Alors qu'elle observait le reflet en face d'elle qui était le sien, la sirène s'aperçut que ledit reflet avait... Changé. La couleur de ses yeux et de sa peau s'était petit-à-petit modifiée. Lorsqu'elle bougea, le reflet ne la suivait plus. Ce n'était plus son reflet. C'était... Une créature qui avait prit ses traits? Eheïwa l'observa bouger, dans le miroir. Le ''reflet'' avait l'air vivant... Etait vivant. Elle ne voulait pas trop s'approcher, mais ne trouvait pas l'être effrayant. Plutôt très intéressant. Lorsque le miroir commença à se remplir d'eau, elle sembla intriguée et se rapprocha, presque instinctivement. Elle toucha le miroir, mais bien entendu, il était resté dur et froid. Eheïwa regarda donc l'être se faire engloutir sous l'eau. Elle aperçut une clé, rouge, étrange. Pourquoi? Elle n'eut pas le temps de s'approcher pour observer l'objet et le reflet de plus près qu'aussitôt la clé ''fondit'', le miroir éclata en morceaux. Eheïwa se décala rapidement en arrière, surprise par l'étrange événement. Elle attendit, appuyée sur le mur opposé au miroir brisé. Elle s'était imaginée que l'eau aurait envahit la salle, que la créature sortirait et se ''matérialiserait'', mais non. Après s'être assurée que rien n'allait vraiment sortir du trou qui était apparut derrière le miroir, elle s'approcha en faisant attention à ne pas se couper avec les morceaux de glace.
-Il y a quelqu'un?
La première phrase que la sirène avait prononcé depuis qu'elle était arrivée ici. Sa douce voix, veloutée et chaude, n'avait laissé aucun écho derrière elle.
Que devait-elle faire? Cette pièce n'avait aucune issue, si ce n'était ce trou... Elle n'avait rien a perdre. Après s'être quelque peu coupée aux pieds, elle traversa le miroir brisé. La sirène marcha alors devant elle, avec pour seule lumière le reste de rayon qu'offrait la salle ensanglantée... Mais petit-à-petit, la lumière disparut pour laisser place au noir complet. Eheïwa ferma les yeux. Ce geste lui permettait de laisser la vue de coté, pour se concentrer sur ses autres sens.
Aucune odeur... Celle du sang séché de la salle précédente avait disparut. Les mains devant elle, elle avança, jusqu'à trouver un mur. Il était aussi lisse que le sol. En fait, elle ne distinguait aucune différence entre le sol et le mur.
-Eheïwa...
La sirène se stoppa net.
-Eheïwa... Shunaï...
Des voix. Des voix murmuraient son nom.Elle décida de ne pas parler, préférant les écouter un peu plus.
-Sirène...Mer...
Elle ne comprenait pas. Pourquoi parlaient-elles d'elle? Pourquoi ces voix? Qui étaient-elles?
-Seule... Tu as toujours été seule... Tu es seule...
Eheïwa les laissa parler. De toute façon, allaient-elles seulement l'entendre?
Mais elle réfléchissait en elle-même à leur question.
Elle avait toujours apprécié la compagnie des autres sirènes, mais elles étaient... lassantes. Eheïwa n'avait pas les mêmes envies qu'elles. Elle ne s'amusait pas à hypnotiser les marins...
-C'est FAUX!
Elle sentit son cœur se mettre à accélérer.Elle était effrayée, en fait. Ces choses l'entendaient, dans sa tête?
-Tu as joué avec les marins, ne mens pas... Tu ne peux pas mentir...
Bon d'accord...Elle avait déjà noyé quelques marins... Une vingtaine... Tous des humains, de toute manière. Mais il fallait bien qu'elle essaye de ressembler aux autres sirènes... Et après quelques verres de Nephteil, ça n'arrangeait pas les choses... Et ce temps était révolu.
-Le crois-tu?... En es-tu sure? Certaine?
Elle hésita. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas touché à un marin. Au moins une soixantaine d'années.
-FAUX!
Eheïwa ne comprenait plus. Elle n'avait pas noyé un seul marin depuis ce temps!
-Noyé oui... Touché non!... Tu as désobéi.
Elle secoua nerveusement la tête. Non... lui... ç'avait été une erreur... Une simple erreur.
-La curiosité...C'était ta curiosité, Eheïwa.
Elle fronça les sourcils et grimaça. Comment n'aurait-elle pas put essayer? Apprendre... Elle avait beaucoup apprit, ce voyage là.
-A quel prix...
Eheïwa rouvrit les yeux. Fatalement, il faisait toujours un noir d'encre. Elle prit alors conscience que ses suffoquements reprenaient. Ils avaient cessé, lorsque le miroir s'était rempli d'eau et avait éclaté, mais lorsque les voix lui rappelèrent sa malédiction, ils reprirent de plus belle. Pour éviter de s'évanouir, elle se coucha au sol, sur le dos. Elle prit de longue inspiration, calmant ses spasmes.
