Gazette n°6 ; 4 de la Grande Colère

Ainsi s’achevait hier la lutte du peuple de l’Eau contre celui de la Science. Les sirènes ont signé leur reddition par l’écume, celle qui moussait aux coins de chacune de leurs lèvres dégoûtées. Elles se sont pourtant battues avec bravoure pendant tout un mois. Celui de la Grande Colère porte-t-il le nom de leurs futures représailles ? Nous venons d’avoir une belle démonstration de ce que des hybrides écailleux peuvent déployer comme moyen de pression ! Si elles ont commencé calmement en étalant leurs pointes en ferraille sous le nez des scientistes, le niveau est vite monté d’un cran. Ne craignant nullement la fourberie technologique de leurs pires adversaires, elles les ont nargué en obtenant le soutien du peuple lors de leur manifestation autour de l’œuf, main dans la main, prônant qu’elles n’arrêteraient pas de chanter avant d’avoir obtenu satisfaction. Le surveillant général de l’œuf avait senti le coup venir et fourni à la majorité de sa troupe de quoi s’en protéger. Les quelques employés qui n’avaient pas emporté leurs EPI (équipement de protection individuel, dont le manque de port est passible d’un blâme sur un tel chantier) se sont vu enfournés des coquillages dans les écoutilles. A ce qu’il paraît, comme ça, on entend la terre.

Malheureusement, la stratégie des océanides échoua. Elles durent passer au plan C, comme Cauchemar. Des attentats furent répertoriés en nombre sur Lan Rei et dans les camps de la Firme érigés sur place. Des colis contenants des poissons carnivores dans les réserves, des crabes kamikazes pinçant les orteils des dormeurs, des enveloppes contenant de la poudre d’algue d’Ornium dont l’odeur est si immonde qu’elle provoque une descente d’organe…

Rien n’y fit. Le jour J, toute la clique technique était réunie autour de l’œuf. Tout avait été minutieusement préparé. Les sangles solides du harnachement recouvertes d’une toile amortissante, l’armature fixée à même le sol autour de l’œuf, la poulie à la circonférence forgée par un millimétrisme breuveté, la corde, la main d’œuvre pour le décoller et surtout… L’immense camion (une grosse charrette tirée par des chevaux invisibles mais très bruyants) délicatement conduit jusqu’au bord, dans lequel était contenu le lit douillet préparé afin d’accueillir la découverte fragile. Un nid, entremêlement de végétation aquatique et de soieries rares et chaudes. Mais tandis que Walter O’Fiil faisait cliqueter les mousquetons du harnais, tournoyer son doigt en l’air et sifflait un air de « Oh les mecs, plus fort les biceps ! », ce qui ne pouvait arriver… Arriva !

La coquille émit d’abord un faible couinement. Plus, alors que sa paroi lisse et jaune d’ornait de fissures, le son devint craquant. Comme un bruit de gâteau sec. Tout se passa très vite. Les cris, la chute, la frayeur… Hé puis, plus rien ! Seulement quelques morceaux de coquille, éparses sur les galets.L’équipe et la foule, ahuries, fouillèrent les alentours des yeux avant de revenir sur les débris de ce qui était quelques minutes auparavant une trouvaille pleine de questionnements, de spéculations abracadabrantes, réduite en une seconde haletante à une boîte de pandore fracassée. Quelle déception…

« Là ! » s’écria alors un mateur. Tout le monde, avec la coordination d’une paroi ciliée d’un poumon remontant le mucus jusqu’à la surface de l’épiglotte, se retourna vers le crieur. Et tout le monde assista à sa chute soudaine sur les cailloux, qui imita assez bien le craquement qu’avez fait la coquille. Une rafale de vent vint agiter violemment mes cheveux peu après, provoquant un sifflement étrange à mon ouïe, puis, le décor disparu de ma propre vue. Je me réveillais je ne sais combien de temps plus tard, dans l’une de ces fameuses tentes rouges à laquelle on m’avait refusé l’accès pendant le mois des préparatifs. Et je comprenais mieux pourquoi, l’intérieur était très décevant pour une construction de la Firme®. Un scientiste en blouse me cueillit à mon réveil, brandissant des outils étrangement brillants sous mes yeux.

Moi, Alphonse Verlile : Hop, pas si vite ! Qu’est-ce que vous comptez faire avec ça ?

Lui : Comment vous sentez-vous, Mr Verlile ?

AV : On se connaît ?

Lui : Les papiers que vous rangez dans votre poche arrière gauche de pantalon vous connaissent. Et puis, une fouine telle que vous, aussi têtue qu’un poney… Vous êtes une chimère extraordinaire, à croire que vous sortez tout droit de nos laboratoires. Je suis le docteur Thénias Paul Ykter. Vous pouvez m’appeler Doc.

AV : Oki Doc. Et ça sert à quoi ça ?

TPY : je mesure vos constantes, ne vous inquiétez pas. Dites-moi plutôt comment vous vous sentez.

AV : A vrai dire… Bien. J’ai l’impression d’avoir dormi trois jours.

TPY : En fait, nous finissons la vingt-cinquième heure depuis l’évènement. N’essayez pas de vous débattre, les sangles à vos poignets ont déjà servi à immobiliser un sylberwael. Plus vite je ferais mes examens, plus vite vous pourrez partir.

