvait obligée se rabattre sur ce qui restait. Aussi indocile que soit la chimère, il faudrait faire avec.
-Ouais... c'est facile à dire. Vous en voyez, vous, des humains, là, tout d'suite ? J'ai pas besoin de ça, d'habitude, vous savez. Juste pour cette nuit. Allez, j'suis même pas très lourde, et super sympa, comme vous avez pu le voir. J'vais pas vous ralentir. Et c'est toujours bien d'avoir une fée qui vous aime bien, même quand on est une déesse. Et puis vous allez où, vous ? Il y a d'autres choses intéressantes à voir pas loin ? En tous cas, je vous conseille pas les montagnes, c'est plein de monstres encore plus grands que vous. Et je parle pas des ours, vous voyez. |
| | | =Aïkologue=
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| Sujet: Re: L'Or de la Fée (libre) Ven 24 Fév 2012, 21:00 | |
| - Précisément...
Balsa posa sur la petite fée des yeux scrutateurs. Cette créature pouvait-elle comprendre ? Comprendre que c'était une vie dangereuse que la chimère recherchait. Comprendre que le défi était sa priorité. Comprendre enfin que ce n'était certainement pas les ours qu'elle redoutait. Car les montagnes étaient habitées, d'hommes d'abord, un peuple de redoutables guerriers et chasseurs. Mais surtout leurs « proies » : les géants. Elle avait entendu des rumeurs terribles à leur sujet et cela lui donnait de plus en plus envie de les rencontrer. Oui... aller dans les montagnes... Une sourire se glissa un instant surs ses lèvres : elle avait trouvé sa prochaine destination. Grâce à Elie d'une certaine manière.
Cette idée que la petite créature avait eu sans en saisir la validité était bien la seule chose de son discours qui intéressa la chimère. Celle-ci n'avait pas plus l'intention d'aider Elie qu'auparavant. Surtout qu'elle avait réclamé de la nourriture. Et sous-entendu par « j'suis même pas très lourde » que Balsa la porterait. Jamais ! Jamais elle ne se réduirait à être une bête de somme par simple gentillesse...
Elle en revint au canard, tailla un nouveau morceau de viande et le mâcha longuement. Les morceaux tendres avaient déjà été engloutis et ceux qui restaient demandait un plus grand effort de mastication. Elle déglutit finalement et observa la fée. Puis soupira, tailla un petit morceau et le lui posa devant elle – lui donner en main propre risquait de laisser passer le courant. La gentillesse était devenue faiblesse à ses yeux mais elle réalisait qu'en fait, ici, partager ne lui coutait rien. Cela entamait seulement sa fierté et son indépendance. Chose dont elle se serait moqué quelques années auparavant. Elle aurait même aidé, nourrit et accompagné la fée de bon cœur. Alors pourquoi ce changement ? La foudre qui s'était insinuée en elle y était surement pour quelque chose. Sa vie solitaire aussi et par-dessus sa servitude nouvelle envers le seigneur Nazj. Tout cela avait influé sur sa personnalité et sans doute qu'il ne tenait qu'à elle de revenir en arrière... Alors quoi ? Prendre Elie sous son aile et passer la nuit ici avec elle ? Non, il ne fallait pas abuser non plus.
- Les humains sont pas loin. Ya un village de pêcheurs sur la rive dans cette direction – elle pointa du menton vers le nord. Je t'y accompagnerai si tu veux mais tu devras ensuite te débrouiller seule. Je n'ai pas le temps de m'occuper de toi.
Ni l'envie à vrai dire... Balsa sentait qu'elle s'engageait dans une bonne action malgré tout. Et cela lui fit un peu bizarre. Ses contacts avec les gens civilisés se résumaient depuis longtemps à des luttes ouvertes ou silencieuses qui ne pouvait aboutir que sur la perte d'un des partis. Et elle perdait rarement, hormis cette fois à la frontière. De la pointe de la lame elle retira la peau d'une cuisse de l'oiseau, arracha la patte et mordit dans le muscle. Les dents crevèrent une veine et un peu de sang résiduel coula des lèvres de la chimère. Elle l’essuya du pouce et le lécha. Déglutissant elle considéra la situation sous un nouvel angle. Elle avait pour compagnie un être d'une race dont le mode de vie et les habitudes étaient bien peu connus. Elle avait beau avoir déjà rencontré l'une d'entre elles, Balsa ne connaissait pour ainsi dire rien aux fées. Akin ne lui aurait que conseillé de profiter de ce moment. Elle leva les yeux vers le ciel. L’après-midi touchait à sa fin, mais la soirée s’étirerait loin car les nuages étaient diffus et la lune grosse.
- Parle-moi un peu des tiens. Comment vous vivez, si vous croyez en quelque chose, qui dirige votre communauté... Combien vous êtes aussi et quels territoires vous occupez... Et tant que t'y es, pourquoi tu es partie.
Bon, la réponse serait surement longue. Forçant sa patience, elle croqua de nouveau dans la cuisse et mastiqua, silencieuse et toute aux propos d'Elie. Finalement, cette rencontre serait peut-être utile. Parfaire sa connaissance du monde était aussi important que l'entraînement car le savoir était une arme puissante. Et puis, s'il ne restait qu'une chose de l'ancienne personnalité de la chimère, c'était bien sa curiosité.
- Spoiler:
C'est un peu court désolée. Mais comme il se passe concrètement rien d'autre que "elle mange" je pouvais pas avancer plus sans que elie réponde.
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