Oui, elle avait été trop gourmande, voulant aller toujours plus loin à l'intérieur des terres, où les sirènes n'étaient encore jamais allée, avec lui comme guide... Mais l'océan l'avait rappelé à l'ordre.
-La gourmandise est un vilain défaut...
Oui... Un vilain défaut... L'amour aussi est un vilain défaut...
-Seulement si on dépasse le raisonnable.
Eheïwa se sentait mise à nue, de nouveau. Elle l'avait été, littéralement, exposée au regard des miroirs, elle avait été humiliée. Et là, d'autres esprits s'en prenait à l'intérieur d'elle-même.
-Tu n'aimes pas ça, hein?
Non... Elle détestait ça... Personne n'avait le droit de la mettre à nu, personne n'avait le droit de la scruter comme ils la scrutaient.
Elle essaya de vider son esprit. Mais les voix reprirent de plus belle.
-Une perle cachée dans son grotesque coquillage... Pourquoi te fermes-tu autant lorsque l'on essaye de t'ouvrir?
-Parce que je...
Eheïwa avait voulu leur répondre sans réfléchir en leur parlant.. Elle préférait cela à ce qu'ils la scrutent au fin-fond de ses pensées.
-Je ne peux plus faire confiance... Je n'aime pas... C'est... Une protection.
-De quoi te protèges-tu?
Eheïwa marqua un temps de pause. De quoi se protégeait-elle vraiment? De tout? Ou d'un seul?
-Je me protège de tout.
-Dans ce cas, pourquoi veux-tu tout avoir vu? Tout connaître? Si tu as peur de Tout, tu devrais le fuir!
-Non... C'est en le connaissant que je pourrais mieux m'en défendre.
Elle en était persuadée. Si il y avait bien une phrase à ce souvenir de la sirène, c'était bien celle-ci.
Connaître tout pour mieux s'en défendre.
-Pourquoi s'en défendre? Pourquoi t'attaquerait-on? As-tu quelque chose à te reprocher?
Eheïwa réfléchit. Se sentait-elle attaquée? Ici, maintenant, oui. Mais se sentait-elle menacée? Par le monde? Pas vraiment. Disons alors que ce n'était alors qu'un simple principe, qu'elle s'était donnée, pour pouvoir vivre tranquille, sans qu'on s'occupe d'elle.
-Solitaire? Pourtant, tu aimes vivre avec d'autres peuples.
Mais elle partait dès qu'ils s'attachaient trop à elle... Dans un sens donc oui, solitaire.
-Tu pars dès que tu tiens un mâle dans tes mains!
-Non! Justement, je ne veux pas qu'ils s'attachent à moi, alors je pars
-Tu les fais souffrir...
-Je préfère les faire souffrir avant, plutôt qu'ils ne s'accrochent vraiment.
-Pourquoi vas-tu vers les autres peuple, découvrir leurs cultures? Regrettes-tu ce que tu es?
Eheïwa était dubitative... Cette question était assez dérangeante, elle ne savait pas comment y répondre.
Elle aimait l'océan, ses êtres, ses grandes étendues bleues où elle pouvait nager en liberté. Sur terre, et elle l'avait remarqué, les peuples étaient nombreux, et partager le territoire était parfois difficile. Et il y avait les humains. Elle aimait découvrir la culture des autres peuples, assouvir avec plaisir sa curiosité... Mais les humains... Prêt à enfermer n'importe qui afin de l'examiner sous tout les angles!
Ils n'essayaient pas de vivre avec les autres. C'étaient les autres qui devaient survivre avec eux.
Elle n'avait pas vraiment de haine contre eux, mais leur manière de se comporter était déplacée.
-N'es-tu pas, toi aussi quelques fois, égoïste?
-Si... Mais pas au point d'atteindre la liberté des autres!
Elle s'était énervée. Ses spasmes reprenaient, et elle préféra se taire et se calmer avant de répondre aux questions de voix. Elle avaient l'air de chuchoter entre elles, incompréhensibles. Puis une, qu'elle n'avait encore jamais entendue, reprit :
-Liberté... Tu as toujours ce mot dans un coin de ton cœur... Comme s'il faisait parti de toi.
-Je veux être liberté. Je serais mon seul maître.
Sur ces paroles, Eheïwa avait été directe, sûre d'elle. Peut-être était-ce finalement la simple voie que suivait sa vie. A la recherche de liberté, encore et toujours. Peu importe le prix qu'il lui en coûtait. Mais où était la limite de cette liberté?
C'était ce qu'elle voulait savoir.
Découvrir, par delà les limites.
Mais elle s'en était déjà trouvé une.