AV : L’évènement ? Vous parlez de… Ah ! Oui ! L’œuf ! Mais que s’est-il passé ? Les sangles l’ont cassé ?

TPY : Non, c’est impossible, tout avait été soigneusement préparé. En fait, nous pensons avoir occasionné un stress à l’œuf, qui a provoqué son éclosion.

AV : NE TOUCHEZ PAS A CETTE PARTIE DE MON ANATOMIE !

TPY : Je dois vérifier votre fébrilité… Le plus bizarre, c’est qu’il n’y ait rien eu, dans cet œuf. Pas même une membrane à examiner, un liquide biologique, une quelconque source de nutriment…

AV : Grr

TPY : Bien, comme les trois autres sujets tests, vous êtes apyrétique. Pourtant il y a bien une créature, là-dehors, qui vous a poussé dans ce qui semble être un profond sommeil. Avez-vous rêvé ?

AV : Pas que… ah, c’est froid ! Je me souvienne… Vous n’étiez pas préparé à faire face au bébé ? D’ailleurs, qu’est-ce que ça aurait dû être, selon vous ?

TPY : Qu’est-ce que c’est. Un mystère, pour l’instant. Aucune lumière, aucune onde, aucun outil de nos laboratoires sophistiqués n’a pu mettre à jour cette paroi. Sa matière elle-même nous est encore étrangère.

AV : J’ai l’impression que vous ne savez plus vous arrêter, mon bras va péter.

TPY : Mais il y avait un cœur battant là-dedans, c’est sûr. Toutes les grosses têtes sont sur le coup pour trouver un moyen de le dénicher. Si les yeux ne suffisent pas, la Firme trouvera! Bien, monsieur Verlile. Vous êtes en parfait état de santé, hormis cette ptose lipidique. Je vais vous libérer. Néanmoins, rester proche de votre domicile dans les jours qui viennent, et si jamais vous ressentez des effets bizarres, faites-en nous part immédiatement.

AV: J'ai l'impression d'être un suspect... Je sens que ce mois va être sympa.

Alphonse Verlile

Gazette n°6 ; 4 de la Grande Colère

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Quand je t'ai vue, sur cette place du marché, ce marchand furieux dressé devant toi, prêt à te chatier, je n'ai pas pu résister à la tentation de te sauver. Tu avais volé des pommes, et avec moi tu les as partagées, une fois les géneurs semés. Ton sourire, si brillant, et tes yeux, trop innocents, auraient du me mettre en garde, mais j'étais trop ébloui pour y penser.
Quand tu as entendu les gardes arriver, tu as pris cette corde et tu m'as attaché, avant de partir et de me laisser.
La prison est froide, je crois que tu le sais, mais si ça peut te rassurer, je crois que tout le monde t'a oubliée. Moi, en revanche, de toi je ne cesse de rêver.
Je ne t'en veux pas de m'avoir abandonné.
Pense seulement, la prochaine fois, à me remercier d'un baiser.

Gazette n°6 ; 4 de la Grande Colère

A force de remettre tout ce qu'on vous dit en question, vous devenez paranoïaque, et cela ne plait pas à vos soupirants! Commencez à croire tout ce que vous lisez, surtout si c'est sur internet.

Rappelez-vous: être ivrogne n'est pas une carrière viable.

Vous avez rencontré quelqu'un, et vous pensez qu'il pourrait bien s'agir de votre âme soeur? Votre imagination vous joue des tours.

Vous savez, cette culotte porte-bonheur que vous vous acharnez à porter tout le temps? Et bien elle ne vous sera d'aucune utilité cette ère-ci.

Lavez-vous les dents d'urgence.

Vous allez faire une rencontre incroyable ce mois-ci, et vivre heureux pour le restant de vos jours! Ah... Non, désolée, jme suis trompée de signe.

Vous allez faire une rencontre incroyable ce mois-ci, et vivre heureux pour le restant de vos jours! M'enfin, qui sait combien de temps il vous reste à vivre...!

Rien à signaler ce mois-ci (Je n'y peux rien si la seule péripétie que vous risquez est d'hésiter sur la marque de café à choisir.).

Vous êtes en veine en ce moment, vous devriez tenter votre chance au loto! Mais souvenez vous, heureux aux jeux...

Vous devriez envisager de faire une tresse avec les poils qui vous poussent dans la main. Au moins, ça serait plus esthétique.

Prenez le temps de déjeuner le matin, c'est le repas le plus important de la journée. Et puis au point où vous en êtes, on n'est plus à un ou deux kilos près.

Vous devriez faire une BA et donner une petite pièce aux mendiants que vous croisez. Ca sert toujours de soigner son karma, et vous serez bien content que quelqu'un en fasse autant quand vous serez à la rue.

C'est vrai qu'on dit que manger des carottes ça rend aimable. Mais ça n'a pas l'air de marcher sur vous, vous pouvez arrêter (sauf si vous voulez avoir le teint orange, ça vous regarde).

Vous vous souvenez de ce type qui vous a dit que l'avenir était dans le commerce des lamas cracheur de feu au nez pâle? Et bien il vous a menti.

Evitez de porter du rouge, ça ne vous va pas du tout au teint.

Non, ce ne sont pas vos vêtements qui ont rétrécit.

Amatha Cadabra