Eheïwa était à deux doigts de s'évanouir. Les voix autours d'elle n'étaient que brouhaha, elle ne comprenait plus rien. Soudain, sortit du néant, un rayon de lumière tomba juste à ses pieds. Une clé. Blanche. La lumière qu'elle faisait se diffusait en un carré. Lorsqu'Eheïwa s'approcha en titubant, lorsqu'elle mit ses deux pieds dans le carré, cherchant l'étrange objet, elle se sentit tomber... tomber... Elle voulut crier, mais n'y arrivait pas. Comme dans un de ces mauvais cauchemards ... où le vide vous emporte et où vous ne pouvez y échapper. Alors elle ferma les yeux, se laissant emporter dans le vide.
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Entrouvrant les paupières, la sirène ne vit que du blanc. Elle en avait mal aux yeux. Elle referma les paupières.
Elle se sentait bien.
Apaisée.
Que c'était-il passé?
Elle ne se rappelait plus bien.
Rouge... Noir.
Miroir...Voix.
Et maintenant?
Blanc.
Elle était couchée, ventre au sol.
Son visage baignait dans l'eau, jusqu'aux oreilles.
*Tilt*
Elle bougea chaque membres de son corps, chaque muscles, se retourna sur le dos et s'assit. Elle vit sa queue violet nacré ruisselante de gouttelettes transparentes. Le peu d'eau dans la pièce l'avait retransformée.
Elle soupira de soulagement.
Habituée au blanc lumineux, elle regarda autours d'elle. La couleur uni-formait l'espace, si bien qu'on ne distinguait pas ses limites. L'agréable présence de l'eau ajoutait de calmes reflets au plafond et au sol. Eheïwa se traina, prenant appui sur ses bras, essayant de trouver un mur...ou quelque chose... Mais avant d'avoir trouvé quoi que ce soit, une masse d'eau s'éleva dans l'air, se sculptant peu à peu une forme distincte.
Après la surprise, Eheïwa aperçut les traits de sa mère dans la masse d'eau, portant un enfant dans ses bras. Elle. La sirène vit sa mère, souriant, apportant le bébé à une autre masse d'eau. Son père. Les deux "sirènes" étaient seules. Couple solitaire habituel chez les mermaïdes. Ils avaient toujours refusé d'entrer dans un quelconque clan, ne se soumettant à aucune autorité, si ce n'était celle de l'Océan. Cela devait sûrement expliquer son désir à elle de ne jamais appartenir à personne. Les deux masses d'eau retombèrent, Eheïwa affichait un sourire mélancolique sur ses lèvres. Dans l'eau autours d'elle, des images, floues, puis de plus en plus nettes, ondulaient paisiblement, se mélangeaient, disparaissaient, réapparaissaient. Des souvenirs de sa vie étaient éparpillés là, à ses pieds (ou plutôt, à sa queue... même si l'expression n'existe pas). En fonction de sa mémoire, elles étaient plus ou moins nettes, plus ou moins colorées, et les dialogues qui s'en échappait étaient plus ou moins distincts. Elle reconnaissait alors des voix, familières ou non. Qu'elle avait entendue tout au long de sa vie. Curieuse, elle observa les scènes qui se jouaient autours d'elle avec attention. Les premières images de sa vie passaient en images très floues, éphémères... Elle rencontrait d'autres mermaïdes ça et là... Elle et ses premiers pas sur une plage, sa mère à ses côtés. Et puis, le jour où, comme toute mermaïde, ses parents l'ont "libérée", la trouvant prête à vivre sa propre vie, sur sa propre route. Elle avait 17 ans. Elle souriait, ses parents aussi. Sa mère lui avait ensuite donné un carnet, ainsi qu'un bâtonnet d'encre marin. Avec, Eheïwa pourrait garder une trace de chacun de ses voyages, ses rencontres... Un carnet de voyage, en somme.
Les carnets se transmettaient de génération en génération dans sa famille, et ils avaient entreposés ceux qui étaient terminés dans une grotte, pas loin de la côte Ouest de Rosiel. Eheïwa les avait dévorés étant petite, et elle n'avait pas encore terminé lorsqu'elle quitta ses parents. Elle était excitée à l'idée d'aller elle-même le remplir, découvrir ce vaste monde, surtout les terres...

Des années passèrent. La jeune sirène avait atteint son âge adulte, était devenue une "belle" femme. Les mers aux alentours de l'Archipel n'avait plus de secret pour elle, et elle avait tenté deux ou trois fois des journées sur la terre ferme, mais jamais trop longtemps. Ses parents l'avaient prévenue, les dieux leur permettaient d'aller sur terre, mais les sirènes sont des êtres de l'Océan. Personne n'avait jamais sut combien de temps une sirène pouvait rester sur terre. Alors Eheïwa commença à s'aventurer un, deux, cinq jours... Puis revenait à l'eau. Une semaine... Deux...

Dans la salle blanche, Eheïwa était entourée de dizaine de masses d'eau... Des êtres rencontrés pendant les voyages. Dans l'eau, les décors, les scènes de ses souvenir défilaient à coté d'elle. Centaures... Vampires... Anges... Hybrides de toute sortes... Fées... Trolls... Certains étaient très détaillés, lorsqu'elle avait passé avec eux plus d'une semaine, d'autres très floues, apparitions rapides qu'elle n'avait parfois même pas put approcher. Elle était aussi fascinée par la flore terrestre. Ces... Arbres? Enormes végétaux, s'élevant majestueusement vers le ciel... Elle était en admiration devant ces êtres grandioses.
Une des masses d'eau attira son regard. Un Centaure. Beau, imposant, rayonnant de force. Elle le regarda "marcher" vers elle, l'air sage, calme. Elle le trouvait beau. Elle l'avait trouvé charmant. Il lui avait montré son monde, pendant des semaines...des mois...des années? Le temps était passé tellement vite. Trop vite.
Entre elle et la reproduction aqueuse du centaure se jouaient des moments qu'ils avaient passé ensemble, jusqu'à ce jour fatidique. Il ne la voulait que pour lui, elle voulait rester libre. Il l'avait alors attrapé, désespérément, essayant en vain de la posséder, mais elle s'était enfuie aussi vite qu'elle l'avait put, effrayée par le changement de caractère de ce qu'elle pensait être son ami. La masse d'eau devant elle tendit un bras, s'approcha, elle frappa instinctivement, pour se protéger, et elle vola en mille gouttes d'eau, qui retombèrent au sol, là où Eheïwa pouvait se voir en train de regagner comme elle pouvait la mer, qui, depuis des jours, n'avait cessé de la rappeler. Mais il était trop tard. La sirène n'était pas revenue depuis trop longtemps, et alors qu'elle était sur le chemin du retour, l'Océan frappa. Elle se vit entourée d'une tornade d'eau, qui la ramena directement à la mer, puis plus rien. Mais elle savait qu'elle avait été punit, elle le sentait. Elle resta quelques jours en mer, retrouvant avec un certain soulagement son élément. Mais elle voulait être sûre.
Lorsqu'elle s'approcha du rivage, elle sentit la pression. Mais elle continua. Arrivée à deux doigts de la plage, une vague se sculpta pour former une femme, grande et imposante. Elle regarda Eheïwa, en colère, et lui parla dans un langage compréhensible d'elles seules, mais que je vous traduis ici, histoire d'y comprendre quelque chose:
-Eheïwa! Tu abuses de ma patience! Je t'ai ramenée à l'Océan, et tu veux déjà repartir! Je te préviens! Tu ne pourras fouler la terre qu'un jour par an, cela t'apprendra peut-être à me respecter. Lorsque tu redeviendras digne des grâces de l'Océan, peut-être lèverais-je ta punition.
La vague retomba aussitôt, laissant Eheïwa plantée là. Elle était vidée. Une part de liberté enlevée. Or c'est ce qu'elle recherchait... C'est ce pourquoi elle vivait. Elle tomba, molle comme une étoile de mer morte dans l'eau, se laissant emporter par le courant.

Liberté, Ô, Liberté, jusqu'où allons-nous pour te trouver?
Jusqu'à te perdre...

"Il n'est point de bonheur sans liberté, ni de liberté sans courage". Périclès

merci! =D
oui je sais que c'est bizarre, c'est pour ça qu'elle c'est faite punir d'ailleurs... Mais vu que je n'avais jamais vu nulle part jusqu'à quand une sirène qui a des jambes quand elle n'est pas dans l'eau peut rester sur terre, je me suis permise cette fantaisie... Mais si ça va pas, hophophop, j'édite! =)

Bienvenue, la petite sirène téméraire =)

C'est pas dramatique, le tout c'est que tu le sache pour la suite surtout

Et au passage, ça fait plaisir de voir une sirène chez nous, ça faisait longtemps qu'on en avait pas vu (ben en fait, y a qu'Arhid sinon jcrois quasiment, enfin d'actif en tout cas.)